
Vous êtes une image de Dieu, c’est comme ça. (Actes 2:1-4 ; Genèse 1:25-28)
Quelle genre de personne veut-on devenir ? La Bible nous propose d’être à l’image de Dieu, nous le sommes par l’Esprit.
Texte, vidéo et poscasts de la prédication. Ceci est un témoignage personnel. N’hésitez pas à donnez votre propre avis ci-dessous.
Podcast audio de la prédication / Podcast audio du culte
(Voir le texte biblique ci-dessous)
prédication (message biblique donné au cours du culte)
à Genève, le dimanche de Pentecôte, 8 juin 2025,
par : pasteur Marc Pernot
Prédication
Quel genre de personne veux-tu être ?
Le philosophe grec du IIᵉ siècle Épictète aurait dit : « Commence par te demander quel genre de personne tu veux être ; après quoi, exerce-toi à agir selon ce modèle. »
Il y aurait deux étapes, donc. La première consiste à se donner une visée. Épictète parle de prohairesis, terme que l’on utilisait dans la vie courante pour désigner le choix de sa profession. Quand on est jeune, les adultes nous demandent souvent « qu’est-ce que tu veux faire quand tu seras grand ? » : même si l’on n’en sait rien, c’est une bonne question. C’est une part cruciale de notre liberté que de choisir ce que l’on aimerait devenir. Pour le choix d’un métier, c’est vrai, et c’est encore plus important pour le choix du type de personne que l’on aimerait devenir. Un requin ? Une personne qui pense aux autres ? Une sorte de plante verte qui se laisse vivre passivement ? Une personne qui creuse les questions du sens ?
La Bible, et particulièrement les évangiles, nous propose d’avoir comme visée : Dieu. Rien de moins : le Dieu bon, libre, fidèle et créateur de bonnes choses, source de vie et de joie. C’est une sacrée ambition, une ambition sacrée. Le Christ incarne cette visée. Le chrétien n’est pas une personne parfaite, c’est une personne qui choisit d’avoir cette visée.
« Commence par choisir quel genre de personne tu voudrais être » : nous aimerions être à l’image de Dieu, comme le Christ. Avancer dans cette direction. C’est ce que conclut l’Évangile par la bouche de Pilate, le procureur romain qui offre Jésus à la foule en disant : « Voici l’Homme ! »(Jean 19:5), « Voici l’humain véritable tel que Dieu l’espère. » C’est pour nous une visée géniale et inspirante.
Choisir de s’inspirer de la figure du Christ, c’est ce qu’Ignace de Loyola, dans ses exercices spirituels, appelle « faire élection » : comme dans une votation nous sommes appelés à choisir une personne, nous avons à choisir dans notre vie un type de façon d’être. C’est à la fois un choix théorique, mais aussi pratique, concret.
S’exercer à agir selon notre visée.
Car si le choix de notre objectif est essentiel, cela demande ensuite de nous exercer à agir concrètement à l’image du modèle que nous avons choisi, c’est le 2nd point d’Épictète. C’est vrai dans ce domaine de l’être comme pour faire de la musique, il faut choisir d’abord son instrument puis s’exercer au jour le jour.
Ce n’est pas facile de nous changer nous-mêmes, ce n’est donc pas facile de devenir un peu plus à l’image de Dieu. Comment y arriver ? C’est que Dieu n’est pas seulement pour nous un modèle, il est aussi une puissance de création à notre service (c’est ce que l’on appelle l’Esprit-Saint) : une puissance de création qui nous est donnée et que nous pouvons mobiliser en nous-mêmes : elle travaille pour nous. C’est ce que nous fêtons à la Pentecôte. Dans ce récit, l’Esprit est donné à toute personne.
Est-ce que cela nous rend instantanément parfaits ? Non. L’Esprit est comme un moteur interne qui nous aide à évoluer et de devenir ainsi un peu plus à l’image de ce Dieu bon et créateur, comme le dit le livre de la Genèse.
