Théodore de Bèze rend grâce à Dieu d
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L’hymne officiel de Genève, le « Cé qu’é lainô » célèbre la providence de Dieu : comment l’entendre quand on est athée ou quand on est croyant ?

Par : pasteur Marc Pernot

Théodore de Bèze rend grâce à Dieu d'avoir sauvé Genève, illustration de Félicien Philippe

Théodore de Bèze rend grâce à Dieu d’avoir sauvé Genève

L’hymne officiel de la République de Genève chante la providence de Dieu

Ce chant est fort sympathique, il rappelle un épisode historique, « l’Escalade » du 12 décembre 1602 ou Genève a été sauvée d’une tentative d’invasion par l’armée savoyarde, pourtant bien puissante mais qui n’a pu l’emporter face à la population. De cet épisode est né un chant de louange à Dieu qui est resté en patois savoyard, le « Cé qu’é lainô » et une joyeuse fête familiale autour du 12 décembre. Ce n’est qu’après ces festivités de « l’Escalade » que Noël commence à être préparé dans les têtes et les cœurs.

Ce chant est donc un chant le louange pour la providence de Dieu, en voici la traduction :

« Celui qui est en haut (« Cé qu’é lainô » en patois), le Maître des batailles,
Qui se moque et se rit des canailles…
Dedans sa main il tient la victoire,
A lui seul en demeure la gloire !
A tout jamais son Saint Nom soit béni ;
Amen, amen, ainsi soit-il ! « 

Chanter ce chant n’est pas sans poser des questions, pour l’incroyant, d’abord, mais aussi pour le croyant.

Pour l’incroyant car s’il ne croit pas en Dieu, comment chanter à plein poumon ce chant de louange, ce chant de confiance en Dieu ?

Le croyant aussi est souvent gêné, ou devrait l’être (à mon avis) de chanter ainsi la providence de Dieu, comme si Dieu faisait la pluie et le beau temps, comme s’il tenait en sa main la victoire sur TOUT ce qui nous fait souffrir et nous tue. Nous savons bien que cela ne marche pas comme ça. Nous observons que l’accident, la catastrophe ou la maladie frappent souvent aveuglément, sur des personnes qui ne sont pas plus mauvaises qu’une autre (fait remarquer Jésus, Luc 13:4), et qu’il existe de vraies canailles qui, hélas, l’emportent et envahissent, pillent, violent, tuent le pays voisin, le champ ou la maison de son prochain, l’héritage de ses frères…

Comment s’approprier ce chant de louange et de confiance en Dieu ?

Le lecteur de la Bible est habitué, depuis des milliers d’années, à ce principe d’interprétation : quand un passage n’est pas possible au sens premier, matériel, il convient de le lire au second degré, au sens spirituel. Par exemple quand il est écrit que « Jésus est la lumière du monde. » (Jean 9:5), il n’est manifestement pas un champ électromagnétique, cela n’a pas de sens au premier degré, matériellement, cela parle d’une réalité spirituelle,bien sûr.

Alors comment lire le « Cé qu’é lainô » ?

D’abord avec ces premiers mots « Celui qui est en haut » nous invite à porter notre regard sur ce qui est « en haut », ce qui est élevé et bon dans notre vie, dans notre monde, dans notre être et dans ceux que nous croisons. Porter notre regard sur ce qui est élevé et en faire un chant de louange, de gratitude, et pourquoi pas nous réjouir avec d’autres à célébrer ce qui a été relevé de bon ainsi. Ce regard vers le haut fait déjà des miracles dans notre vie :

  • A commencer par celui de relativiser bien des « canailles » qui nous rongeaient, qui nous attaquaient dans l’ombre, sournoisement, pendant que nous ne faisons pas attention. Bien des souffrances, des soucis, des malentendus, et des disputes ne tiennent vraiment pas à grand chose.
  • Le regard vers le haut change la perspective, et c’est valable pour l’incroyant et pour le croyant. Pour le croyant c’est porté par la foi, aidé par une force intérieure que Dieu met au fond de nous. C’est un point essentiel de la prière que d’avoir d’abord ce regard vers le haut, vers Dieu qui est par définition pour nous une figure de ce qui est bon et élevé. Puis de regarder dans la réalité présente et dans ce que nous avons vécu aujourd’hui en cherchant ce qui est élevé, bon, juste. Et de nous réjouir pour cela, d’en rendre grâce.

Ensuite, « Celui qui est en haut « Cé qu’é lainô »… dedans sa main il tient la victoire » ? Nous pouvons rechercher en nous, au dedans de nous-même, ce qui a pu nous rendre plus fort à un moment donné, ce qui a pu nous faire avancer, être un peu meilleur, ou nous relever après une rude bataille.

  • Pour bien des personnes de part le monde, dans toutes les cultures, la foi est effectivement une grande aide, une force pour avancer .
  • Mais pour l’incroyant (et pour le croyant aussi) il est utile de rechercher en nous ce qui a pu nous aider à remporter une petite ou une grande victoire : l’amour ou un geste de bienveillante, l’amitié d’un ami, sa maman, la philosophie, la musique, le service que je rend à d’autres, la nature… dans tous les cas, c’est un geste fort précieux de rechercher ce qui nous a aidé, et ensuite de se recentrer sur ces sources, de se donner des rendez-vous réguliers pour boire à ces sources. C’est ce que nous faisons par le culte, qu’il soit personnel dans le secret de sa chambre et aussi le culte avec quelques autres chercheurs de la source ultime qui est derrière toutes les sources ?
  • en tout cas, cela aussi fait des miracles dans notre vie, et nous prépare à des batailles que nous ne connaissons pas encore.

Avec joie de vivre cette fête de l’escalade à Genève ce week-end. De prendre des forces en mangeant la soupe de légumes traditionnelle, de briser joyeusement la marmite pleine de légumes en massepain, de chanter le Céqu’é lainô… en particulier au culte de dimanche prochain (10 décembre 2023 à 10h au temple de Vandœuvres, bienvenue aux athées, agnostiques, croyants de toute religion), où nous poursuivrons cette réflexion sur la providence de Dieu? Car oui, Dieu est d’un grand secours dans notre vie

Comme le dit l’apôtre Paul :

Romains 8

35Qui nous séparera de l’amour du Christ ? La détresse ou l’angoisse ou la persécution ou la faim ou le dénuement ou le péril ou les armes ? 36Ainsi qu’il est écrit : À cause de toi, on nous met à mort en permanence. On nous considère comme des moutons à l’abattoir. 37Mais dans toutes ces choses, nous sommes plus que vainqueurs par celui qui nous a aimés. 38Car je suis persuadé, en effet, que ni mort, ni vie, ni anges, ni les dominations, ni présent, ni avenir, ni puissances, 39ni hauteur, ni profondeur, ni aucune autre création ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu en Jésus-Christ, notre Seigneur.

 

Le Cé qu’é Lainô

En patois genevois de 1602

1. Cé qu’è lainô, le Maitre dé bataille,
Que se moqué et se ri dé canaille,
A bin fai vi, pè on desande nai,
Qu’il étivé patron dé Genevoi.

2. I son vegnu le doze de dessanbro,
Pè onna nai asse naire que d’ancro;
Y étivé l’an mil si san et dou,
Qu’i veniron parla ou pou troi tou.

4. Petis et grans, ossis an sevegnance:
Pè on matin d’onna bella demanze,
Et pè on zeur qu’y fassive bin frai,
Sans le bon Di, nos étivon to prai !

67. Pè sous anfan il a de la tandresse,
A bin volu se bouta à la brèche,
Et ranversa lous ennemi mordan
Que vegnivon fare lous arrogan. .

68. Dedian sa man il y tin la victoire,
A lui solet en démure la gloire.
A to zamai son Sain Non sai begni!
Amen, amen, ainsi, ainsi soit-y !

(les autres couplets racontent toute l’histoire, la plupart du temps, les seules strophes chantées sont les 1,2 et 68)

Traduction en français d’aujourd’hui

1. Celui qui est en haut, le Maître des batailles,
Qui se moque et se rit des canailles
A bien fait voir, par une nuit de samedi,
Qu’il était patron des Genevois.

2. Ils sont venus le douze de décembre,
Par une nuit aussi noire que d’encre ;
C’était l’an mil six cent et deux
Qu’ils vinrent parler un peu trop tôt.

4. Petits et grands, ayez en souvenance :
Par un matin d’un beau dimanche
Et par un jour où il faisait bien froid,
Sans le bon Dieu, nous étions tous pris !

67. Pour ses enfants il a de la tendresse,
A bien voulu se mettre à la brèche
Et renverser les ennemis mordants,
qui venaient faire les arrogants.

68. Dedans sa main il tient la victoire,
A lui seul en demeure la gloire !
A tout jamais son Saint Nom soit béni ;
Amen, amen, ainsi soit-il !

 

par : pasteur Marc Pernot

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2 Commentaires

  1. Nathalie dit :

    C’est une libre adaptation du Psaume 37

    1. Marc Pernot dit :

      Ou/et le Psaume 68 « Que Dieu se montre seulement… » ?

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