fillette dans une ville dévastée par une catastrophe ou par la guerre - Image parFree-Photos de Pixabay
Question

À ce que l’on m’a dit, chez les chrétiens, le mal serait soit une absence de Dieu, soit le libre arbitre ?

Par : pasteur Marc Pernot

fillette dans une ville dévastée par une catastrophe ou par la guerre - Image par Free-Photos de Pixabay

Question posée :

Bonjour,
Je crois en Dieu et connais le sens de ma vie.
J’ai ma propre religion, et cherche des gens avec qui parler de spiritualité. En ce qui concerne le christianisme, j’essaie de suivre la source Q.
J’ai une première question, puisqu’il s’agit de poser des questions.
Chaque religion a sa propre façon d’expliquer le mal. À ce que l’on m’a dit, chez les chrétiens, ce serait soit une absence de Dieu, soit le libre arbitre.
Ces deux réponses posent des problèmes, en admettant que Dieu n’est que bon.
La première, le problème que Dieu ne serait pas partout.
La deuxième, c’est un peu la même chose, et il faut croire au libre arbitre. Les neurologues disent que celui-ci n’existe pas beaucoup, la plupart des décisions venant de l’inconscient.
J’ai d’autres questions, mais je commence par celle ci, y pensant ces temps ci.
Merci beaucoup d’avance,
Meilleures salutations,

Réponse d’un pasteur :

Bonjour Monsieur

Bravo, vous m’avez l’air de bien avancer dans vos recherches et dans votre questionnement.
La question de l’existence du mal est effectivement une question essentielle en théologie comme en philosophie, d’ailleurs. Dans le christianisme il n’y a une quantité de réponses différentes apportées, il est aussi possible de les combiner, de les nuancer. Comment évaluer une solution possible ? Il y a :
  • l’adéquation de la solution à l’observation :
  • ce que la solution induit : est-ce que cela nous semble bien ? par exemple de légitimer en parie le mal, ou de mobiliser pour le combattre ?
Notre lecture et interprétation de la Bible et notre expérience de prière alimentent notre réflexion.
Je serais assez proche de ce que vous avez actuellement comme explication à l’existence du mal : « soit une absence de Dieu, soit le libre arbitre ». Cela combine effectivement deux raisons à cette existence. Et vous poser comme préalable que Dieu est bon, cela me semble essentiel dans la foi chrétienne, la base de la base (comme le dit Jean dans l’introduction à sa première lettre « La nouvelle que nous avons apprise de Jésus-Christ, et que nous vous annonçons, c’est que Dieu est lumière, et qu’il n’y a point en lui de ténèbres. » (1 Jean 1:5).
Seulement, je ne dirais pas que « Dieu ne serait pas partout ». Il y a une autre possibilité : Dieu est partout et son œuvre de création est en cours continûment. Il resterait donc du chaos, du désordre source de souffrance, pas encore harmonisé par Dieu. Mais sans que ce soit la volonté de Dieu, ni un manque de bonté de sa part. Il y travaille. La création se ferait dans le temps, comme une évolution. Dieu ne pourrait pas aller plus vite.
  • Cela explique à mon avis très bien une partie du mal qui nous fait souffrir, en particulier les catastrophes naturelles et les handicaps ou maladies qui frappent un enfant sans qu’il y ait une cause humaine, ou la disparition des dinosaures, par exemple… Cela correspond bien à ce que nous révèle l’observation du monde par la science.
  • Cela innocente complètement Dieu qui n’est source que de bien, qui n’est pas source de ces gâchis et souffrances horribles. Et cela nous mobilise pour agir avec Dieu afin de lutter ardemment conter ces catastrophes, avec Dieu, en équipe avec lui. Et cela me semble bon, et correspondre à ce que la Bible et le meilleur de nous-même nous appellent à faire.
Cet élément d’explication remet en cause la « toute puissance » de Dieu dans l’instant. Cela va à l’encontre du catéchisme transmis par certaines églises, mais cette notion de « toute puissance » dans l’instant n’est pas tellement biblique si l’on regarde bien. Les seules fois où la Bible parle effectivement de « toute puissance » de Dieu c’est dans un passage évoquant la fin des temps, ce qui suppose une réalisation seulement partielle dans le présent. Ce qui est le cas. Dieu est puissant et actif mais comme source d’évolution progressive. Cette idée de « création continue » se trouve dans la théologie chrétienne depuis l’antiquité, en particulier chez Saint Augustin qui parle du mal comme « manque de bien ».
Je suis bien d’accord avec votre seconde piste : l’humain est une source de mal, il est aussi une source de bien. C’est du au fait que l’humain est créateur. Dieu a choisi de créer un partenaire créateur. Et, comme vous le dites, le libre arbitre permet de mettre ce pouvoir de création au service du bien comme au service du mal.
Votre réserve sur le degré de liberté réelle que nous avons (ou non) est intéressant. La question du libre arbitre est un grand débat aussi, et la science a des observations aussi à faire dans ce domaine. A mon avis, là encore, il faut de la nuance. Nous avons une liberté relative mais réelle. A mon avis, cette liberté est en grande partie en amont de nos actes, dans la façon que nous avons, ou non, de travailler sur ce que nous serons demain. Par exemple en vous posant des questions, en réfléchissant et en ayant un avis sur le sens et l’origine du mal cela influe sur vos réactions face à une situation concrète dans l’avenir. Celui qui prie travaille personnellement et favorise une évolution venant de Dieu afin de mettre un petit peu plus en cohérence que ce que nous pensons être bon et ce que nous faisons.
Reste que nous avons une créativité bien réelle. Quand Jean-Sébastien Bach écrit une sonate, elle n’était pas programmée dans ses gènes à la naissance. Il avait des dons, une prédisposition, une éducation, un milieu culturel. Mais ensuite, il y avait ses choix de vie, son travail, ses rencontres et sa créativité personnelle. Nous avons la nôtre, souvent moins spectaculaire, mais bien réelle, combinant l’inconscient, le conscient, et ce que nous sommes au moment de la décision. Tout cela est aussi s’élabore au jours le jours.
Avec la bénédiction de Dieu
Marc
PS. dans mon petit dictionnaire de théologie, j’ai mis un petit article sur la question du mal.

par : Marc Pernot, pasteur à Genève

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