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Dico de mots qui piquent

Théologie – Satisfaction vicaire

Par : pasteur Marc Pernot

Satisfaction vicaire

Théorie d’Anselme de Cantorbery au XIe siècle, selon quoi le Christ aurait acheté sur la croix le pardon de nos horribles péchés.

À quoi sert la mort du Christ ? Anselme de Cantorbery, au XIe siècle, a proposé une théorie assez simple car correspondant à la logique si humaine du commerce. La thèse d’Anselme est appelée du doux nom de satisfaction vicaire. Selon cette théorie, Dieu ne pourrait pardonner une faute qu’à condition que quelqu’un paye. Selon cette théorie, comme nos péchés sont abominables et que nous sommes nombreux, la note est vraiment salée. Nous sommes surendettés de péchés. Déjà, cela me semble exagéré, mais la suite du raisonnement est abominable : le Christ, en étant innocent et en souffrant terriblement, aurait payé la note, nous achetant ainsi notre pardon pour satisfaire la terrible justice de Dieu.

Cette théorie est une incroyable régression par rapport à l’évangile du Christ, elle est même en régression par rapport au livre de la Genèse, où l’on apprend avec Abraham que Dieu n’attend pas de sacrifices humains, encore moins le sacrifice d’un fils bien aimé, car c’est d’avance que Dieu nous a béni. Le Dieu de la Bible n’est pas Baal ou Moloch.

La théorie de la satisfaction vicaire est épouvantable dans l’idée de Dieu qu’elle projette : un Dieu qui pourrait d’une certaine façon se « satisfaire » de la peine d’un homme. Un Dieu qui aurait besoin de cette peine, de cette souffrance, et même de la peine de son enfant bien aimé ! Alors que sa justice est l’amour, un amour gratuit.

Cette théorie est épouvantable est épouvantable également par l’idée de justice qu’elle offre à la conscience humaine. Non, il n’est pas juste qu’un innocent souffre à la place des coupables. Le projet de Dieu n’est même pas que le coupable souffre, mais qu’il change et vive enfin. Et puis, non, le pardon et l’amour ne se monnayent pas, ni en faisant du bien, mais encore moins par de la souffrance, et certainement pas par du sang ou de la mort.

Certes, cette théorie du rachat de nos péchés par le Christ peut trouver une justification biblique. Mais les pires idées peuvent être aussi justifiées par des textes bibliques. Une autre compréhension de la croix du Christ est non seulement possible, mais soutenue quasi unanimement par les 4 évangiles et par des textes majeurs de l’apôtre Paul. Le cœur même de l’Évangile c’est que le premier à aimer (même ses ennemis) : c’est Dieu. Il n’y a pas de « péché originel », c’est une invention du Ve siècle, par contre il y a un amour originel, celui de Dieu. Il n’y a donc rien à racheter. Et l’amour de Dieu, comme tout amour véritable, ne s’achète pas.

Cet amour originel, Jésus en témoigne quand il dit, selon le témoignage de Jean : Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque ait foi grâce à lui ne meure pas, mais qu’il ait la vie éternelle.(Jean 3:16) L’amour de Dieu est premier, et le Christ manifeste cet amour qui est à l’origine de tout ce qui est vivant et bon en ce monde, il le manifeste pour que nous vivions par lui.

L’apôtre Paul qui développera bien cette notion d’amour originel de Dieu, manifesté en Christ. Par exemple dans sa lettre aux Romains, l’apôtre Paul nous dit que :

Alors que nous étions encore sans force, Christ, au temps marqué, est mort pour des impies. À peine mourrait-on pour un juste, quelqu’un peut-être mourrait pour un homme de bien. Mais Dieu prouve son amour envers nous, en ce que, lorsque nous étions encore des pécheurs, Christ est mort pour nous.
(Romains 5:6-8)

C’est clair. La croix est signe de l’amour de Dieu pour nous. Elle est signe du pardon de Dieu, elle n’achète pas ce pardon. Et comme Jésus dans le passage de l’Évangile selon Jean que je citais précédemment, Paul nous dit que cet amour manifesté sur la croix nous invite à aimer Dieu, à nous réconcilier avec lui. Et Paul ajoute, un, peu plus loin que :

« Rien ne nous séparera de l’amour de Dieu manifesté en Jésus-Christ : ni la mort ni la vie, ni les anges ni les dominations, ni les choses présentes ni les choses à venir, ni les puissances, ni la hauteur, ni la profondeur, ni aucune autre créature. » (Romains 8:38-39)

Parce que cet amour est donc sans chantage, nous ne sommes pas obligés d’aimer Dieu en retour. Nous l’aimerons si nous le voulons bien. Nous aimerons les autres si le cœur nous en dit. C’est la liberté et la joie de Dieu, si je puis dire, d’aimer l’humanité et d’aimer chaque être individuellement, d’aimer ainsi même si c’est unilatéralement. C’est notre liberté de nous ouvrir ou non à cette dynamique, à cette qualité d’être, de cheminement et de vie qu’est Dieu. C’est notre liberté, et c’est vraiment aussi une joie.

(Voir aussi Rédemption)

 

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