une composition montrant un koala dans un incendie de brousse - Image par Susan Cipriano de Pixabay
Prière

Un chrétien australien remercie Dieu de l’avoir protégé des incendies. Lui et pas les autres ?

Par : pasteur Marc Pernot

une composition montrant un koala dans un incendie de brousse - Image par Susan Cipriano de Pixabay

Question posée :

Bonjour monsieur Pernot
Je viens de lire un article d’un chrétien australien qui, suite à ses nombreuses et intenses prières, remercie Dieu de l’avoir protégé, lui et sa ferme, lors de ces derniers terribles incendies que son pays a subis.
Je ne peux malheureusement pas oublier que de nombreux autres chrétiens ont prié tout aussi fort et y ont laissé leurs habitations voire leur vie.
Qu’en pensez-vous ?
Merci encore pour votre site et pour le temps que vous y passez

Réponse d’un pasteur :

Cher Monsieur

Je suis bien d’accord avec vous que la prière de ce chrétien australien ayant été épargné par une catastrophe pose pour le moins des questions.
Du côté positif, je comprends que l’on rende grâce, que l’on remercie Dieu pour toute belle chose qui arrive dans notre vie.
  • Car Dieu est l’inventeur de la possibilité même de toute vie. Il me semble bon de s’en souvenir, d’honorer cette source ultime qu’est Dieu. Par honnêteté, par sagesse, pour nourrir notre foi et notre espérance, et par témoignage,
  • Ensuite, cette action de grâce est une saine humilité, reconnaissant que bien des belles choses de notre vie n’est pas sont pas uniquement dues à nous-même, mais sont en réalité une grâce imméritée.
Il y a aussi des difficultés que posent cette prière :
  • Si l’on pense que Dieu a une action mécanique directe sur le trajet de l’incendie, sur la force des vents, sur le retard de pluie, sur l’entretien des forêts… à mon avis cela pose de graves problèmes théologiques et éthiques : car cela justifie certains événement inqualifiables comme la mort d’un enfant innocent dans des maladies atroces, par exemple, en effet, si Dieu pouvait les empêcher cela et ne le fait pas c’est alors que torturer un enfant est acceptable. Quel conception de Dieu est-ce là ? Quelle conception de ce qui est juste, de ce qui est cruel ? Cette conception, logiquement, interdit tout acte médical ou de secours puisqu’elle considère que la maladie de l’enfant ou que l’incendie ravageur sont dans la main de Dieu, et donc que cela appartient à son plan. La foi consisterait alors, logiquement, de répondre à ces événements : « Amen ! » et de rendre grâce à Dieu pour ces terribles catastrophes. Cela me semble absolument horrible.
  • Une seconde difficulté dans cette action de grâce remerciant Dieu pour ce miracle est vis à vis des personnes qui n’ont pas été épargnées, par exemple en perdant une partie de leur propre famille. Car comment ces personnes peuvent entendre la louange à Dieu du miraculé ? Que Dieu pouvait sauver qui il veut, que la prière de cette famille épargnée a été entendue et que sa prière ne l’a pas été ? Comment peut-il le comprendre ? Peut-être que Dieu l’aime moins ? Dieu aurait alors des chouchous ? Peut-être que Dieu lui envoie une épreuve pour évaluer sa propre foi (comme s’il ne le savait pas, et comme si la torture physique et morale était un juste moyen de faire passer une examen) ? Ou peut-être qu’il va penser que sa prière n’était pas bonne, sa foi pas suffisante (ce qui lui ferait alors se sentir personnellement coupable de la mort atroce de sa famille, ajoutant la culpabilisation à sa douleur immense) ?
Donc vous avez raison, bien raison, je pense, de vous poser ce genre de question.
En ce qui concerne la théologie, il me semble essentiel de garder que Dieu, absolument toujours, est du côté de la vie, du bonheur, de la santé, de l’espérance. Il lutte et nous appelle à lutter au mieux contre la maladie, destruction, gâchis, désespoir, mort d’enfants et destruction de populations de koalas… Par conséquent, Dieu n’est pas « tout puissant », il est puissant et inspirant, aimant, accompagnant. Voir pour plus d’éléments : https://jecherchedieu.ch/dictionnaire-de-theologie/mal-existence-du-mal-de-la-souffrance/
En ce qui concerne la gratitude, la louange à Dieu d’avoir de belles choses dans notre vie, à commencer par la vie elle-même, ce qui est en bonne santé en nous, la nourriture, les amis, les petits et grands miracles dont nous bénéficions : je dirais que cette louange doit être pudique, discrète, et non ostentatoire, afin de ne pas faire de mal à notre prochain qui a moins de chance. Car oui, il y a une part de chance qu’il ne faut pas négliger, quelque chose de ce chaos primordial qui reste dans la nature et qu’avec Dieu nous travaillons à travailler pour qu’émerge la vie et ce qui est bon. Il y a aussi du hasard dans la structure même de la matière. Et cela fait que, quand la foudre tombe, telle personne va être frappée et telle autre personne à côté sera épargnée, alors que l’une et l’autre ne sont ni moins aimée de Dieu, ni plus responsable de ce qui lui arrive.
Il y a moyen de remercier Dieu qui nous rend meilleur, avec plus de compassion pour ceux qui souffrent, plus d’humilité dans notre bonheur, le goûtant encore mieux, nous donnant envie d’être meilleur et de participer d’une certaine façon à rendre ce monde plus beau, plus heureux et plus juste. Avec Dieu.
Il vous bénit et vous accompagne

par : Marc Pernot, pasteur à Genève

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