cercles de personnes en rond assises sur l
Pratiquer

Je vais au culte, on lit la Bible et partage la Cène, puis on se dit au revoir, ce n’est pas comme une famille ?

Par : pasteur Marc Pernot

cercles de personnes en rond assises sur l'herbe - Photo by Kylie Lugo on Unsplash

Question posée :

Bonjour
Il est vrai que je suis souvent mal à l’aise à l’issue des cultes des deux paroisses réformées que je côtoie depuis plusieurs années ( y compris par la paroisse où j’ai reçu le baptême à ma propre demande). Je vais culte, nous lisons la Bible,prenons la Cène et prions ensemble. Seulement à la fin tout le monde se dit » au revoir » comme on le ferait au facteur.Personne ne prend réellement le temps de s’intéresser à l’autre. Alors que nous venons d’écouter l’évangile. Parfois je me dis que les églises évangéliques sont quand même plus chaleureuses. J’en ai testé une récemment et cela ressemble beaucoup plus à une famille. Ce que je désapprouve par contre c’est leur refus de bénédiction pour les mariages gay. La paroisse que j’ai testé n’a pas dans l’ensemble un discours fondamentaliste mais y est tout de même opposée.

Réponse d’un pasteur :

Bonsoir

Cette question est très intéressante. Et assez profonde théologiquement. C’est pourquoi il y a une telle différence entre les églises.

Pour les protestants réformés, l’église est une sorte de salle de musculation pour la foi, la prière, la réflexion. La vraie vie est notre vie, avec nos familles, collègues, voisins et amis. On a bien entendu le droit (et heureusement que cela arrive) d’avoir des amis dans la paroisse, mais ce n’est pas d’abord le but. Si l’on passait tout son temps à l’église, si l’on avait tous nos amis dans l’église, elle ne serait plus un lieu de ressourcement pour nous, ce serait notre lieu de vie, rendant le monde comme secondaire pour nous. Or, l’église, et le culte en particulier ont pour but premier de nous réconcilier avec Dieu, de mieux recevoir de lui l’Esprit qui nous envoie dans le monde, avec des yeux ouverts, avec un cœur de chair pour aimer ce monde que Dieu aime (pas seulement le petit club de chrétiens), pour y discerner notre vocation d’aimer telles personnes en particulier dans ce monde, avec des personnes qui nous aident et des personnes que l’on aide, de nous y faire des amis chrétiens, athées, juifs ou musulmans, d’une autre église chrétienne, ou philosophes.

Derrière cela, il y a ainsi une certaine vision du corps du Christ. Jésus ne mettait pas de frontière, il célèbre à haute voix la « foi » d’un centurion romain qui pourtant rend un culte à l’empereur comme à un dieu. Il renvoie très souvent des personnes qu’il a rencontrées vers leurs familles et leurs amis au lieu de les appeler à rester près de lui dans ce qui serait une communauté de disciples. Il nous envoie aimer Dieu et aimer notre prochain comme le bon samaritain qui est en voyage à l’étranger et croise quelqu’un qui a besoin d’aide, tout à fait par hasard, en dehors de sa communauté. Le corps du Christ, ce n’est alors pas seulement le petit club de personnes qui sont dans la même sensibilité spirituelle, théologique, religieuse. Ce n’est pas seulement la paroisse comme un club, mais le corps du Christ est alors l’humanité entière puisque l’appel de Dieu, son amour, s’adresse à chaque personne individuelle sans aucune condition.

Effectivement, cela a des conséquences sur notre façon de vivre.