Seulement, le récit de la Pentecôte vous dit que, déjà aujourd’hui vous êtes à l’image de Dieu, que cela vous a déjà été donné, et que cela se déploie encore.
oOo
Notre visage porte l’image de Dieu.
Regardez-vous dans un miroir, vous voyez votre visage. L’humain est souvent déçu par son propre visage ? Cela ne devrait pas car c’est l’image de Dieu que nous voyons quand nous nous regardons dans un miroir. L’image de Dieu : cela nous dit notre infinie dignité. Cela nous dit que nous sommes une personne sacrée. Regarder notre visage devrait légitimement nous inspirer de la fierté : en ce visage que je regarde : c’est dans une certaine mesure Dieu que je vois (comme le dit Jésus, Jean 14:9) : sa Parole a été faite chair (Jean 1:12-14).
Qu’est-ce que j’observe dans ce visage qui me regarde dans le miroir ? Une tête qui pense, des yeux qui regardent et qui expriment mon sentiment, j’aperçois des oreilles pour entendre, je vois un nez pour sentir et respirer, une bouche pour sourire, pour manger et pour parler. Chacun de ces éléments me parle de Dieu, de sa bonté pour moi, pour nous, et ces caractéristiques me disent que je suis image de Dieu.
Dieu nous écoute, nous entend et nous parle. Ce visage que nous voyons dans le miroir est équipé d’origine pour écouter et communiquer. Dans la prière, c’est ce que nous faisons avec Dieu. Nous écoutons et communiquons aussi avec les autres.
Dieu nous regarde et nous voit, il nous aime : nous sommes une merveille à ses yeux. Vous êtes une merveille à ses yeux. En regardant notre visage dans le miroir nous pouvons méditer sur cette façon que Dieu a de nous regarder, et nous pourrions apprendre à nous voir nous-mêmes autrement, en profondeur, et découvrir que nous sommes une merveille, en l’état.
Dieu a une pensée propre et de bons projets pour ce monde et pour nous. En voyant notre tête dans le miroir nous voyons un organe incroyable qui nous donne d’avoir nos propres idées, nos projets, librement, pour peu que l’on se serve et que l’on exerce un petit peu cet organe incroyable qu’est notre cerveau. En voyant notre front dans le miroir, nous voyons que nous avons reçu en cadeau d’avoir cette qualité proprement divine de la pensée et de la personnalité.
Et notre nez : en plein milieu, fait pour inspirer ce souffle qui nous fait vivre. On ne peut pas voir l’air que nous respirons, on ne peut pas voir Dieu, mais nous avons autant besoin d’air que de ce souffle de Dieu que l’on appelle l’Esprit pour vivre et nous élancer dans la vie d’une belle façon. C’est cela que nous rappelle notre nez, en plein milieu de notre visage de Dieu.
Le visage de l’autre : sa splendeur et sa fragilité
Regardant notre visage, nous voyons qu’il n’est pas si différent de celui de nos semblables : deux yeux, des oreilles, une bouche, une tête. Et cette fragilité, cette vulnérabilité de notre visage, exposé, découvert.
Le grand philosophe juif Lévinas dit que le visage de l’autre est une théophanie, c’est-à-dire une manifestation de Dieu. Ce visage, dans sa vulnérabilité, nous dit « Tu ne tueras point. », comme Dieu le dit à Moïse au sommet du mont Sinaï (Exode 20:13, Deutéronome 5:17).
On peut dire que ce visage de l’autre est porteur d’une transcendance, car il y a, en chaque personne, quelque chose qui nous échappera toujours, heureusement : en toute personne, comme en Dieu. La Bible nous met en garde sur le fait de nous forger des idoles à la place de Dieu : cela vaut aussi pour mon prochain et pour moi-même, nous sommes bien plus que ce que nous ne pensons. C’est aussi une caractéristique divine de l’humain qu’il est bon de respecter.
Ensuite, bien que nous soyons chacune et chacun une image de Dieu, nous utilisons plus ou moins bien ces capacités incroyables que nous avons, bien sûr. C’est pourquoi, tout visage, le mien comme celui de l’autre, appelle à la miséricorde. Il n’est pas facile de vivre cette vocation immense qu’il y a d’être porteur de Dieu en ce monde. Et puis, les relations humaines sont complexes et tordues par notre peur.
C’est pourquoi nous avons tant besoin de l’Esprit de Dieu, de son souffle et de sa paix. Il nous les donne en abondance, chaque jour un petit peu plus. Cette paix et ce souffle nous envoient en mission en ce monde pour faire ce que nous pourrons, avec Dieu et avec tous les hommes et les femmes de bonne volonté.
Textes de la Bible
Jean 20:19-22
Jésus vint, se présenta au milieu des disciples, et leur dit : La paix soit avec vous !… Jésus leur dit de nouveau : La paix soit avec vous ! Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie. Après ces paroles, il souffla sur eux, et leur dit : Recevez le Saint-Esprit.”
Actes 2:1-4
Lorsque arriva le jour de la Pentecôte, ils étaient tous ensemble en un même lieu. 2Tout à coup, il vint du ciel un bruit comme celui d’un violent coup de vent, qui remplit toute la maison où ils étaient assis. 3Des langues leur apparurent, qui semblaient de feu et qui se séparaient les unes des autres ; il s’en posa sur chacun d’eux. 4Ils furent tous remplis d’Esprit saint et se mirent à parler en d’autres langues, selon ce que l’Esprit leur donnait d’énoncer.
Genèse 1:25-28
Dieu fit les animaux sauvages selon leurs espèces, le bétail selon son espèce, et toutes les bestioles de la terre selon leur espèce. Dieu vit que cela était bon.
26Dieu dit : Faisons les humains à notre image, selon notre ressemblance, pour qu’ils dominent sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, sur le bétail, sur toute la terre et sur toutes les bestioles qui fourmillent sur la terre. 27Dieu créa les humains à son image : il les créa à l’image de Dieu ; homme et femme il les créa. 28Dieu les bénit ; Dieu leur dit : Soyez féconds…
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Franchement là je ne voudrais pas décevoir mais si Dieu me ressemble..ça pourrait être décevant …
Je comprends. Mais je propose une façon de voir diamétralement inverse : si Dieu nous regarde et nous trouve magnifiques & attendrissants, cela nous permet d’avoir un autre regard sur nous-mêmes, non pas culpabilisé mais bienveillant, ébloui, plein de gratitude.
« Commence par te demander quel genre de personne tu veux être ; après quoi, exerce-toi à agir selon ce modèle », c’est certainement une piste mais il y a le risque non négligeable de ne pas découvrir ce genre de personne, de ne pas pouvoir se représenter positivement ce que nous voulons être. Alors, dresser une liste de ce à quoi surtout nous ne voulons pas ressembler, comme une ligne rouge à ne pas franchir, peut aussi être très utile, non ? le temps de trouver ce à quoi nous voulons vraiment ressembler. Un petit peu comme l’intuition de Socrate – son « daimon » – qui l’avertit de ne pas accomplir certaines actions qui seraient injustes mais qui se tait pour tout le reste.
Et prendre Dieu comme modèle ? Là, je trouve que cela se corse car, oui, comme vous vous le représentez, en théorie je suis d’accord : « être à l’image de Dieu » en ajoutant « comme le Christ ». Mais cela peut être très flou aussi et parfois ce Christ est « halluciné », présenté de façon complètement étrange, absurde voire dangereuse, sans questionnement. Vous êtes bien placé pour savoir que c’est le lieu de toutes les imaginations contre certaines desquelles il faut parfois lutter.
Car, par exemple, certains s’imaginent être à l’image de Dieu qui pourtant terrorisent le monde et nous font horreur – des pasteurs évangéliques américains cautionnent des massacres Bible en main avec des milliers de personnes qui applaudissent et pas au Moyen-Âge mais bien en 2025 ! Heureusement, d’autres pasteurs évangéliques prennent la parole pour justifier le cessez-le-feu en Ukraine et condamner l’attaque russe. Mais comment faire alors ?
Eh bien j’ai trouvé votre solution du miroir, via Lévinas, percutante. Retrouver dans l’homme ce qui est de Dieu et non l’inverse évite les écueils idéologiques qui risquent de faire partir la pensée à la dérive et l’action dans le chaos. Et quand il y a une relation à l’autre, celle du « visage », en dehors de toute peur, de tout jugement, il y a qch d’émouvant à s’être compris ou reconnu – je dirais bien que c’est là la Pentecôte – on en sort grandi il me semble, positivement reboosté pour affronter les vilénies du monde.
Chère Lili,
Encore une fois, merci pour votre magnifique commentaire.
1) Pourquoi pas, effectivement, chercher plus les lignes rouges à ne pas franchir, plutôt qu’une belle visée vers laquelle avancer ? Je dirais que la vie est un peu comme la roue avant d’un vélo : en fixant le nid de poule que l’on veut éviter, on a beau faire, la roue va nous mener droit dans le nid de poule. Je connais quantité de personnes qui bandent leur volonté pour éviter une mauvaise habitude qu’elles ont prise : c’est la meilleure façon de continuer à la faire, encore et encore. On ne chasse qu’en remplaçant, positivement. Me semble-t-il. Il y a une parabole de Jésus comme cela où il parle d’un démon que l’on chasse, qui va se promener, qui trouve son ancien lieu vidé, balayé et orné, et qui revient alors avec 7 copains démons (Matthieu 12:44).
2) Je suis du même avis que vous sur les figures hallucinées du Christ et de Dieu. C’est pourquoi il est tellement important de faire un peu de théologie, de déterminer quelle figure de Dieu et du Christ / prophète ou héros divin que l’on se donne. Qu’on le veuille ou non, on va évoluer (plus ou moins vite) vers cette figure. Un Dieu terrible qui élimine de son paradis les infidèles et les pécheurs ? Ses adorateurs auront furieusement tendance à se comporter de cette façon dans la vie civile et religieuse. Un Dieu de grâce qui prend soin de chacun, du juste comme du pécheur ? Ses adorateurs auront (mollement) tendance à se comporter de cette façon dans la vie civile et religieuse.
3) Je trouve effectivement Lévinas tout à fait sincère et inspirant. Selon l’habitus du judaïsme, sa foi est plutôt fondamentalement une orthopraxie, plus qu’une incarnation comme dans la foi chrétienne. Je dirais que l’un n’empêche pas l’autre et je serais tenté de conjuguer les deux. Avec ma gratitude pour vos lumières et vos messages toujours si bienveillants, entrant véritablement en dialogue. Fraternellement,
« Vous êtes une image de Dieu, c’est comme ça. »
C’est donc en quelque sorte la volonté, le plan de Dieu. Dans ce cas, on n’a pas vraiment le choix ; toute autre visée pour notre vie, du genre requin ou plante verte, nous mettra nécessairement en tension entre ce que nous choisissons d’être et ce que nous sommes en réalité. Puisque toute personne en est pourvue, le premier boulot de l’Esprit Saint est de nous en faire prendre conscience, peut-être même au jour le jour, car rien n’est définitivement acquis. Image du Dieu d’amour, la seule façon d’être heureux ?
Je suis du même avis que vous, la seule façon d’être heureux est d’aimer. Ce n’est pas une sorte de chantage, c’est simplement notre nature qui veut cela. C’est en particulier ce que signifie le fait que nous sommes créés à l’image de Dieu.