Fr. Michel Fontaine, OP Prieur du couvent des dominicains, curé de la Paroisse catholique romaine Saint-Paul (Cologny) - lors du culte au temple le 16.1.2022
Prédication

Les noces de Cana (Jean 2:1-12) par le Père Michel Fontaine

Vidéo :

Enregistrement audio de la prédication / Enregistrement du culte

(Voir le texte biblique ci-dessous)

prédication (message biblique donné au cours du culte)
à Genève le dimanche 16 janvier 2022,
par le Fr. Michel Fontaine

Fr. Michel Fontaine, OP Prieur du couvent des dominicains, curé de la Paroisse catholique romaine Saint-Paul (Cologny) - lors du culte au temple le 16.1.2022 Deux prédication pour ce jour d’unité des chrétiens :

  1. par le Fr. Michel Fontaine, OP Prieur du couvent des dominicains, curé de la Paroisse catholique romaine Saint-Paul (Cologny)
    ci-dessous
  2. par le pasteur Marc Pernot, donnée au cours de la messe du dimanche soir à l’église catholique romaine Saint Paul, à Cologny
    dans l’article suivant

Voir le très fraternel écho de cet échange de chaire sur le site des Dominicains

Prédication par le Père Michel Fontaine

Cana, une petite ville comme une autre, à environ 15 km de Jérusalem où l’on célèbre une noce. A l’époque mais encore dans certaines de nos cultures, les noces durent plusieurs jours pour permettre aux nombreux invités d’y participer selon leur disponibilité…rien que de très normal. Alors de cette normalité, l’évangéliste Jean va en faire la matrice de l’accomplissement de la Bonne Nouvelle…Faisons un pas avec lui pour en découvrir les contours. Tout d’abord, n’oublions jamais que la noce est le lieu de la joie, de l’amour, du triomphe de la vie. Nous y percevons déjà les traces de l’Ancien Testament qui s’y référait également pour évoquer l’horizon de la fin des Temps, celui des noces de l’Agneau (Ap 19, 7-10). De nombreux invités disions-nous, eh bien, parmi eux, la mère de Jésus, et lui-même l’y rejoint ainsi que ses disciples. Mais l’évangéliste précise, c’était le troisième jour, alors l’ancrage s’annonce et devient signifiant : il nous renvoie aux origines, au don de l’Alliance faite à Moïse, évoqué dans l’Exode (Ex 19, 10 et 16) : Dieu dit à Moïse en parlant du peuple : « Qu’ils soient prêts pour le troisième jour…car le Seigneur descendra sur le mont Sinaï ». L’Histoire de notre humanité prend conscience de ses racines…Et puis, bien sûr, c’est le rappel de la résurrection de Jésus. Nous réalisons alors que cette parole de Jean est programmatique. Elle nous déplace complètement pour nous faire entrer dans l’annonce du Don de Dieu, de son projet : nous donner sa vie et sa vie en abondance. Le chemin de notre foi se précise… C’est dans cette double réalité que l’évangéliste Jean vient nous rejoindre aujourd’hui ; celle d’une noce pleine d’humanité sous toutes ses formes, mais aussi celle d’un récit qui, de fait, devient signe de l’accomplissement de la Promesse.

Il nous rend compte d’un événement appelé le miracle de Cana mais qui est infiniment plus. Il est le premier signe <totalisant> de Jésus parmi nous. Pourquoi totalisant, parce qu’il nous engage à être acteur avec

Jésus dans ce premier signe efficace du salut. Là est l’irruption de notre libération, de notre rédemption au cœur de notre existence humaine.

Je vous invite à entrer plus en profondeur dans cette Parole qui n’en finit pas de se dérouler devant nous. Tout d’abord, pour bien comprendre ce que nous sommes en train de vivre, il nous faut réécouter le court dialogue qui précède le récit que nous venons d’entendre. Cela se passe entre Jésus et Nathanaël, un juif originaire de Cana, connaissant bien l’Ecriture, très sceptique à l’égard de la personne de Jésus : S’adressant à Philippe, son ami, Nathanaël lui dit : « De Nazareth, peut-il sortir quelque chose de bon ? Philippe lui dit : < viens et vois >. Jésus alors regarde Nathanaël qui venait à lui et lui dit : < parce que je t’ai dit que je t’avais vu sous le figuier, tu crois. Tu verras des choses bien plus grandes, le ciel ouvert et les anges de Dieu monter et descendre au dessus du Fils de l’Homme » (Jn 1, 50). Cette annonce de Jésus faite à Nathanaël : « Tu verras des choses bien plus grandes, le ciel ouvert… », renvoie au v.11 de ce que nous avons lu : « …tel fut le commencement des signes de Jésus. Il manifesta sa gloire… ». Cela nous met dans la perspective d’être bien au-delà de la matérialité d’une noce : Cela veut nous dire « Je suis là avec vous dans votre humanité et je vais lui rendre sa dignité ». La dignité de notre humanité est le sens de la manifestation de la gloire de Dieu. Cette Parole résonne aujourd’hui dans notre propre réalité sociétale. Comment vivons-nous cette dignité au quotidien ? La Parole de Dieu est comme un puzzle qui construit notre vie au rythme de notre relation avec elle… c’est là que progressivement le signe de Cana s’ouvre à nous comme une fleur à la rosée et que son caractère totalisant se dévoile à nous ! Et ce puzzle n’a pas fini de nous construire… Arrêtons-nous sur quelques séquences essentielles de cette Parole. Qu’en est-il de la mère de Jésus qui n’apparaît chez Jean, d’ailleurs que dans ce récit mais aussi au pied de la croix (Jn, 25, 27). En fait, sa présence nous révèle un indice, comme une clé d’interprétation, pour comprendre que ce premier signe de Cana est posé par Jésus déjà dans la perspective d’un chemin qui nous conduira de la passion à la résurrection.

Et puis, ce dialogue court, incisif mais d’une densité extrême entre la mère et son fils qui marque trois repères :

Celui du manque et de la confiance : « Ils n’ont pas de vin ». Le constat d’un manque, d’une détresse peut-être mais en même temps la foi de cette mère qui « croit » avant le signe. Quelle figure pour notre propre vie spirituelle ! Nous qui cherchons toujours d’abord des signes pour croire !

Mais aussi celui de la distance christologique « Que me veux-tu, femme ? Mon heure n’est pas encore venue», que l’on traduit aussi par « qu’y-a-t-il entre toi et moi ? » expression que l’on retrouvera dans 1 R 17,18 entre Elie et la veuve de Sarepta, « qu’y –a-t-il entre toi et moi, Homme de Dieu ? lui disait-elle ». En ce qui concerne Jésus, il n’y a bien sûr aucun « madchisme » déplacé et méprisant à l’égard de sa mère, mais le rappel qu’il est le révélateur du Père qui donne la Vie. Telle était déjà sa réponse en Lc 2,49 « Pourquoi me cherchiez-vous ne saviez-vous pas qu’il me faut être chez mon Père ? ». Et nous, quelle(s) représentation(s) de Dieu guide(nt) nos actions ?

Et enfin, cette intervention concise de sa mère « Quoiqu’il vous dise, faites-le » qui résonne étonnement avec une autre Parole : « Celui-ci est mon fils bien-aimé, écoutez-le » (Mt 17,5), celle de Dieu qui parle comme une mère…C’est le chemin de la reconnaissance de la précédence de Dieu dans nos vies qui nous ouvre à l’humilité et la tendresse.

Alors, il nous faut presque nous arrêter maintenant pour mesurer la portée et la puissance de cette Parole… Ce passage de l’Evangile appelé « les noces de Cana » doit nous aider à faire émerger ce que j’appelle la cohérence générale de la Bonne nouvelle, celle du projet de Dieu, autrement dit découvrir le vrai sens du Salut : promouvoir la dynamique de la Promesse, de l’Alliance, du Pardon, de la Joie et des Béatitudes. Le signe de Cana qui nous est proposé aujourd’hui, peut être le lieu de cette cohérence de la Bonne nouvelle. Le signe est christologique et par ce fait il est le lieu essentiel d’une rencontre entre Lui et nous qui ne cesse de nous transformer.

N’est-ce pas, dit d’une manière scripturaire, pour reprendre le thème de cette semaine de l’Unité, le sens de ce rappel : « L’amour de Dieu bannit la crainte » (1Jn 4, 18). Nous avons là concentrées toutes les représentations déviantes et mortifères de la Bonne Nouvelle…

Par notre baptême nous sommes ouverts à cette rencontre privilégiée. Que nous puissions, chacune et chacun dans les méandres de nos récits de vie, découvrir le signe de Cana. Alors nous pourrons répondre à cette Parole dans le secret de notre cœur, rappelée par Jean dans l’apocalypse: « Voici, je me tiens à la porte et je frappe, si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui et je prendrai la cène avec lui et lui avec moi » (Ap 3, 20). Là, sont les prémices de la noce éternelle…

Amen

Fr. Michel Fontaine

Textes de la Bible

Évangile selon Jean 2:1-12

Or, le troisième jour, il y eut une noce à Cana de Galilée et la mère de Jésus était là. 2Jésus lui aussi fut invité à la noce ainsi que ses disciples.

3Comme le vin manquait, la mère de Jésus lui dit : « Ils n’ont pas de vin. » 4Mais Jésus lui répondit : « Que me veux-tu, femme ? Mon heure n’est pas encore venue. »

5Sa mère dit aux serviteurs : « Quoi qu’il vous dise, faites-le. »

6Il y avait là six jarres de pierre destinées aux rites juifs de purification ; elles contenaient chacune de deux à trois mesures.

7Jésus dit aux serviteurs : « Remplissez d’eau ces jarres » ; et ils les emplirent jusqu’au bord.

8Jésus leur dit : « Maintenant puisez et portez-en au maître du repas. » Ils lui en portèrent, 9et il goûta l’eau devenue vin – il ne savait pas d’où il venait, à la différence des serviteurs qui avaient puisé l’eau –, aussi il s’adresse au marié 10et lui dit : « Tout le monde offre d’abord le bon vin et, lorsque les convives sont gris, le moins bon ; mais toi, tu as gardé le bon vin jusqu’à maintenant ! »

11Tel fut, à Cana de Galilée, le commencement des signes de Jésus. Il manifesta sa gloire, et ses disciples crurent en lui. 12Après quoi, il descendit à Capharnaüm avec sa mère, ses frères et ses disciples.

(Traduction Œcuménique de la Bible)

Partagez cet article sur :
  • Icone de facebook
  • Icone de twitter
  • Icone d'email

Articles récents de la même catégorie

Articles récents avec des étiquettes similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *