Le pain de la communion - Image par Karin Hamilton
Bible

Accueil des divorcés, des homosexuels à la communion ? Qu’en dit la Bible ?

Par : pasteur Marc Pernot

Le pain de la communion - Image: 'DSC_0039' by Karin Hamilton https://creativecommons.org/licenses/by-nc/2.0/ http://www.flickr.com/photos/40212324@N07/7532995456

Question posée :

Bonjour,

Je me permets de revenir vers vous pour une question au sujet des divorcés. Comment considérez-vous les divorcés, divorcés remariés, ou les homosexuels par rapport à la possibilité d’accéder à la Communion ou au « pain béni » ? Que disent les écritures à ce sujet ?

Je serai heureuse d’avoir votre avis, c’est sans obligation….Mais j’ai parfois quelques difficultés à comprendre les écritures et certaines personnes de mon église qui jugent sans appel …. Je veux cheminer avec une certaine ouverture d’esprit. Lors d’une retraite à la communauté de Taizé avec le groupe de jeunes dont je m’occupe, j’ai rencontre une pasteur protestante et nos conversations ont été très intéressantes.

Réponse d’un pasteur :

Bonjour chère madame

Et bravo pour votre service auprès des jeunes !

Je n’ai pas d’avis sur « le pain béni » qui n’est absolument pas un rite pensable en protestantisme où nous ne bénissons que les personnes, jamais les objets. Il me semble que c’est plutôt un rite catholique qui est prévu pour accueillir quand même un petit peu ceux que l’église excommunie  (ceux qui ne sont pas assez en communion avec l’église catholique romaine selon l’avis de sa hiérarchie). Cela me semble un petit peu un « rattrapage » pour dire quelque chose comme :  oui certes, vous êtes exclus du repas, mais on va vous donner quand même un sandwich au pain (sans garniture).

Chaque église est libre de sa conception de la communauté, chacune est libre de sa façon de définir ses gestes, ses rites, ses dogmes. Chacune est libre de sa conception du ministère du Christ.

Dans le protestantisme, oui : nous invitons largement chacune et chacun à la Communion, sans restriction aucune. Pour plusieurs raison :

  • Le Christ est venu pour les pécheurs, que nous sommes tous. Et la communion est signe de ce que le Christ nous a apporté. C’est pour nous une nourriture pour les pécheurs afin de les aider à entrer plus et mieux en communion avec Dieu.
  • Ce qui fait l’église, par définition, c’est l’appel de Dieu. En effet le mot « église », ekklesia en grec, signifie littéralement « Ex » + « Kaleo » : « appelé hors de » chez lui par un appel personnel qui lui est adressé (par Dieu). Par conséquent, ce qui ma semble faire  l’église n’est pas d’abord une communauté de dogmes, ni de moralité, ni personnes ayant reçu le même rite d’initiation (comme le baptême). Toute personne qui entend cet appel et qui commence à esquisser un geste de déplacement manifeste ainsi qu’il fait partie de l’église, et est donc grandement bienvenu à la communion, qui est le reflet de notre théologie de l’église. Le pain et le vin offerts sont signe de cette parole de Dieu manifestée en Christ pour tous, même pour le plus pécheur parmi les pécheurs (Jésus parle de la plus perdue des brebis).

Par conséquent, dans le culte protestant, toute personne, même pécheresse et non baptisée, non instruite, est accueillie si elle veut prendre le pain et boire dans la coupe en signe de sa volonté de prendre et de se nourrir de tout ce que Dieu nous a donné en Christ.

  • Cela se fonde en particulier sur ces paroles du Christ disant qu’il est venu pour les pécheurs et non pour les justes, pour les souffrants et non pour les bien portants
  • Cela se fonde aussi sur ce geste du Christ donnant de sa propre main le pain à Judas, et en conscience que celui-ci avait déjà dans le cœur de le trahir.
  • Cela se fonde encore sur le symbole même de ce pain qu’est le Christ, donné pour que nous ayons la vie, que nous ressuscitions, ce pain est destiné à ceux qui ont besoin du salut, besoin de force et de résurrection, besoin de pardon, non pour les purs, les déjà pardonnés, les déjà forts… ceux-ci feraient mieux d’aller servir leur prochain que d’encore rester au banquet de la grâce alors qu’ils sont déjà repus.
  • Cela se fonde sur cette parole « Dieu ne met pas dehors celui qui vient à lui ». Mais quand bien même ce ne serait pas le cas, ce ne serait à nul homme de juger son frère et de l’exclure s’il se trouvait que, pour une raison qui n’appartient qu’à lui, il prenait à Dieu l’envie de l’accueillir.

Le geste de prendre le pain est important, comme l’indique la parole du Christ « prenez et mangez », ce geste de prendre le pain est une profession de foi, reste alors à le manger, faire un travail d’assimilation qui consiste à intérioriser ce qu’offre le Christ, ce qu’il est, le mâcher, le ruminer, le déconstruire et l’assimiler dans notre être même. La foi en Christ n’est donc pas un formatage, elle est une nourriture pour nous donner la pleine forme de notre être. Et en même temps, la force de se convertir et de devenir un petit peu plus cohérent avec ce que Dieu espère, cela est un fruit de cette nourriture, cela ne peut pas être un prérequis.

Dans cette phrase « prenez et mangez, ceci est mon corps », le « ceci est mon corps » peut effectivement être compris comme disant que le pain et le vin matériels sont le corps du Christ, ce qui est un peu curieux à mon avis, particulièrement quand c’est Jésus en chair et en os qui dit cette phrase, tendant un bout de pain et non un morceau de sa cuisse à manger. Mais nous lisons cette phrase non comme disant « ceci (le pain) est mon corps, prenez-le et mangez-le » mais dans l’autre sens « prenez et mangez (ce pain) », et le résultat de ceci, du fait de le prendre et le manger ensemble en mémoire du Christ, le résultat est le corps du Christ constitué de ces hommes et femmes unis dans la communion avec le Christ vivant. Il est alors présent dans ce corps mystique qu’est la communion de ceux qui espèrent en lui, et ont été nourris de lui. Là encore, la communauté est un fruit d’un appel et d’une guérison individuelle. La communauté de dogme, de morale et de rites n’est pas un préalable.

Donc nous accueillons avec joie les pécheurs à la communion. Même un brigand ou un blasphémateur ne mériterait pas qu’on le repousse, au contraire, comme Judas nous devrions l’accueillir avec encore plus de prévenance et de joie.

Cela s’applique évidemment sans l’ombre d’un doute aux personnes dont la vie a été plus compliquée que le parcours idéal du bon petit chrétien accompli selon le schéma de base. Aux personnes vivant en couple sans être mariées, aux divorcés remariés, aux célibataires avec enfant, aux célibataires tout court, à ceux qui ont un parcours de foi complexe mêlant un peu de toutes les philosophies et religions…

Mais je ne mettrais pas l’homosexualité comme une question de morale, puisque ce n’est en grande majorité pas un choix mais un état comme d’avoir les yeux bleus ou marrons. Ce n’est donc pas un péché. Et pour toute personne, homo ou hétéro, la question est de vivre dans le respect de l’autre, dans la fidélité, dans l’engagement, dans la construction et non dans l’éparpillement.

Avec mes amitiés fraternelles

Dieu vous bénisse et vous accompagne

par : Marc Pernot, pasteur à Genève

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