Une bible ancienne avec quelques clefs dessus - photo MP
Lire la Bible

Un trousseau de clefs : quelques versets essentiels, ouvrant notre interprétation de la Bible (et de notre vie) ?

Par : pasteur Marc Pernot

Une bible ancienne avec quelques clefs dessus - photo MP

Élaborer sa propre compréhension des Écritures, et de sa vie ?

La Bible est un patrimoine immense et puissant.

Comme avec tout outil puissant il est possible de l’utiliser pour faire le mal et pour faire le bien, pour tuer et pour faire vivre, pour réconforter ou pour désespérer, pour libérer ou pour asservir. Tout dépend comment on l’interprète, il y a une multitude d’interprétations possibles (ce qui est connu des lecteurs de la Bible depuis son origine, ils reconnu comme une richesse).

Comment se fait-il que certaines personnes se fassent une idée de Dieu comme devant être craint, un Dieu que l’on ose à peine prier directement ? et d’autres personnes, à partir de la même Bible conçoivent Dieu comme pure tendresse ? Nous avons là deux visions complètement opposées à partir de la même Bible.

C’est que chacun a ses textes préférés, essentiels, qui lui servent de colonne vertébrale ensuite pour son interprétation de tout le reste de la Bible, lisant alors au second degré tel passage que d’autres personnes lisent au pied de la lettre, et réciproquement. L’intérêt de garder l’ensemble des textes est qu’au moins tous les chrétiens ont la Bible, et en particulier les 4 évangiles, qui nous rassemblent tous. C’est déjà formidable. Et cela nous rassemble aussi entre générations depuis 2’000 à 3’000 ans, c’est puissant.

Alors, pour vous, quels sont ces textes que vous placeriez comme votre cœur du cœur de la Bible, de votre théologie, de votre façon de comprendre la vie, la religion, l’éthique chrétienne ? C’est comme un trousseau de clefs que nous utilisons ensuite, consciemment ou non, pour interpréter tout le reste de la Bible, mais aussi de ce qui concerne Dieu, la foi, l’éthique chrétienne.

Voilà quelle serait mon trousseau de clefs d’interprétation. Je me suis limité à 12 pour faire un chiffre « biblique » :

  1. Dieu aime même ses ennemis (Matthieu 5:43-48) : nous n’avons donc rien à craindre de lui, en aucune circonstance. Il fait du bien à ceux qui le haïssent et font du mal, nous dit Jésus ici. Donc s’il y a un texte laissant penser que Dieu punit, tue et abandonne un ennemi : c’est impossible à prendre littéralement, nous le lirons spirituellement : Dieu cherche à éliminer notre méchanceté, notre infidélité, ce qui nous tire vers le bas.
  2. Le sommaire de la Loi (Marc 12:29-31) : Jésus résume l’essentiel de ce qui nous est demandé dans deux très courtes pistes : écouter et aimer Dieu ; aimer son prochain comme soi-même. L’accent est mis sur la qualité de relation de la personne, sur l’écoute, la sincérité personnelle. Jésus ajoute la réflexion personnelle comme essentielle dans notre recherche de Dieu. Donc s’il y a un texte laissant penser qu’il faudrait absolument telle croyance, tels rites imposés, tel mariage, telle participation à l’église… il sera impossible de les lire
  3. La première béatitude (Matthieu 5:3) « Heureux les pauvres en Esprit, car le royaume des cieux est à eux ! » : l’objectif de Dieu, particulièrement en Christ, est notre bonheur, est de nous voir avancer. Pour cela il est bon de se reconnaître « pauvre en Esprit » : sentir que nous ne sommes pas totalement démuni de l’Esprit de Dieu, et aller mendier à la porte de Dieu pour lui en demander plus. C’est l’assurance que nulle personne n’est totalement dénuée d’Esprit saint, et que nous avons tous encore à nous convertir.
  4. La parabole de la brebis perdue de Matthieu (Luc 15:1-7) : voilà comment Dieu réagit devant les pécheurs et les personnes de mauvaise vie : ne perdant jamais espoir, partant à leur recherche. Jésus ne doute pas que ce berger finira par retrouver même la plus perdue des brebis perdues. Chaque personne est à la fois en partie brebis ayant besoin d’être retrouvée par Dieu et brebis juste que Dieu laisse libre d’avancer à sa guise.
  5. Dieu est lumière et il n’y a pas de ténèbres en lui (1 Jean 1:5) : c’est l’affirmation que Dieu n’est derrière aucune souffrance ni catastrophe, que nous pouvons avoir une totale confiance en lui, et que son action vise à nous permettre de voir clair de nos propres yeux.
  6. Dieu est amour, quiconque aime est né de Dieu et connaît Dieu (1 Jean 4:7-16) : une théologie fondamentale, un appel à aimer nous-même, et la reconnaissance que bien des personnes étiquetées comme « athées » sont bien plus vivantes de Dieu qu’il ne semble.
  7. Tout est permis mais tout n’est pas utile, tout est permis mais tout ne construit pas (1 Corinthiens 10:23) : la base de l’éthique selon Paul : un libre questionnement. C’est extrêmement libérant et responsabilisant à la fois. Dieu ne veut pas nous ennuyer mais nous aider à voir clair et trouver ce que nous pourrions faire pour bâtir un monde de plus en plus bon et vivant. C’est très utile quand un verset (ou des personnes bien intentionnées) prétendent nous imposer des règles absolues comme venant de Dieu.
  8. Le sabbat est fait pour l’humain et non l’humain pour le sabbat (Marc 2:27) : Jésus remet la religion à sa place comme un outil au service du développement de l’humain. Un moyen utile, que l’on peut adapter avec cœur et intelligence comme lui-même le fait quant il rompt le sabbat pour faire preuve de compassion pour une personne ayant besoin d’aide.
  9. Je suis l’Éternel, ton Dieu, qui t’ai fait sortir de l’esclavage (Exode 20:2) : c’est la première des 10 paroles, qui n’est pas un commandement, mais l’être Dieu comme nous éveillant à la liberté, ayant ce bon projet pour nous, et que nous soyons une bonne personne faisant de bonnes choses grâce à son aide.
  10. Quand tu pries, entre dans ta chambre ferme ta porte et prie ton Père qui est là dans secret (Matthieu 6:6), en ressentir tout le bénéfice. C’est ce que Jésus dit et c’est ce qu’il pratique lui-même si souvent, se retirant dans la montagne, seul, pour prier (Luc 6:12). La prière et le culte essentiels sont intimes, les assemblées, que Jésus fréquente aussi, sont des exercices pour nourrir notre prière et notre réflexion, un service rendu aux autres, aussi. Et dans cette prière intime, rejoindre Dieu, et rejoindre les autres, trouver avec Dieu notre vocation. Ne laisser personne, ni aucun groupe, se placer en intermédiaire entre Dieu et nous, entre nous et Dieu.
  11. Jésus félicite le centurion pour sa foi digne de celle d’Abraham (Matthieu 8:10), pourtant un centurion est un homme qui rend un culte régulier à l’empereur de Rome comme à son dieu, et qui est assez efficace dans son métier des armes. Cette attitude particulièrement ouverte et bienveillante de Jésus est un vaccin contre bien des intolérances, à l’inverse de personnes qui ont vite fait de considérer leur prochain, comme infidèle, comme non-chrétien parce qu’il ne confesserait pas telle ou telle croyance (parfois jamais enseignée directement par Jésus, d’ailleurs), aurait tel ou tel comportement, ne serait pas baptisé comme il faut…
  12. Père pardonne leur car ils ne savent ce qu’ils font (Luc 23:34) : Jésus fait plus que pardonner aux hommes qui viennent de le crucifier et continuent à se moquer de lui et à voler ses affaires : Jésus prie pour eux. C’est la garantie que Dieu pardonne et même veut du bien à chaque pécheur. Et donc à nous, qui avons du mal à pardonner, qui si souvent oublions Dieu.

Bien d’autres versets sont inspirants, c’est l’objet des simples petits versets médités (avec gourmandise), mais ici, j’ai cherché à rassembler un trousseau de clefs ouvrant les portes d’une interprétation confiante en Dieu, source de vie. Ouvrir son intelligence et son cœur dans l’écoute de ce qu’il a à nous dire en particulier. Ces versets clés peuvent nous aider à interpréter bien des passages qui auraient pu nous sembler difficiles ou inquiétants.

par : pasteur Marc Pernot

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22 Commentaires

  1. Pascale dit :

    Merci pour ce partage, pour ce choix de textes. Outre le contenu, ce que j’apprécie tout particulièrement c’est la  façon dont vous assumez totalement le fait de choisir des clés de lecture, et cela donne un réel élan pour réfléchir à nos propres choix.
    Personnellement je mettrais bien le premier chapitre de la Genèse dans mon trousseau. On y trouve à mon sens quelques fondamentaux : Dieu est celui qui fait émerger la vie du chaos, celui qui rend le monde vivable, tout ce qui vient de lui est bon, il aime le monde et ses créatures, il crée l’être humain mâle et femelle sans que l’un ne soit supérieur à l’autre, il donne sa vocation à l’humain d’être créateur.
    Par ailleurs, j’ajouterais aussi dans mon trousseau, non pas un texte biblique, mais un petit truc que vous rappelez régulièrement et qui personnellement m’aide beaucoup dans ma lecture : chaque fois qu’un texte évoque une séparation entre les bons et les méchants, entre les justes et les pécheurs, entre ceux qui ont la foi et ceux qui ne l’ont pas, … , cela signifie que nous sommes à la fois dans les deux catégories. Voilà qui évite aussi bien des lectures nocives.

    1. Marc Pernot dit :

      Merci ! Le premier chapitre de la Genèse est effectivement un sommet, très éclairant en théologie, en anthropologie, en éthique, ainsi que pour notre foi. J’approuve à mil pourcents dette grande clef. D’autant plus que c’est la première page de la Bible.

      Pour le petit truc, on pourrait mettre dans le trousseau le Psaume 1er (lui aussi mis par le psautier à cette place comme un trousseau), ou la parabole des brebis et des boucs de Jésus (où nous sommes manifestement chacun brebis et bouc).

  2. Luc - Jean - 1-Jean - Ancien Testament et Peut-on isoler tout verset de son contexte ? dit :

    Bonjour !

    Pour ma part, comme vous nous demandez notre vision, je proposerais bien des contraintes supplémentaires, comme le fait de choisir pour ces 12 clefs d’interprétation (s’il faut choisir un chiffre de façon à prioriser les clefs d’interprétation) les passages avec la répartition semi-flexible suivante :
    – 2 à 4 passages dans l’évangile selon Luc
    – 2 à 4 passages dans l’évangile selon Jean
    – 2 à 4 passages dans l’épître 1-Jean
    – 2 à 4 passages dans le premier Testament
    – le reste (s’il y en a un) étant libre

    Il est alors assez probable qu’il y ait une plus grande convergence et proximité dans les passages et versets choisis.

    Je suis tout à fait d’accord avec les principes d’interprétation « Dieu est Amour », « Dieu est Lumière et il n’y a pas de ténèbres en lui », qui posent le principe de nondysthéisme de Dieu. Bien que leur contexte soit important pour leur étude, il me semble que ces passages ou versets peuvent tout à fait être isolés de leur contexte pour en faire de références et des clefs de lecture de l’ensemble de la Bible.

    En revanche, est-ce qu’il n’y aurait pas un problème avec le verset « Tout est permis mais tout n’est pas utile, tout est permis mais tout ne construit pas » (1 Corinthiens 10:23). En effet, le contexte de ce verset, avant et après, concerne l’alimentaire. Il me semble, que dans son contexte, Paul signifie que les interdits alimentaires de la Loi juive n’ont plus cours ou ont été accomplis, mais il invite en même temps à faire preuve de discernement sur le plan symbolique (viande sacrifiée aux idôles…), ou relationnel (par exemple en essayant de ne pas trop choquer si possible les personnes avec qui on mange si elles ont des interdits alimentaires)… Mais, contrairement aux autres versets ou passages cités qui eux me paraissent pouvoir être isolés de leur contexte pour en faire des sortes de références, bien que l’appréciation de leur contexte reste importante par ailleurs, ce verset-ci ne me paraît pas satisfaire aux conditions pour pouvoir l’isoler et en faire un principe d’interprétation de toute la Bible. En effet, selon moi, seuls « Tout n’est pas utile » et « Tout n’est pas constructif » ne posent pas de problèmes particuliers, et sont même des lapalissades. Qu’en pensez-vous ?

  3. André dit :

    Bonjour Marc
    J’ai poursuivi la lecture d’exode 20 2. Et au verset 5 je trouve enfin pour dire ce que je ressens ce verset peu en rapport avec un Dieu d’amour qui nous libère de l’esclavage et puis paf si tu te loupes merci d’éclairer ma compréhension.
    Belle journée à tous

    1. Marc Pernot dit :

      Bonjour
      Il me semble une bonne idée de garder le meilleur, précisément, et de s’en servir pour interpréter le reste. Précisément.
      Le Dieu jaloux, signifie qu’il est bon de placer sur le dessus les forces de libération et d’épanouissement.
      Ensuite, ce qui fait peur dans la suite c’est Dieu qui « qui punis l’iniquité », mais la traduction n’est pas bonne car le verbe traduit par « punir » est le verbe hébreu paqad qui signifie rendre visite, Dieu visite les pécheurs et leurs enfants, dès lors que l’on sait que Dieu est bon,cette visite n’est pas pour écraser ou faire du mal, mai spour soigner, nourrir, éclairer…

  4. André dit :

    Merci pour vos explications du coup la traduction change tout

  5. André dit :

    Bonjour Marc
    Matthieu 8 12 y aura quand même des gens rejetés ?pleurs grincements de dents ou c’est encore un mauvais côté de nous qui est jeté hors du royaume ? Parce que on parle d’héritiers.
    Bon dimanche à tous

    1. Marc Pernot dit :

      Bonjour, oui, c’est cela à mon avis: c’est le méchant en chacun de nous qui ne rigole pas, quand Dieu agit en nous, ce qui est toujours une bénédiction pour chacun.

  6. Premier Testament - Matthieu - Marc - Luc - Jean - 1-Jean dit :

    Voici une nouvelle sélection centrée sur le Permier Testament, les évangiles et une théologie d’inspiration principalement Luc-Jean.

    I. Torah, écrits prophétiques et de sagesse dans le Premier Testament (4/12)

    1. Lévitique 19:11-18 (quête éthique et morale)
    2. Jérémie 28:8-9 (les vraies prophéties sont des bonnes nouvelles, sinon elles peuvent être interprétées historiquement et simplement via le principe de prétérisme)
    3. Job 28:28 (quête philosophique et morale)
    4. Psaume 19:1-11 (l’interprétation de la nature comme un des fondements possibles de la théologie naturelle)

    II. Évangiles (7/12)

    Évangile selon Matthieu
    5. Matthieu 6:9-13 la prière du Notre Père céleste
    (avec les variantes de traduction “Que tes volontés soient faîtes” et “Délivre nous des maux”, de façon à chercher à adresser des éléments plutôt que des blocs métaphysiques comme la volonté de Dieu ou le Mal)

    Évangile selon Marc
    6. Marc 10:35-45 La grandeur dans le service plutôt que dans la domination, Le Fils de l’Homme est venu pour servir plutôt que pour être servi (cf Jean 13:1-17 Le lavement des pieds)

    Évangile selon Luc
    7. Luc 4:16-29 Jésus Messie (cf la prophétie de bonne nouvelle Ésaïe 61:1-2 et l’omission de l’année de vengeance pour le Seigneur) et universalité de l’amour de Dieu pour les humains
    8. Luc 10:25-37 vie éternelle, reprise de Lévitique 19:18, assistance à personne en danger, et qui est mon prochain ?
    9. Luc 15:11-32 le fils prodigue, Dieu pardonne les offenses, les fautes, les péchés

    Évangile selon Jean
    10. Jean 14:1-21 : le Christ comme chemin (avec “ego eimi” traduit comme “Moi, Je Suis” ?) ; le Défenseur
    11. Jean 8:31-36 liberté en Christ, libération en premier lieu de l’esclavage du péché

    III. Épîtres (1/12)

    12. Épître 1-Jean
    1-Jean 1:5 Dieu est Lumière et il n’y a pas de ténèbres en lui (principe de non-dysthéisme : Dieu est tout-bon, tout-amour, principe du Bien, mais pas du Mal)

    1. Marc Pernot dit :

      Excellent, merci.

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