gravue égyptienne semblant reparésenter un maître maltraitant des esclaves - Image par DEZALB de Pixabay
Bible

Pourquoi Dieu dit-il en parlant de Pharaon : « moi j’endurcirai son cœur et il ne fera pas le bien » ???

gravue égyptienne semblant reparésenter un maître maltraitant des esclaves - Image par DEZALB de Pixabay

Temple de Ramsès III, avec un maître semblant maltraiter des esclaves.

Question posée :

Bonjour. Pourquoi Dieu dit il en parlant de Pharaon : … »et moi j’endurcirai son cœur et il ne laissera point aller le peuple… »
Pourquoi Dieu complique t-il la tache de Moise ( et la sienne indirectement) en endurcissant le cœur de pharaon ? N’aurait il pas été plus judicieux au contraire, d’adoucir le cœur de Pharaon pour qu’il laisse aller le peuple ?Est ce juste pour faire la démonstration de son pouvoir, ou y-a-t-il une autre raison qui m’échappe ?

Merci de votre attention,
Cordialement.

Réponse d’un pasteur :

Bonjour

Je reconnais que si l’on prend cette histoire au sens littéral, elle est assez incompréhensible, et même choquante. Il est dit et répété que Dieu « L’Eternel endurcit le coeur de Pharaon, et Pharaon ne laissa point aller les enfants d’Israël. » (Ex 9:12; 10:20,27; 11:10; 14:8)
Non seulement Dieu endurcit le cœur de pharaon, l’empêchant de faire preuve de compassion pour ceux qu’il opprime. Mais Dieu punit ensuite le pharaon de n’avoir pas changé, c’est le comble, après l’en avoir empêché. Il le punit en tuant les fils premier-nés de son peuple, des enfants qui sont encore moins responsables que le pharaon ! ! ! Quelle horreur, vous avez raison. Surtotu en pensant à ce que Jésus-Christ a incarné comme façon d’être.
Selon un enseignement millénaire, quand un texte de la Bible est impossible au sens littéral, c’est qu’il faut le prendre au sens figuré. Par exemple quand on dit que Christ est la lumière du monde, ce n’est manifestement pas le cas au sens littéral, matériel, et tout le monde le lit au sens figuré.
C’est assez facile avec cette histoire de la Pâque juive, la sortie de l’esclavage en Egypte grâce au secours de Dieu, car cette histoire est enseignée et célébrée par les juifs en vue de l’intérioriser, et que chacun puisse vivre personnellement ce Dieu qui le libère, lui ou elle, personnellement. C’est ce qu’a retenu aussi la relecture chrétienne de cette Pâque, célébrant notre libération du péché et de l’aliénation par Dieu, entrant ainsi dans la liberté et la vie en abondance, par l’Esprit. C’est ce que fait par exemple l’apôtre Paul (1Corinthiens 10:1-2) quand il nous dit que cette traversée de la mer rouge et l’élimination des soldats du Pharaon est une image de notre propre baptême, éliminant le péché et la mort en nous, pour libérer et ressusciter le Christ en nous. Dans cette lecture, nous sommes donc à la fois les égyptiens et les hébreux, Pharaon et Moïse.
  • Les Égyptiens et le Pharaon sont une figure de ce qui est mauvais en nous-même : nos blessures anciennes, notre manque de développement, notre orgueil, notre haine, notre dépression… tout ce qui nous opprime et nous tire vers le bas.
  • Les hébreux sont une figure de notre meilleur nous-mêmes, de notre part de bonne créativité, notre personnalité profonde… Moise représente notre foi, l’enfant de Dieu en nous, animé du souffle de Dieu, ce qui en nous avance et espère, aime et fait avancer.
L’avantage de cette théologie mise en récit est que cela nous laisse toute latitude pour l’approprier à nos propres difficultés et qualités.
Venons en à notre Pharaon.
