Que pouvez-vous me dire sur ce passage « Qui mange le pain ou boit la coupe du Seigneur indignement… » (1 Corinthiens 11:27-32) ?
Question posée :
Bonjour cher Pasteur,
Que pouvez-vous me dire sur ce passage de 1 Co 11 v 27 à 32 ? Pour lequel je n’ai jamais entendu le moindre commentaire !
Merci !
Fraternellement
André
Réponse d’un pasteur :
Cher André,
Bravo de creuser la Bible et de chercher.
Une interprétation est toujours un témoignage. Il y a quelque chose du texte d’origine et il y a quelque chose de la personne qui lit le texte à un moment donné. C’est cela qui est passionnant dans la Bible : en la lisant, nous nous lisons aussi, en particulier quand nous le faisons dans l’espérance que Dieu nous apportera ce dont il pense que nous avons besoin aujourd’hui.
C’est pourquoi les quelques pistes que je vous propose ne sont que des propositions.
1 Corinthiens 11
27Celui qui mange le pain ou boit la coupe du Seigneur indignement sera coupable envers le corps et le sang du Seigneur. 28Que chacun s’examine plutôt lui-même, et qu’ainsi il mange du pain et boive de la coupe ; 29car celui qui mange et boit sans discerner le corps mange et boit un jugement contre lui-même. 3cC’est pour cela qu’il y a parmi vous beaucoup de malades et d’infirmes, et qu’un assez grand nombre se sont endormis dans la mort. 31Si nous nous jugions nous-mêmes, nous ne serions pas jugés. 32 Mais par ses jugements, le Seigneur nous corrige, afin que nous ne soyons pas condamnés avec le monde.
Je me souviens d’une personne âgée que j’ai rencontrée et qui n’avait pas osé communier depuis plus de 80 ans à cause de ce verset qu’elle avait entendu dire quand elle était petite par le pasteur en invitant les fidèles à communier pendant le culte. Cela l’avait remplie de crainte d’être grillée ou seulement condamnée, ne se sentant justement « pas digne ». La pauvre, quel traumatisme tout à fait injuste. Quelle théologie a été enseignée ? C’est à mon avis exactement un anti-évangile, car l’Évangile du Christ est bonne nouvelle pour tous, et en particulier pour les pécheurs, tout particulièrement pour celles et ceux qui se sentent indignes. Pour moi, l’invitation à participer à la communion est mieux exprimée par ces versets où Dieu nous dit, en Christ :
- « Je ne mettrai pas dehors celui qui vient à moi » (Jean 6:37),
- « Voici, je me tiens à la porte, et je frappe : si quelqu’un entend ma voix, et m’ouvre la porte, j’entrerai chez lui, je souperai avec lui, et lui avec moi. » (Apocalypse 3:20)
Au pire, on peut oser dire, comme le centurion qui, lui aussi, ne se sent pas digne de recevoir Jésus :
- « Seigneur, je ne suis pas digne de te recevoir, mais dis seulement une parole et je serai guéri. » (Luc 7:7)
Donc cette parole de Paul a fait bien des ravages dans les cœurs.
Faut-il pour autant l’écarter purement et simplement ? Ce n’est bien entendu pas interdit, mais avant cela, il serait pas mal de chercher si ces versets peuvent nous dire quelque chose de bon. Donc, bravo de chercher une autre façon de les interpréter qui soit compatible avec le fait que rien ne peut venir de dieu que du bien.
« Manger le pain ou boire la coupe du Seigneur indignement » ?
- C’est un peu mystérieux. Apparemment, il y avait ce problème du temps de Paul : la Communion était plus comme un vrai repas de paroisse bien arrosé. C’est en soi sympathique, associant la recherche de communion avec Dieu et la joie de vivre en ce monde les uns avec les autres. Mais il y en avait qui mangeaient tout le repas et buvaient tout le vin avant que les autres paroissiens arrivent (probablement les ouvriers et manœuvres qui travaillaient tard).
- Que serait « manger le pain et boire la coupe du Seigneur dignement » ? « Digne », cela signifie « avoir du poids », que cela influe sur notre façon d’être concrète : que cela nous améliore, nous élève dans notre foi et notre façon d’être concrète. Si l’on reste complètement égoïste : n’y a-t-il pas un problème de cohérence ? Est-ce qu’on a bien saisi de quoi il est question ? Un acte religieux n’est pas magique, qui aurait son efficacité en lui-même ; il est un exercice en vue de nous aider à avancer.
Du coup, cela ne « marche » que si « chacun s’examine plutôt lui-même, et qu’ainsi il mange du pain et boive de la coupe » : dans cette idée d’être amélioré, grandi dans cet exercice, assimilant quelque chose du Christ dans l’opération : son commandement d’aimer les autres, et d’aimer Dieu. Une façon d’être qui respecte et qui vient au secours des autres, comme Dieu l’espère de nous, plutôt que de vivre en ne pensant qu’à nous-mêmes.
- Mais si l’on pratique un exercice religieux, quel qu’il soit, sans s’impliquer personnellement, c’est comme de la superstition : on espère que cela nous porte chance ? C’est complètement à contre emploi : non seulement nous n’avons aucune chance de nous améliorer nous-mêmes à l’occasion de cet acte religieux, ce n’est pas que Dieu nous en voudrait !!! Dieu est amour et il continuera à nous aimer même quand nous serions ses ennemis, nous dit Jésus. Mais c’est nous-mêmes qui avons un problème. C’est comme si nous arrêtions de respirer : nous étouffons, c’est une conséquence toute directe, ce n’est pas Dieu qui nous punit.
- Et si nous comptons que l’acte religieux nous porte chance dans la vie : on passe à côté des véritables leviers qui pourraient effectivement améliorer notre vie en ce monde. Si je pense que pour être en bonne santé il faut faire des incantations, je continuerai à manger n’importe quoi et à ne pas faire d’exercices, continuerai à prendre des risques en faisant n’importe quoi. Et à cause de ma superstition religieuse, j’ai plus de chance de tomber malade et d’avoir des accidents. Mais ce n’est absolument pas parce que Dieu nous punirait, nous voudrait du mal, bien sûr : Dieu est le Dieu de la vie, pas de la maladie et de la mort.
C’est donc à nous de nous « juger nous-mêmes« , pas de juger les autres, mais nous-mêmes, afin de sentir si nous cheminons, si nous progressons dans cette direction qu’incarne le Christ : si nous sommes plus ouverts avec Dieu et avec les autres, si nous aimons plus, respectons plus, pensons plus aux autres avec plus de bienveillance ? Si notre foi, c’est-à-dire notre confiance en Dieu, se renforce ? Si notre espérance dans son aide pour nous aider à avancer s’affermit chaque jour ? Notre conscience s’approfondit ? Notre intelligence de la vie s’éclaire ? Si nous sentons moins les autres autour de nous comme des ennemis, mais comme des personnes à découvrir et à aimer ?
Mais si nous n’avons aucun désir d’avancer, nous n’avancerons que peu.
V. 30 « C’est pour cela qu’il y a parmi vous beaucoup de malades et d’infirmes, et qu’un assez grand nombre se sont endormis dans la mort » = ce n’est pas à comprendre comme si Dieu nous punissait, mais c’est comme avec l’école : si un enfant n’y va pas, ou s’il y va mais n’écoute rien, n’apprends pas et ne fait pas ses exercices : s’il reste illettré et inculte : ce n’est pas une punition de la part de l’instituteur. A ce stade il n’y peut pas grand chose, il ne peut pas apprendre la leçon à la place de l’enfant, et il ne peut pas entrer dans sa tête de force. Cette expression « parmi vous » peut aussi se traduire par « en vous », c’est les deux : chaque personne qui pratique des actes religieux d’une façon superficielle, et chaque société qui abandonne la foi : cela présente un manque de croissance spirituelle, un endormissement de la foi. C’est très concret.
C’est en réalité très pragmatique, ce message de l’apôtre Paul. Très simple et direct. Et finalement de bon conseil. Il nous rend responsable de nous-mêmes. Notre façon de vivre et d’espérer a des conséquences directes. Comment en serait-il autrement ? Et c’est là-dessus que le Christ attire notre attention quand il nous conseille de changer de mentalité (parfois traduit par « convertissez-vous » ou « repentez-vous »). Il nous conseille aussi : « Veillez et priez, afin que vous ne tombiez pas dans la tentation ; l’esprit est bien disposé, mais la chair est faible. » (Matthieu 26:41) : veillez et ouvrez-vous à l’Esprit, ce souffle de Dieu en nous qui nous aide à évoluer dans le bon sens. C’est à cela que sert l’acte religieux, la communion, le culte, la prière : à nous ouvrir à cette action de Dieu poursuivant notre création, notre évolution ; il nous élève.
Dieu nous est ainsi en aide. Il nous bénit et nous accompagne.
par : pasteur Marc Pernot
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Le danger de la lecture littérale.
Il est quand même nécessaire d’apprendre à réfléchir les textes, ils n’ont rien à voir avec la vie chaotique du monde
Le problème majeur est de ne pas l’interpréter dans son contexte historique, local et donc de lui faire dire ce qu’il ne dit pas
Oui, en même temps ces textes ont été écrits et nous ont été transmis pour que chaque génération l’interprète dans son propre contexte librement, par le souffle de l’Esprit. Et ainsi que le texte ancien, écrit dans un contexte pour des destinataires précis deviennent Parole vivante de Dieu pour nous aujourd’hui. La lecture « historico-critique » n’est qu’une première étape, préparant ensuite le lecteur à une « lectio divina ».
Si la bible était un conte de fées elle n apporterait rien. la réalité du monde adulte est à connaître et reconnaître . parfois l’enrichissement intérieur est plus surprenant et soutient plus car basé sur une réalité qu on ne nie ni n’efface…
Et si on écoutait dans l islam quelque chose qui nous profite?reconnaître la présence de Dieu? le prier? il répond si souvent .et ne pas jeter de la Bible ce qui nous paraît pas bien mais réfléchir plus avant de jeter la parole de Dieu? Élie s est trompé en condamnant les prophètes de baal (comme Cain..????) Mais ensuite Dieu lui a parlé dans une petite brise devant la grotte..jésus est comme ça un message ?
Tous les Islams ne sont pas géniaux, tous les christianismes, ni tous les judaïsmes ne sont pas géniaux. Mais un grand oui pour respecter les musulmans, les juifs et les catholiques dans leur foi quand elle est ouverte et respectueuse des autres. Je suis bien d’accord et cela crée un union entre les croyants sincères, ouverts et respectueux.
Le problème d’Élie est de massacrer littéralement les prêtres d’une autre religion. C’est cela, le problème.
Le verset 30 beaucoup sont malades et infirmes et beaucoup sont morts ou ce sont endormis dans la mort selon la NBS a prendre au sens propre ?
V. 30 « C’est pour cela qu’il y a parmi vous beaucoup de malades et d’infirmes, et qu’un assez grand nombre se sont endormis dans la mort » = ce n’est pas à comprendre comme si Dieu nous punissait, mais c’est comme avec l’école : si un enfant n’y va pas, ou s’il y va mais n’écoute rien, n’apprends pas et ne fait pas ses exercices : s’il reste illettré et inculte : ce n’est pas une punition de la part de l’instituteur. A ce stade il n’y peut pas grand chose, il ne peut pas apprendre la leçon à la place de l’enfant, et il ne peut pas entrer dans sa tête de force. Cette expression « parmi vous » peut aussi se traduire par « en vous », c’est les deux : chaque personne qui pratique des actes religieux d’une façon superficielle, et chaque société qui abandonne la foi : cela présente un manque de croissance spirituelle, un endormissement de la foi. C’est très concret, au sens propre (spirituel)