extrait d
Esprit-Saint

Interreligieux : Qu’est-ce qui unit des membres si divers en un corps ? (1 Corinthiens 12)

Vidéo :

(vidéo de la prédicationaudio prédicationaudio culte)

(Voir le texte biblique ci-dessous)

prédication (message biblique donné au cours du culte)
à Cologny le dimanche 5 décembre 2021,
par : pasteur Marc Pernot

extrait d'un tableau de Brueghel avec des personnes qui dansent
Nous sommes divers, ce matin, dans ce chalet : juifs, chrétiens catholiques ou protestants, bahaïs, agnostiques ou non croyants à l’esprit ouvert.

Dans cette lettre aux Corinthiens, l’apôtre Paul compare l’humanité à un corps unique composé de multiples membres différents. Paul montre la bénédiction qu’est cette diversité des membres dans le corps : pied, main, œil, oreille, cerveau, cœur et bien des organes, chacun remplissant son rôle et communiquant avec les autres. Rien que pour attraper un objet, geste si banal, de nombreux d’organes sophistiqués doivent faire équipe ensemble avec une grande finesse.

Les multiples membres

Dans notre corps, il y a environs 30’000 milliards de cellules, chacune avec sa propre vocation, chacune étant habitée par son aspiration à vivre et à transmettre la vie, chacune étant en interface avec d’autres cellules dans le corps. Heureusement que ces cellules ne sont pas d’un type unique et qu’elles communiquent entre elles, sinon nous n’irions pas loin : nous ne pourrions ni voir, ni sentir, toucher, ni bouger, discuter, penser, aimer.

Heureusement, donc, que le corps est fait d’organes divers et s’articulant entre eux pour faire équipe.

De même, notre diversité entre nous, humains, n’est pas un scandale, au contraire : c’est une richesse, c’est une bénédiction. Ou plutôt : notre diversité est faite pour être une richesse et une bénédiction, car c’est loin d’être une évidence en effet, par exemple dans le couple, dans la famille, dans la Cité, ou entre personnes de foi diverses et personnes athées.

Qu’est-ce qui fait que les multiples membres forment ensemble un corps, à la fois qui tienne ensemble et qui permette aux différents organes d’exprimer leur génie propre ?

L’apôtre Paul relève deux choses, deux forces.

1) L’Esprit

Premièrement : l’Esprit, le souffle de Dieu qui anime toute personne, Esprit qui fait effectivement que chaque personne est sacrée.

Tous, dans notre diversité, nous avons la même source profonde ultime qui nous anime. C’est la première force nous unifiant tous. Nous sommes reliés, consciemment ou non, à la source de l’être. Source qui fait qu’il y a dans l’univers quelque chose plutôt que rien ou du chaos seulement.

Ce que Paul appelle « l’unique Esprit », c’est cette source de vie du commencement de la Genèse. D’ailleurs, l’Esprit est féminin en hébreu : c’est la rouar de Dieu, source de nouveauté de vie.

Que l’Esprit soit donné à chaque personne signifie beaucoup : cela dit que chaque personne humaine est en évolution permanente, et cela veut dire que chaque personne est appelée à être elle-même source d’évolution. L’Esprit est un don et c’est une vocation.

L’Esprit est la première force qui nous unit en un même corps. C’est une unité qui vient de l’intérieur de chaque personne, et qui lui donne de poursuivre sa genèse, qui la libère comme un papillon sort de sa chrysalide et déploie ses ailes. Le monde, le corps entier a besoin de nous voir être nous-même et en forme.

Cette unité des personnes dans le corps de l’humanité n’est pas une unité contrainte de l’extérieur bridant la personne. Au contraire c’est une inspiration, c’est un élan.

2) Le souci de l’autre

L’apôtre Paul relève une seconde grande force qui crée l’unité du corps avec cette multitude de membres si divers, si particuliers. Cette force c’est que les membres individuels se préoccupent d’autres membres. Il ne dit même pas d’arriver à aimer ou servir les autres membres, mais de s’en soucier, c’est la racine. Cette seconde force complète la première qui était comme une inspiration de l’Esprit de Dieu.

Se soucier de l’autre, de son aspiration à lui, à elle. De ce dont il a besoin pour s’épanouir.

C’est déjà reconnaître que l’autre est un digne membre du corps, alors même qu’il n’est pas moi, qu’il m’est différent, qu’il a une théologie différente, une autre façon d’adorer Dieu ou une autre philosophie, une autre vocation dans le corps, une autre fonction.

Corps du Christ ?

Voici donc ce corps, union vivante de membres divers, unis par ces deux forces de l’Esprit et du souci de l’autre. Ce corps, Paul l‘appelle « corps du Christ ».

  • « Christ » car ayant reçu l’Esprit comme une onction d’huile sainte, un ruissellement de bénédictions sur nous, et c’est vrai que nous l’avons reçue, cette onction, tout humain que nous sommes.
  • Et « christ » veut dire être appelé à sauver le monde, au moins un petit peu, là où nous sommes, selon notre talent propre, selon notre inspiration.

C’est ainsi que nous sommes membre du corps du Christ : une personne douée d’un génie propre, appelée à faire ce qu’elle pourra, à l’écoute de l’aspiration profonde de l’autre.

Amen.

pasteur Marc Pernot

Texte de la Bible

1 Corinthiens 12

Prenons une comparaison (nous dit l’apôtre Paul) : le corps est un, et il a pourtant plusieurs membres ; mais tous les membres du corps, malgré leur nombre, ne forment qu’un seul corps : il en est de même du Christ. 13Car nous avons tous été plongés dans un seul Esprit en un seul corps, Juifs ou Grecs, esclaves ou personnes libres, et nous avons tous été abreuvés d’un seul Esprit. 14Le corps, en effet, ne se compose pas d’un seul membre, mais de plusieurs. 15Si le pied disait : « Comme je ne suis pas une main, je ne fais pas partie du corps », cesserait-il pour autant d’appartenir au corps ? 16Si l’oreille disait : « Comme je ne suis pas un œil, je ne fais pas partie du corps », cesserait-elle pour autant d’appartenir au corps ? 17Si le corps entier était œil, comment entendrait-on ? Si tout était oreille, comment sentirions nous les parfums ? 18Mais Dieu a disposé dans le corps chacun des membres comme il a voulu. 19Si l’ensemble était un seul membre, où serait le corps ? 20Il y a donc plusieurs membres, mais un seul corps. 21L’œil ne peut pas dire à la main : « Je n’ai pas besoin de toi », ni la tête ne peut dire aux pieds : « Je n’ai pas besoin de vous. » 22Bien plus, même les membres du corps qui paraissent les plus faibles sont nécessaires… 25de sorte qu’il n’y ait pas de division dans le corps, mais que les membres aient souci les uns des autres. 26Si un membre souffre, tous les membres souffrent ; si un membre est glorifié, tous les membres partagent sa joie. 27Vous êtes le corps du Christ et vous êtes ses membres, chacune, chacun pour sa part.

Partagez cet article sur :
  • Icone de facebook
  • Icone de twitter
  • Icone d'email

Articles récents de la même catégorie

Articles récents avec des étiquettes similaires

5 Commentaires

  1. LS. dit :

    Juste un court message pour vous remercier et vous féliciter pour cette brève prédication.
    Vous avez créé un oxymore remarquable: …«la source (profonde) ultime » qui nous anime…
    Est-ce un raccourci dans le temps et l’espace qui fait signe à l’éternité? Quoiqu’il en soit, il y a une beauté étrange à ressentir la source ultime.
    Fraternellement,

    1. Marc Pernot dit :

      Merci pour ce bel encouragement.
      Je pense effectivement que Dieu est de cet ordre, en effet.
      C’est à travers le temps et c’est en direct, puisque c’est à chaque instant qu’il jaillit quelque chose de cette source en nous, je pense. C’est dans notre vie concrète en ce monde et cela ne vient pas de ce monde.
      Il me semble juste de dire que Dieu n’existe pas dans cette dimension, il est d’une autre dimension mais néanmoins a un effet dans nos dimensions, dans notre espace et temps. C’est, je pense, le malentendu en ce qui concerne l’existence de Dieu, ou non.
      L’image de la source me semble limitée comme toute image, mais a quelque chose de juste. Quand on boit à une source, ce n’est pas la source que l’on boit mais l’eau qui en découle, son effet, son jaillissement.
      Donc, je reconnais que cela semble passablement oxymorique, mais pas tant que cela, ou pas plus que Dieu en nous, Dieu pour nous qui tout en étant non matériel agit sur ce monde matériel, tout en étant sans commencement ni fin agit dans le temps ?
      Bien fraternellement

      1. Jean dit :

        Bonjour,

        merci beaucoup pour cette très belle prédication-témoignage !

        1. « Il me semble juste de dire que Dieu n’existe pas dans cette dimension, il est d’une autre dimension mais néanmoins a un effet dans nos dimensions, dans notre espace et temps » : Dieu métaphysique Cause Première aristotélicienne ?
        2. « nous avons la même source profonde ultime qui nous anime. C’est la première force nous unifiant tous. Nous sommes reliés, consciemment ou non, à la source de l’être. Source qui fait qu’il y a dans l’univers quelque chose plutôt que rien ou du chaos seulement. » : y a-t-il une correspondance possible avec l’idée de chôra platonicienne ? ( cf https://fr.wikipedia.org/wiki/Ch%C3%B4ra ) Un peu réinterprétée en termes plus positifs peut-être, elle se situe à la frontière entre l’Intelligible et le Sensible chez Platon, elle désignerait la condition de la possibilité de toute chose, et serait source d’indétermination et donc de liberté pour le vivant libre, qui fait que nous sortons constamment (ou pouvons sortir) de tout déterminisme en tant qu’humanité, et devenir des sources de causalité et d’évolution : « Que l’Esprit soit donné à chaque personne signifie beaucoup : cela dit que chaque personne humaine est en évolution permanente, et cela veut dire que chaque personne est appelée à être elle-même source d’évolution. »

        1. Marc Pernot dit :

          Merci pour cet encouragement !
          1- c’est exactement cela que je voulais dire.
          2- L’équivalent de la chôra serait plutôt dans l’Evangile « le monde », me semble-t-il, et les idées auraient pour parallèle l’Esprit. Saut que « le monde » n’est pas négatif dans la Bible, le fameux verset Jean 3:16 disant même que l’amour de Dieu pour le monde est sa motivation pour chercher à le sauver en Christ (c’est vivre « selon le monde » qui n’est pas génial, mieux valant vivre « selon l’Esprit », bien entendu). Et l’Esprit est bien plus dynamique, fluide, vivant, et en dialogue actif que les idées platoniciennes, me semble-t-il.

          1. Jean dit :

            Merci oui, concernant la chôra, on la trouve mentionnée en Timée 52a-b : « Enfin il existe un troisième genre [après le modèle intelligible et le monde sensible], celui du lieu : il ne peut mourir et fournit un emplacement à tous les objets qui naissent. »
            [τρίτον δὲ αὖ γένος ὂν τὸ τῆς χώρας ἀεί cf Timée, Critias, édition bilingue des Belles Lettres, ou https://www.perseus.tufts.edu/hopper/text?doc=Perseus%3Atext%3A1999.01.0180%3Atext%3DTim.%3Asection%3D52a en anglais et/ou grec ou http://remacle.org/bloodwolf/philosophes/platon/cousin/timee.htm et https://beq.ebooksgratuits.com/Philosophie/Platon-Timee.pdf en français].
            Et encore : Timée 48e-49a : L’une nous avions supposé que c’était l’espèce du Modèle, espèce intelligible et immuable [source de l’être] ; la seconde, copie du Modèle, était sujette à la naissance et visible [placée dans le devenir]. […] Mais maintenant, la suite de notre raisonnement semble nous contraindre à tenter de faire concevoir par nos paroles cette troisième espèce, qui est difficile et indistincte. […] 50c. Car elle est par nature comme un porte-empreinte pour toutes choses [un réceptacle, parfois interprété aussi comme une sorte de miroir]. Elle est mise en mouvement et découpée en figures par les objets qui y pénètrent, et grâce à leur action, elle apparaît tantôt sous un aspect, tantôt sous un autre. Quant aux figures qui y entrent ou qui en ressortent, ce sont des images des êtres éternels, que ceux-ci impriment en elles, d’une certaine manière difficile à exprimer et merveilleuse dont nous ajournons la description. »

            En essayant de donner une interprétation contemporaine à ces passages et aux pages qui l’entourent aujourd’hui, je dirais que la correspondance se ferait potentiellement assez bien avec la théorie comme modèle intelligible (science théorique, philosophie, théologie) et l’empirisme ou la pratique dans le monde physique comme monde sensible (le monde, les arts, les applications, l’expérience, la mesure…). La chôra, troisième genre intermédiaire entre le modèle et le sensible, pourrait être mise en relation à la sorte d’indétermination, de densité de probabilité, de superposition, que l’on trouve à l’échelle quantique en physique quantique. Sorte de réceptacle quantique, nébuleuse, nuage de densité de probabilité des particules et sous-particules à l’échelle quantique, mais qui les fait converger vers des images des modèles intelligibles dans le monde sensible quant on passe à l’échelle macroscopique (phénomène dit de « décohérence quantique ») ou que l’on effectue une mesure.

            Enfin, pour faire le lien avec nous-mêmes, cela pourrait correspondre à l’état de flottement qui précède une décision, ou encore à une interface entre monde physique et métaphysique.

            « Nous sommes reliés, consciemment ou non, à la source de l’être » : la chôra pourrait être mise en correspondance avec cette interface intermédiaire entre physique et métaphysique, qui nous relierait dans le Devenir du monde sensible, consciemment ou non, à la source de l’être, modèle intelligible ou métaphysique.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *