Il n’y a pas de temple dans mon village, j’ai du mal avec la messe, puis-je être une chrétienne dans ces conditions?
Question posée :
Monsieur le Pasteur,
Merci infiniment pour vos partages si éclairants !
Habitant dans un village des Hautes Vosges il n’y a malheureusement pas de temple. Je n’ai malheureusement pas eu d’éducation religieuse enfant malgré mon baptême protestant.J’ai bien essayé de me rapprocher de la paroisse catholique locale (j’avais même fait ma communion à 48 ans !) J’ai vraiment essayé de toutes mes forces de rentrer dans la famille catholique mais à chaque fois la confusion entre en moi et cela m’éloigne de la foi. Je suis restée « loin de Dieu »pendant presque trois ans en m’intéressant à d’autres spiritualités comme le bouddhisme mais cette relation si profonde avec le Christ que je pensais avoir perdu me manquait tant ! Pensez vous qu’il est possible d’être une bonne protestante même si je n’ai quasiment jamais la possibilité d’aller au temple ? Pensez vous que ma grande confusion qui me vient fasse à tous les dogmes catholiques signifie que mes origines protestantes me poussent vers cette liberté de conscience et de culte ? Lors d’une dernière messe à laquelle j’ai assisté le prêtre parlant de tous ce qui sont en dehors de l’église et pour lui iront en enfer nous a même dit « vous ne pourrez pas dire qu’on ne vous a pas prévenu ». Que c’est difficile de continuer à pratiquer face à cette façon de voir la foi.
Je vous remercie infiniment pour votre précieuse écoute et vos réponses malgré j’imagine bien, toutes les sollicitations,
Avec toute ma gratitude et mon profond respect,
Réponse d’un pasteur :
Chère Madame
Bravo pour votre recherche très complète associant réflexion et relation au Christ, avec cet attachement à votre vie intérieure qui fait que vous veillez dessus, que vous ne lâchez rien, que vous cherchez à réagir.
C’est vraiment excellent.
C’est vrai que quand on se sent en confiance avec Dieu, que l’on se sent libre et même encouragé à réfléchir par soi-même, à lire la Bible et à prier personnellement, on a du mal à redevenir un bon petit paroissien bien docile disant oui amen à ce que dit le pasteur ou le prêtre…
Cette liberté de foi qui vous est chère est excellente, elle fait partie de la visée chrétienne ou tout fidèle est appelé à être prophète ou prophétesse en ligne directe avec Dieu (Actes 2:3-4 et 2:17). C’est vrai que le protestantisme réformé a vraiment pris à cœur de donner les outils et les clefs en vue de permettre cela par des prédications et des formations ambitieuses pour les fidèles. Afin de les libérer.
Alors peut-on être bon chrétien sans paroisse à proximité et sans culte ? C’est un peu moins facile et moins sympa, mais je pense que oui. Vraiment.
L’église n’est pas un but en soi. Comme le dit Jésus pour le shabbat (le plus sacré de la religion juive) : le shabbat est fait pour l’humain et non l’humain pour le shabbat. Cela met exactement les choses à leur place : la religion, l’église, le culte sont de simples outils au service du développement de l’humain. Mais ils ne sont pas un but en soi. Le but est de se réconcilier avec Dieu en Christ : de travailler notre relation à Dieu pour qu’elle soit belle, et même meilleure, plus profonde, plus confiance, plus active en nous et portant des fruits en nous, des fruits de foi, de compassion pour les autres, des fruits d’espérance et de joie de vivre en ce monde que Dieu aime.
C’est vrai que le culte, le rassemblement à quelques uns pour travailler ensemble notre foi est précieux. Car la personne est un animal social, pas seulement un animal spirituel et pensant. Le mieux est de pouvoir « travailler » sa foi, la stimuler, la nourrir, la secouer aussi un peu afin qu’elle soit vivante : et il est bon de faire cela, si possible dans ces différentes dimensions de notre être : 1) par la prière, 2) par la réflexion, et aussi 3) avec une dimension collective.
Pour ce dernier point 3) et aussi pour le 2) c’est une chance si l’on trouve une paroisse qui nous convient et qui en plus est un peu sympathique.Mais si ce n’est pas le cas ? On n’en meurt pas et notre foi non plus. On fait au mieux.
Pour le 1), la prière est quelque chose de fondamentalement intime, comme le dit Jésus, dans sa chambre la plus reculée, porte fermée. Donc pas de problème. Si ce n’est de veiller à garder un rythme régulier;
Le 2) peut se faire très bien à distance. Il y a l’extraordinaire bibliothèque qu’est la Bible, il y a aussi des livres, des podcasts qui sont biens (d’autres moins biens, évidemment), et c’est aussi en pensant aux isolés, aux expatriés, aux sans paroisse sympa à proximité que je développe ce site. Et que je mets régulièrement des nouveautés, que je me tiens disponible autant que possible pour les questions.
En ce qui concerne le 3), une dimension collective, c’est vrai que cela manque quand il n’y a aucune possibilité. Mais ce n’est pas non plus un drame. Nous avons de toute façon des interactions avec d’autres. Et on n’est pas non plus totalement seul quand on est avec Dieu, même si ce n’est pas la même chose que de « travailler » sa foi avec quelques uns. Jésus parle de 2 ou 3 pour que cela soit bien. Peut-être que vous pourriez trouver une ou deux personnes des environs, collègues, voisins, amis, connaissance, conjoint, enfants, cousine… pour se réunir régulièrement, par exemple une fois par mois, pour discuter à partir d’un texte biblique, d’une prédication, d’un article théologique ou spirituel ? Mais sinon tant pis. Peut-être une messe de temps en temps quand c’est un prêtre à la théologie plus sous le signe de la grâce que d’un Dieu impitoyable ? Même le catéchisme de l’église catholique ne dit plus, si j’ai bien lu, que « hors de l’église, point de salut », en tout cas pas en entendant par « église » une institution. Ce catéchisme romain certifie que ceux qui sont en règle avec l’institution seront sauvé, mais que pour les autres, Dieu est assez grand pour savoir qui il veut sauver ou non. C’est un peu plus centré sur cette dimension essentielle qu’est la grâce de Dieu (son amour inconditionnel), mais il reste comme une menace qui plane sur les pécheurs. Hélas. Mais bon, chacun son style.
Bon et beau cheminement de foi, dans la confiance que Dieu nous accompagne et qu’il est déjà fondu de tendresse et de joie quand nous faisons ce que nous pouvons
par : pasteur Marc Pernot
Articles récents de la même catégorie
Articles récents avec des étiquettes similaires
Idem pour nous dans une petite ville au centre de la Catalogne. Alors comme on a découvert un petit monastère avec des sœurs très accueillantes, on y va de temps à autre.
C’est toujours mieux que les communautés pentecôtistes du coin.