20 décembre 2019

une personne marche seule en montagne sur une crête - Image par rottonara de Pixabay
Ethique

La pression sociale nous dit d’être en couple avec des enfants. Je me sens triste et seule, ça me pèse.

Par : pasteur Marc Pernot

une personne marche seule en montagne sur une crête - Image par rottonara de Pixabay

Question posée :

Bonjour Pasteur,
Avant toute chose, je voulais vous remercier pour l’aide que vous apporter aux autres, y compris via Internet.
Ma question est la suivante : depuis quelques mois, je me sens triste et seule. Je me pose beaucoup de questions sur ma vie futur ( pas de compagnon, pas d’enfants….).
À plus de trente ans je ne sais pas si c’est la raison de ma « déprime » . Je ne suis même pas sûre de vouloir un mari ou des enfants… Peut-être est-ce dû à la pression sociale qui voudrais que l’on soit tous dans une norme, sinon on est considéré comme anormal. Avec les questions que les autres posent invariablement : pourquoi pas de mari, pourquoi pas d’enfants, elle est peut-être homosexuelle, elle est forcément malheureuse… C’est plus que pénible.
Je ne leur demande pourtant pas si eux-mêmes sont heureux dans leur vie bien cachés derrière la norme.
Protestante depuis toujours, je prie Dieu pour lui demander sa paix, sa joie, son amour et sa tendresse. Ça m’aide mais pense à mettre des mots sur mon état mais, je suis d’autant plus triste et me sens encore plus seule.
Comment dois-je faire pour être en paix avec moi même et les autres avec l’aide de Dieu
Bien à vous.

Réponse d’un pasteur :

Bonjour

A mon avis, vous voyez vraiment les choses de la bonne façon, avec lucidité, intelligence, et sensibilité à l’essentiel.

On s’en fiche de la norme. On est pas une norme, on est nous. C’est notre héritage, notre lot. Et franchement, à y regarder, on n’est pas si mal que ça. Certes, on croit toujours que l’herbe est plus verte dans le pré du voisin. Même les top modèles se trouvent moches par rapport à d’autres.

La question est d’arriver tranquillement à commencer à faire quelque chose de ce que nous sommes, de ce que nous avons reçu. Et pour cela, cela commence par se connaître un petit peu et commencer à trouver cela pas si mal. Et commencer à trouver du bonheur et du sens à ce que nous sommes et ce que nous pouvons vivre maintenant de beau et de bon. La réflexion et la prière aident bien pour cela. Car en présentant ce que nous sommes à Dieu, son amour nous aide à mettre sur le dessus, mettre en lumière que nous sommes aimable, et sa bénédiction nous aide à établir avec lui notre vocation.

Tout ne dépend pas de nous, ce n’est pas forcément de notre faute si nous ne rencontrons pas « l’âme sœur ». Je ne pense vraiment pas qu’il faille se focaliser là dessus. Le garder comme une possibilité qui pourrait nous arriver. Ou non. Et ne pas attendre cela pour commencer à vivre, à être heureux, à faire un petit peu de bien. Il y a mille façons de faire quelque chose de sa vie. Je reconnais qu’élever un enfant est un projet magnifique mais ce n’est pas le seul projet magnifique, et le monde ne manque pas d’humains sur terre, ce n’est donc peut-être pas tout à fait la priorité incontournable, ni pour l’humanité, ni pour toute personne, ni pour tout couple.

En plus, je ne suis pas certain que la norme soit d’être en famille « un papa, une maman, un garçon et une fille avec une jupe plissée ». Plus de la moitié des gens que je connais ne sont pas dans cette configuration. C’est la « norme » seulement dans la finale des comptes de fée, du genre « ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants » sauf que dans le conte, il s’agit d’un prince charmant ou d’une princesse aux petits pois qui ont les moyens de vivre dans un château avec plein d’argent et du personnel pour s’occuper de leur innombrable descendance. Vous avez vu un prince charmant faire la vaisselle ? Avoir la grippe et aller travailler quand même ? Dans la réalité, les gens ne sont pas plus dans la norme qu’une femme ressemble à la poupée Barbie et un garçon à Ken. La richesse de l’humanité n’existerait pas sans sa diversité, de personnes, de parcours, de sensibilité, de vocation. Il y a des plus grands, des plus petits, des plus ou moins foncés avec les yeux comme ceci ou comme cela, des hétérosexuels, des homosexuels, des personnes qui n’ont pas envie de relations sexuelles, des personnes en couple, d’autres qui sont célibataire, avec ou sans enfants. Et tout cela est dans la norme, qui est celle de la beauté de la diversité humaine.