  • Toute personne de bonne volonté qui désire participer au cultes, activités, sacrements est bienvenue sans aucune condition de baptême, de croyances, de parcours de vie, d’orientation sexuelle. Que sa peau ait telle ou telle teinte, qu’elle soit cisgenre, transgenre, non binaire.
  • Nous accompagnons des couples constitués d’une personne chrétienne et d’une personne athée, ou d’une autre religion, ou d’une autre confession chrétienne, bien sûr. Nous accueillons des couples de personnes de même sexe, des couples qui n’ont pas de projet d’avoir d’enfant.
  • Nos services d’entraide, aumôneries des hôpitaux, prisons entourent toute personne qui le désire, pas seulement, les personnes de la paroisse.
  • Une personne peut appartenir à une paroisse protestante et en même temps à une paroisse d’une autre confession chrétienne, et puiser aussi à d’autres sources. Aller au culte à son rythme…

C’est vrai que c’est plus exigeant, dans un sens, car la paroisse n’est qu’une sorte de tremplin, sans prêt à penser (il faut penser par soi-même) ni prêt à vivre (il faut discerner par nous-même ce qui est juste), sans club d’amis offert sur un plateau (il nous faut aller dans le monde). La paroisse est là pour nous aider à nous former, nous aider à être adultes dans la foi et dans la vie, et donc faire que nous puissions nous passer de la paroisse. Bien entendu, c’est relatif, car on peut se former encore, affiner notre façon d’être. Mais c’est l’idée.

Si certaines personnes désirent être plus guidées et soutenues, entourées, c’st tout à fait leur droit, évidemment.

Et c’est vrai que nous pouvons être plus chaleureux, sans pour autant faire preuve d’emprise. Avant que de perfides virus ne nous en empêche, nous avions des « après cultes », apéritifs, grillades et repas… plutôt très sympathiques pour ceux qui le désirent. Et de vraies amitiés, voire des couples qui naissent dans la paroisse.

Donc, d’accord pour que nous progressions. On va s’y mettre tous.
Merci pour l’interpellation !!!

Dieu vous bénit et vous accompagne.

par : pasteur Marc Pernot

Partagez cet article sur :
  • Icone de facebook
  • Icone de twitter
  • Icone d'email

Articles récents de la même catégorie

Articles récents avec des étiquettes similaires

9 Commentaires

  1. Françoise Lanoy dit :

    Cher Marc,
    J’éprouve la même chose que la personne qui vous a contacté. S’il est vrai que nous nous reconnaissons comme frères et soeurs en Jésus-Christ, il serait naturel de nous manifester un minimum d’intérêt les uns pour les autres en paroisse et donc essayer de créer les conditions favorables à une véritable fraternité. Comme dit St Jean : « C’est à l’amour que vous aurez les uns pour les autres que l’on reconnaîtra que vous êtes mes disciples », ce qui suppose de se connaître.
    Personnellement, ce qui me donnerait envie de fréquenter régulièrement une paroisse, ce serait de partager des expériences de foi avec d’autres chercheurs de Dieu, par exemple à l’occasion de partages d’Evangile en petits groupes ou de débats sur des questions de société en rapport avec la foi. Nous apprendrions ainsi à nous connaître, ce qui favoriserait les témoignages de sympathie à l’issue du culte. Cela permettrait donc aux nouveaux de s’intégrer plus facilement.
    Il y a beaucoup d’offres de spiritualité sur internet pour nourrir sa foi – et à cette occasion je vous remercie pour toutes les ressources que vous mettez à notre disposition et vos conseils à tous dans un grand esprit d’ouverture – sans compter tous les livres à méditer. Et la prière personnelle permet de se relier au divin sans médiation. Alors, sans le plaisir de nouvelles rencontres, se déplacer au culte ou à la messe peut effectivement déboucher sur un sentiment de frustration que ne sauraient combler une prédication stimulante pour l’intelligence et la foi ou le talent de l’organiste.
    Bien à vous,
    Françoise

    1. Marc Pernot dit :

      Grand merci pour les encouragements.
      A mon avis, aller au culte (temple, église, synagogue…), peut / pourrait être sympathique, mais ce n’est pas l’intérêt principal de toute façon. Sortir de chez soi où l’on pratique en paix pour aller ailleurs, avec des personnes non choisies, pour entendre on ne sait quoi… est un exercice spirituel en lui-même. Nous nous décentrons, nous nous préparons à quelque chose d’extérieur, nous espérons quelque élévation, nous faisons corps avec d’autres humains, tels qu’ils sont. C’est de toute façon essentiel, immense, et pourtant évidemment décevant par rapport à l’attente immense. C’est normal, et bénéfique.
      Dieu vous bénit et vous accompagne

  2. Stephanie dit :

    Merci Françoise pour ce retour, je me sens moins seule.
    Effectivement,de nombreuses paroisses proposent leur culte en vidéos. J’étais contente de retrouver la communauté en présentiel mais en réalité cela ne change rien, ou presque.

  3. Olivier dit :

    Bonsoir Stéphanie et Françoise
    C’est vrai que dans certaines Églises protestantes historiques, je pense à l’Eglise Protestante unie à laquelle je fais partie souvent on a un sentiment de frustration car peu d’échange.
    Mais personnellement avec le temps il se crée des liens, des affinités entre paroissiens et surtout grâce aux diverses études sur la bible par exemple ou des cercles de réflexion théologique
    Ayant connu les églises évangéliques mon ressenti est que dans celles-ci j’avais l’impression d’être dans un club mais je ne veux froisser personne en disant cela.
    Pour ma part l’Eglise est avant tout une communauté qui rends un culte à Dieu le dimanche et qui peut proposer un panel d’approfondissement de la foi non négligeable.
    Je vous souhaite de trouver une communauté ou peut-être c’est vrai avec du temps hélas dans laquelle vous vous sentirez bien.
    Bien à vous

  4. Pascale dit :

    Peut-être aussi que, dans certains cas, cette recherche de chaleur dans la pratique en église est, hélas, le reflet du manque de chaleur ailleurs et qu’il y a là un appel à y travailler partout où nous sommes.

  5. David dit :

    Bonjour,

    il me semble qu’on peut très bien vivre sa foi sans communauté, ce n’est peut-être pas conforme au texte des Évangiles qui appelle à partager des repas ensemble au minimum, même si on peut se sentir libre y compris par rapport à ce point, mais c’est une situation qui peut découler assez naturellement de la sécularisation de la société ou encore plus simplement de son mode de vie ou de ses intérêts ou de son caractère. Et ça peut changer au cours du temps, on peut s’éloigner, revenir, librement… Et si on va juste une fois vraiment de temps en temps au culte, ça peut devenir difficile de connaître personnellement les dizaines de paroissiens venant régulièrement ou irrégulièrement. Nous avons tous des intérêts très très divers. En parallèle des groupes bibliques et autres formations ou réunions thématiques souvent proposées et qui sont le plus souvent très très bien, peut-être que des sortes de projets dans le cadre de la paroisse ou d’une communauté locale ou fédérale d’Églises permettraient de fédérer des petits groupes et d’œuvrer ensemble pour construire un petit édifice qui ait du sens pour la paroisse, pour l’Église, pour des « étudiants » (la Bible, je ne parle pas du statut étudiant), pour chercher ensemble de façon ouverte par rapport à des questions de Foi ou autres un peu difficiles, pour l’œcuménisme avec d’autres églises, avec des partisans de la philosophie, avec des partisans de la science, avec ceux qui ont aussi la Bible ou une partie comme tradition mais qui l’interprètent très différemment, ou encore en faveur de bénéficiaires sur le plan général de l’éducation ou du social, ou pour la rénovation du patrimoine matériel et la croissance du patrimoine immatériel de l’Église, pour l’annonce apostolique de l’Évangile… Dans une association par exemple, les associés bénévoles agissent pour une cause commune enthousiasmante…

    Le salut par la Foi seule (besoin de paroisse ?), mais l’intérêt pour ses co-paroissiens par les œuvres avec une pointe d’espérance et d’amour en perspective 😉 Je plaisante.

    Cordialement,

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *