une jeune femme souriante dans un laboratoire de recherche - Photo by ThisisEngineering RAEng on Unsplash
Développement

J’ai un esprit très rationnel, scientifique. J’aimerais du plus profond de moi être chrétienne et croire.

Par : pasteur Marc Pernot

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Alliant humilité, ouverture d’esprit, enthousiasme et compétence, la recherche scientifique va très très bien avec la recherche spirituelle, la recherche théologique, la recherche éthique…

Question posée :

Cher monsieur le pasteur,

Je suis tombée sur le site jecherchedieu.ch et j’ai beaucoup aimé vos réponses.
Je suis d’une famille très chrétienne mais depuis l’adolescence je tente de trouver à quoi je crois vraiment et de différencier ce que je sais sur la foi chrétienne de ce que je croix vraiment. Ça fait maintenant des années que je suis en recherche mais rien n y fait. Je ne sais plus comment avancer. J ai un esprit très rationnel. Je suis une scientifique.
J’arrive pas à me dire que Dieu n’existe pas mais c est plus au moins tout ce dont je suis sûre.
Ce qui me pose le plus problème c est Jésus. J arrive pas à comprendre pourquoi il a besoin de mourir sur la croix pour nos péchés. Je vois pas le lien de cause à effet. Si Dieu voulait une relation directe avec nous et nous pardonner si on demande pardon pour nos péchés, pourquoi il ne pouvait pas juste décider et c’est tout? Et de manière générale j ai de la peine à croire que Jesus est plus qu’un prophète.
Quand je prie, je ressens rien, aucune connexion.
J’aimerais du plus profond de moi être chrétienne et croire.

J’espère que vous avez quelques pistes pour moi.
Meilleures salutations

Réponse d’un pasteur :

Bonsoir

Il n’y a absolument pas à avoir honte d’avoir un esprit rationnel et scientifique. Cela ne joue en rien contre la foi, bien au contraire. Ce que cela met en danger c’est seulement quelques doctrines traditionnelles bourrées d’incohérences, quelques discours cherchant à manipuler les foules en utilisant la très efficace technique de dressage de la carotte et du bâton (hélas).

En l’occurrence, votre analyse quant au rôle de la mort du Christ dans le pardon de Dieu est tout à fait pertinente et même salutaire. Car cette théorie, mise en valeur surtout à partir du XIe siècle, est épouvantable aussi bien en ce qui concerne la conception de Dieu, que celle de la justice. C’est ce que j’ai essayé d’expliquer en plusieurs endroits de ce site, voir les articles :

L’idée que Jésus serait Dieu ? C’est une idée partagée par bon nombre de chrétiens, mais pas par tous, et elle est discutable, elle appartient plus à la piété populaire (on a bien le droit), et pose un certain nombre de difficultés. En divinisant Jésus c’est un petit peu l’humain que l’on divinise, donc nous-même, ce qui n’est pas faux mais un petit peu dangereux, même si cela répond agréablement au fantasme classique de la toute-puissance. Dans les débuts du christianisme il n’était pas question de dire que Jésus serait Dieu. Seulement qu’il y a du divin en lui, comme en nous tous, par l’amour, par la liberté de créer un petit peu du neuf, par le souffle de Dieu (l’Esprit).

Bien des personnes pensent que Jésus est un enseignant, ou un prophète. C’est le cas de la plupart de ses disciples tout au long de sa vie. C’est le cas d’une bonne part des chrétiens aujourd’hui même si dans certaines églises assez étroites d’esprit c’est considéré comme inacceptable de ne pas penser que Jésus est Dieu. Je ne pense pas que ce dogmatisme soit juste d’un point de vue théologique, et c’est assez aliénant pour les personnes qui sont contraintes par ce système, et souvent culpabilisées de ne pas pouvoir être d’accord avec tout (elles ont pourtant bien raison de penser avec avec sincérité).

Personnellement, je dirais que Jésus est certes enseignant et inspiré, mais qu’il est en plus méta-prophète, faisant de chacune et chacun un prophète ou une prophétesse. Que Jésus est prêtre, en articulation avec Dieu, mais qu’il est aussi méta-prêtre, réconciliant chaque personne (qui le désire) avec Dieu, en ligne directe. Et que chaque personne est appelée à trouver sa vocation de service dans le monde. (voir cette prédication « Le Christ et tout un peuple de christs »)

Pour ce qui est du sentiment religieux, il n’est pas partagé par tout le monde. Je n’ai pas fait de statistiques avec un échantillon représentatif, mais au vu des centaines de personnes que j’ai croisées en particulier pour préparer leur baptême d’adulte, je dirais que 50% des gens ont eu une expérience mystique, ou ont de temps en temps le sentiment que dans la prière ils ne sont pas seuls. Même pour ces personnes là ce n’est pas permanent. Même pour les plus grand croyants (en parlant sincèrement). Il n’y a aucune honte à ne rien « sentir ». Il y a bien des façons d’être humain, cette diversité est une richesse. Bien des personnes ayant eu une expérience mystique ressentent une grande pudeur vis à vis de cela et n’en parlent pas volontiers même à leurs plus proches, et pas facilement au pasteur non plus. Là encore, dans certaines églises il est enseigné qu’il faudrait absolument vivre cela, et le vivre chaque dimanche pendant le culte, ou en prenant le pain de la communion… cela culpabilise injustement bien des personnes, leur faisant se demander si elles sont mauvaises ou pas aimées de Dieu. Alors que non, c’est juste comme cela. Cela peut venir un jour, ou pas. Cela n’empêche pas de prier, ce qui est un exercice de toute façon excellent, bienfaisant et utile.

Vous dites « J’aimerais du plus profond de moi être chrétienne et croire. » Franchement, on ne peut pas mieux dire. Même si vous aviez la théologie la plus aboutie, la prière la plus vibrante, le cœur large de toutes les compassions et espérances, l’œil éclairé de toute la lumière divine… cet appétit est tout à fait essentiel, il est une dynamique de cheminement, de fidélité croissante. c’est ce qui rend la vie vivante. En même temps, comme nous sommes dans la grâce de Dieu, ce n’est pas une recherche de performance il n’y a pas de rythme imposé, de niveau requis, juste la joie de vivre, relié à la source de la vie, au moins par notre recherche, et en réalité par infiniment plus.

Dieu vous bénit et vous accompagne.

par : Marc Pernot, pasteur à Genève

Réponse de la visiteuse :

Cher Marc,

Merci beaucoup pour votre réponse. Je m’attendais pas une telle réponse pour être honnête. Toutes les personnes que je connais crois en la trinité et que jesus est 100% Dieu 100% homme.
Je trouve que ce que vous dites est vraiment censé et m’éclaire vraiment. Je comprends maintenant dans quelle direction j’aimerais aller et que l’unique voie n est pas forcément de croire que Jésus est Dieu, ce qui m’a bloqué pendant tant d annees! Ca donne envie de lire la bible avec cette nouvelle façon de voir.

Cela soulève tout de même pas mal de questions: Si Jésus n’est pas Dieu, pensez vous qu’il est ressuscité? Et quel est donc la signification de l’eucharistie ou Cène? Pour moi ca avait tjrs cette idée de sacrifice pour nos péchés.

Comment comprendre le passage où il est écrit que l’unique chemin vers Dieu c’est Jesus?

Meilleures salutations

Réponse d’un pasteur :

Chère Madame

C’est bien le droit de ces personnes de penser que Jésus serait 100% Dieu et 100% humain, c’est sans doute ce qu’on leur a enseigné. Mais leur a-t-on vraiment donné le choix ? Ces personnes ont-elles seulement lu les évangiles ? Savent-elles que cette question « christologique » a été très débattue du IIe siècle jusqu’au IVe siècle. Que les premiers chrétiens, pendant au moins une demi douzaine de générations n’avaient même jamais entendu parler de ce genre d’idées ? Et que cette doctrine développée progressivement sur des siècles, n’a été rendue obligatoires qu’au IVe et Ve siècle pour des raisons amplement politique (l’empereur romain voulant unifier son empire). ce temps de développement montre le sérieux et la profondeur de cette théorie du Christ 100% Dieu et 100% humain, mais aussi que cette théorie est loin d’être évidente aux origines, dans la vie et les paroles de Jésus lui-même. Il est du coup assez surréaliste que certains chrétiens (et certaines églises) cherchent à l’imposer à tous en prétendant que c’est l’essentiel à la foi chrétienne. C’est plus révélateur de leur propre psychologie. Car Jésus n’était vraiment pas du genre à imposer une doctrine. Jamais il ne s’est offusqué qu’une personne l’appelle « rabbi », ou « enseignant ». Il s’est pas contre opposé une fois quand une personne l’a appelé « bon maître » (bon professeur), Jésus répondant « Pourquoi m’appelles-tu bon? Il n’y a de bon que Dieu seul. » (Luc 18:19).

En ce qui concerne la résurrection, tout dépend de ce que l’on entend par « ressuscité » ? Dans le grec ces évangiles les verbes traduits ainsi en français ne sont pas des mots religieux, ce sont des mots très usuels de la vie courante qui signifient s’éveiller ou se mettre debout. Alors que le verbe « ressusciter » en français fait plus penser à un retour à la vie, souvent même un retour à la vie pour la vie future. Jésus dans les évangiles, et Paul dans ses lettres parlent à plusieurs reprises de ressusciter maintenant, dans la vie présente, pour une vie plus éveillée, d’humain debout, les pieds sur terre et la tête au ciel, et les mains entre les deux pour agir dans cette tension de ces deux mondes. En ce qui concerne la résurrection du Christ, il est bien question de résurrection et non de réanimation, de retour à la vie d’avant. D’ailleurs, le ressuscité passe à travers les murs, apparaît et disparaît un un clin d’œil, et les disciples peinent à le voir et à le reconnaître. Ce que l’on peut dire de plus certain à ce propos c’est que le Christ après sa mort est ressuscitant, ses disciples désespérés et terrorisés suite à l’exécution de leur Messie sont pris d’un enthousiasme tout à fait communicatif pour sa personne et son message. Cela, en tout cas, est un fait historique, qui a changé la face du monde. L’apôtre Paul parle clairement de sa rencontre avec le Christ ressuscité en parlant d’une expérience mystique qu’il a eu sur le chemin de Damas.

L’apôtre Paul, encore lui, et son disciple Luc, disent de communier avec le Christ, chaque fois que nous mangerons du pain et boirons dans une coupe, « en mémoire » de Jésus-Christ (Luc 22:19; 1 Corinthiens 11:24). L’idée me semble être de prendre et d’assimiler les paroles, et la façon d’être de Jésus-Christ, et d’être ainsi incorporé à une humanité réconciliée par l’ouverture à l’Esprit de Dieu, par l’amour, par la compassion avec l’autre, par le fait d’assumer notre place dans ce corps, d’y chercher sa vocation personnelle… L’idée de sacrifice du Christ est présente dans ce geste, dans cette mémoire, certes. Mais je ne pense pas que ce soit là encore l’idée de sacrifice pour calmer la fureur d’un Dieu terrible, mais un don de soi par amour pour les autres, pour leur apporter un supplément de vie. Un sacrifice qui manifeste l’amour de Dieu, qui manifeste une consécration personnelle à vivre notre vocation, inspirée par Dieu dans un service pour augmenter la vie.

En ce qui concerne l’unique chemin qu’est Jésus, peut-être trouverez vous des pistes dans cette prédication : Jésus : le seul chemin ?

Bravo pour ces recherches

Bien cordialement

par : Marc Pernot, pasteur à Genève

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