01 septembre 2019

bas relief sur une église à Paris représentant une lapidation - Image par Albert Dezetter de Pixabay
Bible

Je lis le Deutéronome : Dieu commande de tuer celui qui s’oppose à la foi ?

Question posée :

Bonjour

Je suis actuellement entrain de lire deutéronome 13 :9, Est ce bien Moise qui, de la part de Dieu, commande à son peuple de tuer celui qui n’est pas chrétien ?

Merci pour votre aide.

Réponse d’un pasteur :

Bonsoir

onjour Monsieur

Bravo de lire la Bible. C’est très enrichissant.

Si vous avez commencé par la première page, vous avez déjà bien avancé. Il est possible que vous arriviez dans certains livres qui sont d’un intérêt qui est moins net. N’hésitez alors pas de mettre en attente la suite, pour lire un certain temps des livres plus nourrissants.
Il y a en particulier plein de passages où il est question de massacrer, sur ordre de Dieu, ce qui est étranger à la vraie foi.
Effectivement, le passage que vous citez est particulièrement épouvantable :

« Si ton frère, fils de ta mère, ou ton fils, ou ta fille, ou la femme qui repose sur ton sein, ou ton prochain que tu aimes comme toi-même, t’incite secrètement en disant: Allons, et servons d’autres dieux ! Des dieux que ni toi ni tes pères n’avez connus, d’entre les dieux des peuples qui vous entourent, près de toi ou loin de toi, d’une extrémité de la terre à l’autre tu n’y consentiras pas, et tu ne l’écouteras pas; tu ne jetteras pas sur lui un regard de pitié, tu ne l’épargneras pas, et tu ne le couvriras pas. Mais tu le feras mourir; ta main se lèvera la première sur lui pour le mettre à mort, et la main de tout le peuple ensuite; tu le lapideras, et il mourra, parce qu’il a cherché à te détourner de l’Eternel, ton Dieu, qui t’a fait sortir du pays d’Egypte, de la maison de servitude. »
(Deutéronome 13:6-10).

Ailleurs il est dit aussi de faire lapider son fils indocile et rebelle (Deutéronome 21:17-21)

Premièrement : la Bible est un réservoir de question, d’excellentes questions à se poser. Il n’est pas possible, et c’est même dangereux, de prendre la Bible comme une somme de réponses. Nous le voyons bien avec ces passages.

Deuxièmement, la Bible est un livre pluraliste, avec de multiples pistes explorées, multiples voix et sensibilités qui s’expriment. Ces passages sont d’une dureté absolue, d’autres annoncent un pardon infini de Dieu, sur « des milliers de générations » même dans l’Ancien Testament, et encore plus dans les évangiles du Christ. Quand un passage ne vous semble pas cohérent avec le Dieu d’amour que révèle Jésus-Christ, un Dieu qui va jusqu’à aimer ses ennemis et bénir ceux qui le persécutent, on a le droit (bien entendu) de privilégier notre foi en ce Dieu d’amour. Plus précisément, le Deutéronome est un livre qui propose une alliance assez binaire et conditionnelle entre Dieu et l’humain, du type : je mets devant toi le choix entre le bien et le mal, si tu choisis la voie du bien tu seras béni, si tu choisis la voie du mal tu seras maudit. L’alliance que Dieu donne en Abraham est radicalement différente : Dieu dit à Abraham : je te bénis et tu seras une bénédiction pour une multitude de personnes et de peuples, et ta vie sera extrêmement féconde. Cette bénédiction est donnée sans condition, comme une promesse, comme un futur certain. Comment comprendre alors ces deux façons de voir si diamétralement opposées entre l’alliance en Abraham et l’alliance du Deutéronome ? Chacun peut se faire son propre choix ou sa propre synthèse. Personnellement, je dirais que Dieu est vraiment comme la première alliance en Abraham, seulement la vie est souvent comme la seconde : quand on fait le mal cela engendre de la souffrance et du chaos dans le monde autour de nous, alors que quand on fait le bien, cela construit un monde meilleur, un peu plus beau, plus juste, plus vivant : cela engendre de la bénédiction.

Troisièmement, les mots de la Bible ne sont pas « la Parole de Dieu« , ces mots de la Bible peuvent devenir des sources de mort et de haine, alors même qu’ils sont faits pour nous ouvrir à cette source transcendante de vie qu’est Dieu. C’est toute la question de l’interprétation de ces textes. C’est le cas de toute chose puissante : elle peut servir d’arme ou d’outil pour faire vivre (par exemple le scalpel d’un chirurgien). Des textes comme celui que vous citez, s’ils sont utilisés contre une personne peuvent être source de mort. C’est souvent le cas quand on applique des textes de jugement en identifiant telle ou telle personne ou catégorie de personnes au lieu de l’appliquer à soi-même afin de soi-même se mettre sur le chemin de devenir meilleur, avec l’aide de Dieu. C’est ainsi, parce qu’ils vont interpréter ces passages horribles que les rabbins disent que ces versets n’ont jamais été appliqués à la lettre depuis que Moïse les a écrits.

Comment alors interpréter dans le sens de la vie et non de la mort un passage Biblique ? En se plaçant devant le Dieu de la bénédiction, le Dieu d’amour ultime que révèle Jésus-Christ, en lisant ces textes dans un esprit de prière : donnant ainsi une chance à ce que l’Esprit, Dieu lui-même en nous, souffle l’interprétation juste à ce moment là, ces circonstances précises, pour nous qui lisons ce texte à cet instant.

Dans ces textes où Dieu massacre ou ordonne de massacrer un philistin ou un pécheur, par exemple, cela ne peut pas être compris comme si Dieu voulait la mort d’une personne individuelle (même si elle était son pire ennemi), mais je dirais que ce texte dit que Dieu veut tuer la méchanceté en chacun de nous, qu’il veut tuer la personne étrangère à l’amour, la personne méchante qui est dans toute personne, même la meilleure. Cet acte ou ce jugement est alors bien de l’amour, gardant le meilleur de chacun et effaçant le reste.

Dans le cas précis du texte que vous citez, où il est question d’éliminer celui qui nous invite à nous écarter de l’Eternel notre Dieu ? Je pense que c’est intéressant. Si nous sentons que nous régressons dans notre qualité d’être, que faire ? Il est bon de chercher à discerner s’il n’y a pas quelque chose qui nous fait régresser. Et chercher à éliminer cette source qui, en nous, est source du mal. Dieu nous y aide (voir la prière de Jésus qui se termine par « délivre-nous du Mal », « le Mal », c’est alors la source du problème et non seulement le problème en lui-même. Ce texte du Deutéronome nous suggère que parfois nous pouvons chercher l’aide de proches de confiance.

C’est vrai que cela peut conduire à s’écarter de certaines fréquentations qui auraient une mauvaise influence sur nous, Mais bien entendu, personne, pas une personne au monde, je pense, n’est à 100% une personne mauvaise. Si on la lapidait, on tuerait aussi un petit bon côté qu’elle peut avoir, on tuerait la bonne personne qu’elle pourrait peut-être devenir, en tout cas selon l’espérance de Dieu. C’est pourquoi, la « Parole de Dieu » n’est pas dans la lettre de ce texte, mais la Parole de Dieu, la Parole vivante, est à recevoir dans l’interprétation avec lui de ce texte, ou d’un autre qui nous sera bon.

Dieu vous bénit et vous accompagne

par : Marc Pernot, pasteur à Genève

Si vous voulez, vous pouvez voir aussi cet itinéraire biblique et ces quelques conseils pratiques.