Ce qui n’est pas dans la norme, ou ne devrait pas l’être, c’est le comportement de ces personnes qui vous jugerait négativement, et pire : qui dirait du mal de vous parce que vous êtes célibataire et sans enfant. Ce sont eux qui ont un problème, pas vous. Ce sont eux qui sont un problème, déchirant le corps du Christ avec le poison de leurs préjugés (ou de leur frustration), et blessant les autres. Car oui, cela blesse, même si l’on sait qu’ils ont tort. Ce n’est pas facile de prendre le dessus. Donc bravo de prier ainsi, demandant à Dieu sa paix, sa joie, son amour et sa tendresse. Cela aide à digérer le venin.

C’est vrai que la solitude peut peser. Nous avons besoin de tendresse. Elle est trop rare dans les couples, vous avez raison, et ceux qui en reçoivent et peuvent en donner ont de la chance. Les vrais amis avec qui nous pouvons nous sentir aimé et respecté inconditionnellement pour ce que nous sommes sont rares, eux aussi. Très rares même (et peut-être surtout) pour ceux qui ont des milliers de contacts par les réseaux sociaux. Et ceux qui ont un ou deux vrais amis ont une grande chance. Il y a quand même quelques occasions, parfois, d’avoir un contact souriant et humain avec quelques personnes, ne serait-ce qu’avec un sans domicile dans la rue, et que ce contact nous rattache chacun au corps du Christ, en vérité.

Vous savez, même en couple aimant, même avec des amis, des collègues, une famille… à dire vrai, on est seul dans sa peau. Cela fait une différence avec la personne toute seule, mais pas une différence radicale. Et l’étourdissement, la distraction, la foule empêche parfois de se connaître soi, en vérité. Ce n’est pas votre cas, vous vous connaissez, vous êtes sensible et vraie, c’est le moteur pour être et vivre d’une belle façon. Qu’un jour vous soyez en couple, ou non.

C’est pourquoi, je pense, il est bon d’expérimenter le fait que la solitude choisie peut-être une grâce… si elle est en quantité raisonnable et en équilibre avec des activités avec d’autres et pour d’autres.

Très concrètement, en forme comme vous l’êtes, quelles activités pourriez-vous faire qui soient de l’ordre de l’utile pour certaines activités, et de l’agréable pour d’autres ?

S’il est beau de donner la vie, si c’est effectivement une grâce et une bénédiction, la fécondité biologique est seulement une des fécondités humaines. L’humain n’est pas seulement un corps, nous sommes aussi une personne, pensante, spirituelle et sociale avec mille richesses, profondeurs, joies et cheminements, constructions… Et tous ces domaines sont de beaux lieux de fécondité possible. Selon la vocation de chacune et chacun, à tel moment de sa vie.

Dieu vous bénit et vous accompagne.

pasteur Marc Pernot

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2 Commentaires

  1. Cabane François dit :

    Merci, Marc, pour ce très judicieux commentaire. Et après tout, la Bible nous dit elle quelle fut la descendance – biologique – du Christ ? Et des Apôtres ? Non, pas un mot. Alors dans ces conditions, profitons de cette liberté qui nous est ainsi offerte !

    1. Marc Pernot dit :

      Grand merci François !!!
      Je penses aussi à l’extraordinaire Soeur Emmanuelle : quelle fécondité !

      Soeur Emmanuelle - photo wikicommons - Gauthier Fabri - Nuptial Pictures

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