Le salut de Dieu est comme une pédagogie pour nous, une psychanalyse, une guérison. Notre pharaon intérieur est habile, il est prêt à négocier, à se faufiler, à se faire passer comme pouvant progresser.
Dieu endurcit le cœur de pharaon. Il y a des choses en nous et dans l’humanité que l’on pourrait convertir, qu’il faut convertir avec l’aide de Dieu, c’est ce que représentent ce peuple hébreu englué dans son exil et secouru par Dieu, se mettant en route. Mais nous avons aussi des blessures, des maladies, des travers qu’il faut purement et simplement éliminer. C’est ce qui est symbolisé par les Egyptiens ici, Pharaon étant comme ce cœur de tout ce mal en nous, ses armées étant sa puissance, ses enfants étant les fruits de ces maux. Comment éliminer cette source de souffrance et de mort, source de mal en nous ? Dieu durcit nos travers pharaoniques afin qu’ils montrent leurs vrais visages, afin que nous les démasquions comme tyranniques et que Dieu puisse alors nous en sauver. Aucun remords de supprimer purement et simplement ce qui s’apparente à ulcères existentiels, spirituels et moraux pour nous.
Bien d’accord avec vous pour dire qu’il est impossible de lire ce récit de l’Exode au sens littéral, comme si Dieu pouvait endurcir le cœur de telle personne afin de l’empêcher d’avoir compassion. Jamais de la vie. Et Dieu ne peut pas en vouloir à quelqu’un qui a du mal à s’ouvrir, du mal à comprendre, du mal à évoluer. Évidemment et même au contraire. Dieu ne tue pas ni les égyptiens, ni leurs enfants innocents. Pas même un seul. Lire ce texte à la lettre, matériellement, est de la mauvaise théologie, et une mauvaise théologie engendre une mauvaise conception de ce qui est juste, une mauvaise éthique. Cela engendre même une mauvaise prière, encore troublée par une certaine crainte d’un Dieu potentiellement arbitraire et cruel… Alors que tout est déjà donné par grâce. Il n’y a qu’à aller réveiller le Moïse (ou la Moïsette) qui sommeille en nous et qu’il mette en œuvre le salut de l’Éternel très concrètement dans nos existences. Nous libère de ce qui nous bloque, et nous aide à avancer.
Tant qu’à faire, il y a un autre passage impossible à lire au premier degré dans cette histoire :
« L’Éternel dit à Moïse : Vois, je te fais Dieu pour Pharaon, et ton frère Aaron sera ton prophète. » (Exode 7:1)
Dire que l’Éternel nous fait Dieu, comme il est dit ici pour Moïse, est tout à fait incroyable, car nous ne sommes pas Dieu, ni même un petit dieu. Se prendre pour dieu est même présenté dans la Genèse pose comme étant le « péché » fondamental, source de bien des maux, en nous et autour de nous. Mais voilà : c’est toute la différence entre la folie de se prendre pour Dieu ; et recevoir de Dieu une dimension divine (l’Esprit en nous). Ou plutôt discerner que Moïse représente cette dimension divine en nous, source de libération, capable d’éliminer ce qui est pharaonique en nous. Et comme même notre petit Moïse en nous a ses insuffisances (qui n’en n’a pas ? Moïse avait les siennes aussi), Dieu prend cela en compte Dieu nous donne des frères et des sœurs à nos côtés pour nous compléter. Afin de travailler en équipe. Et cela aussi est une grande bénédiction.

Dieu vous bénit et vous accompagne.

par : Marc Pernot, pasteur à Genève

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5 Commentaires

  1. Émile Morantin dit :

    Bonjour,
    Si l’on traduit l’Eternel par:esprit subconscient (comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire),votre passage s’éclaircit aussi ! notre subconscient nous menant par le bout du nez,en flattant notre égo il peut nous conduire à nous prendre pour Dieu (modèle réduit quand même!!)
    Bonne soirée!