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15 Commentaires

  1. David dit :

    Je recopie ce passage de Marc dans la page ci-dessus :

    « le Deutéronome est un livre qui propose une alliance assez binaire et conditionnelle entre Dieu et l’humain, du type : je mets devant toi le choix entre le bien et le mal, si tu choisis la voie du bien tu seras béni, si tu choisis la voie du mal tu seras maudit. L’alliance que Dieu donne en Abraham est radicalement différente : Dieu dit à Abraham : je te bénis et tu seras une bénédiction pour une multitude de personnes et de peuples, et ta vie sera extrêmement féconde. Cette bénédiction est donnée sans condition, comme une promesse, comme un futur certain. Comment comprendre alors ces deux façons de voir si diamétralement opposées entre l’alliance en Abraham et l’alliance du Deutéronome ? Chacun peut se faire son propre choix ou sa propre synthèse. Personnellement, je dirais que Dieu est vraiment comme la première alliance en Abraham, seulement la vie est souvent comme la seconde : quand on fait le mal cela engendre de la souffrance et du chaos dans le monde autour de nous, alors que quand on fait le bien, cela construit un monde meilleur, un peu plus beau, plus juste, plus vivant : cela engendre de la bénédiction. »

    Merci, je trouve cette interprétation et ce point de vue très profonds, et très inspirants !

  2. leveque.j dit :

    Question :
    Un protestant crois t il en DIEU ou a l’homme ? L’histoire nous enseigne que les laiques et « les protestant sont toujours a l’origine de problèmes ( Paris vaut bien une messe ) dans la societé simplement qu’il ‘l n’ont jamais été capable de prendre une décision ferme . Se laver les mains comme Ponce Pilate. c’est mon observation juste ou pas ? je ne le sais même pas.
    Je rejette totalement l’enseignement du Coran car a chaque verset il y a qu’il faut tuer les chrétiens, les juifs etc…et les mécréants. Mais je ne crois pas au pape mais pas du tout pour moi il ne represente rien.

  3. Minger dit :

    « Je suis actuellement en train de lire deutéronome 13 :9, Est-ce bien Moise qui, de la part de Dieu, commande à son peuple de tuer celui qui n’est pas chrétien ? »

    Réponse toute bête , comment aurait-il été possible de tuer des chrétiens , alors que Moïse avec ce précepte , était lui et cette prescription , à des siècles avant l’arrivée de Jésus sur Terre ?

    D’autre part , Jésus n’est absolument pas pour la peine de mort ! Jésus n’est absolument pas pour les lapidations , il a montré le chemin et la vérité , tout en ne voulant pas choquer les pieux juifs , il dit : ST Matthieu 5 /17 :
    « Ne croyez pas que je sois venu pour abolir la loi ou les prophètes; je suis venu non pour abolir, MAIS POUR ACCOMPLIR . 18Car, je vous le dis en vérité, tant que le ciel et la terre ne passeront point, il ne disparaîtra pas de la loi un seul iota ou un seul trait de lettre, jusqu’à ce que tout soit arrivé.… »
    Rappel : La Loi de l’Ancien Testament exigeait la peine de mort pour divers crimes : meurtre (Exode 21.12), enlèvement (Exode 21.16), zoophilie (Exode 22.19), adultère (Lévitique 20.10), homosexualité (Lévitique 20.13), fausse prophétie (Deutéronome 13.5), prostitution et viol (Deutéronome 22.4)

    C’est ce que le Coran a repris, et pour eux , Jésus n’est pas le Fils de Dieu , il n’est pas ressuscité , et le grand problème Mahomet passe avant Jésus , ils reconnaissent Jésus mais ne lisent pas les évangiles !

    1. Marc Pernot dit :

      Vous avez raison, il n’est certainement pas question de lire ce genre de versets comme un appel au massacre de quiconque ! ! !
      C’est un appel à arriver à éliminer en nous-même tout ce qui est souffrant, toute larme, peine, haine, orgueil, aveuglement, tout ce qui est donc étranger à Dieu, à la vie, au cheminement vrai, à l’amour et à la fidélité.
      C’est effectivement ce qu’a manifesté Jésus. Et il est pour nous la clef de lecture de la Bible, et de notre vie.
      Voir plus de conseils sur l’interprétation de ces textes ici : https://jecherchedieu.ch/reflechir-avec-la-bible/#introduction
      Et en rapport avec Dieu qui appelle au massacre, j’ai donné une petit conférence il y a une dizaine de jours : https://soundcloud.com/protestant-geneve/traversee-de-la-bible-par-la-face-nord-1-dieu-massacrerait-impossible
      Dieu vous bénit et vous accompagne

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