  2. Bastien dit :

    Bonjour,

    J’ai beaucoup de mal avec cette article. Je ne pense pas que l’on doit prendre ce texte au sens littéral. Le pharaon a précédemment endurcit son coeur. Dieu est maître de tout. Quand il décide que l’heure du jugement doit arriver pour les 400ans d’esclavage infligés aux israélites il peut le faire. Dieu est juste et prend des décisions que nous n’arrivons pas toujours a comprendre mais qui sont bonne parce que lui sait ce qui est bien. Dieu est amour mais il est aussi juste.

    Si un homme fait une crise cardiaque en roulant et tue une famille complète, est-ce que Dieu n’est pas responsable pas son « inaction » ? Il aurait put physiquement empêcher la crise cardiaque mais decide de ne pas le faire. La famille va subir comme les nouveaux nés dans Exode des conséquences graves à notre échelle. Toutefois je crois que Dieu a un plan et son amour se présente parfois de manière incompréhensible pour nous mais pour rien au monde je ne voudrais passer à côté de cela.

    J’espère que le ton employé ne sera pas interprété comme aggressif. Mon commentaire se veut constructif avec amour😅.

    Cordialement

    1. Marc Pernot dit :

      Il est vraisemblable que vous seriez plus à l’aise dans une église et sur des sites de chrétiens « évangéliques ».
      L’idée que tout serait sous contrôle de Dieu pourrait être séduisante, intellectuellement et psychologiquement, avec l’espérance que si l’on est assez fidèle, Dieu mettra sa toute puissance en notre faveur. Cependant, cette théorie est très cruelle pour les personnes qui perdent par exemple leur enfant de maladie, en leur disant que c’est la volonté de Dieu, ce qui est épouvantable.

      Si tout était sous contrôle de Dieu, et l’on est cohérent, cela voudrait dire aussi que ma myopie serait la volonté de Dieu et qu’il serait fidèle de ne pas la contrarier en mettant des lunettes, mes caries dentaires aussi, et les catastrophes naturelles seraient sa volonté.

      Au contraire, en Christ nous voyons que Dieu est amour, qu’il est du côté de la santé, jamais du côté de la maladie, et que nous sommes appelés à prier et à agir pour que sa volonté soit faite sur la terre (c’est qui signifie qu’elle ne l’est qu’en partie). Dieu n’est jamais du côté de la tentation et des mauvais sentiments mais il nous inspire le meilleur…

      Dieu vous bénit et vous accompagne

  3. Philippe dit :

    Bonjour M. Pernot,
    quand vous écrivez « Dieu ne tue pas ni les égyptiens, ni leurs enfants innocents. Pas même un seul. » Est-ce que vous voulez dire que d’un point de vue historique réel, les Egyptiens ne sont effectivement pas décédés ? Ou bien voulez-vous dire que Dieu n’est pas responsable de la mort des Egyptiens, adultes et enfants innocents ? Faut-il aussi comprendre que les 10 plaies ne se sont pas réalisées véritablement ?

    1. Marc Pernot dit :

      Bonjour, oui, c’est bien cela que je veux dire, Dieu n’a pas voulu la mort des Egyptiens au sens historique, Dieu n’assassine personne. Car il est la source de la vie.
      Ensuite, c’est vrai que c’est au sens spirituel, non au sens matériel, que cette histoire est passionnante pour nous, et qu’elle est une bonne nouvelle, l’évangile : Dieu nous libère de ce qui nous oppresse, de ce qui nous transforme en esclave, de ce qui nous retient d’avancer. C’est en ce sens que cette histoire de phraraon, d’égyptiens noyés et de plaies d’Egypte sont historiquement vraies : dans notre propre vie, par l’aide de Dieu.
      Ce n’est pas seulement moi qui ai cette lecture, mais c’est ce que dit Paul en 1 Corinthiens 10, par exemple, disant que cette histoire est « un type » à vivre dans notre propre existence, ainsi que la marche dans le désert, accompagné du rocher qui avance à nos côtés, et qui est le Christ.
      Cette façon de nous exprimer sous forme de récit surréaliste ne nous est plus si habituelle.
      Bonne lecture de la Bible
      Dieu vous bénit et vous accompagne

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