Fresque dans la grotte de Paul et Thècle à Ephèse - Wikicommons
Prédication

Comment cheminer dans la vie ? (Paul, Lydie et la Pythonisse, Actes 16:5-19)

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(Voir le texte biblique ci-dessous)

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prédication (message biblique donné au cours du culte)
à Genève, le dimanche 29 janvier 2023,
par : pasteur Marc Pernot

Fresque dans la grotte de Paul et Thècle à Ephèse - Wikicommons
Par trois fois, Paul et son équipe ont un projet précis de développement de nouvelles implantations et ils sont conduits à faire évoluer leur projet. Manifestement, cela porte ses fruits, en terme de rayonnement mais aussi dans l’approfondissement de la foi des personnes.

Ce récit prend la peine de développer les orientations et les réorientations de Paul. Qu’est-ce que cela nous propose pour cheminer dans notre existence ?

Faire des projets en équipe, avec souplesse

D’abord : faire des projets. Paul est rejoint par des collaborateurs avec qui il négocie parfois âprement l’orientation des projets qu’ils forment. Ce passage du livre des « Actes des apôtres » est d’ailleurs touchant car l’auteur de ce livre se met à parler à la première personne du pluriel dans ce récit : « Nous avons alors immédiatement cherché à partir pour la Madédoine » (16:10) dit Luc, qui a donc rejoint l’équipe et qui a participé à faire évoluer le projet.

Au souffle de l’Esprit

En même temps Paul reste prêt à changer ses plans au souffle de l’inspiration divine. Ce n’est pas évident quand on a formé un joli projet, qu’on l’a élaboré en équipe. Paul a peut-être déjà annoncé sa venu et il change d’avis pour une raison non explicable : l’Esprit Saint l’aurait envoyé ailleurs ?!

Cela nous montre comment Paul chemine dans son existence : il forme des projets en équipe avec intelligence, et il présente ensuite ces projets dans la prière, encore et encore, restant souple, restant disponible pour les faire évoluer ou pour les changer complètement, au souffle de l’Esprit. Paul est ainsi un entrepreneur et un manager, il est aussi un prophète. Il est réfléchit et il prie.

C’est ainsi qu’en songe ou en prière, il lui vient l’idée qu’un homme l’appelle au secours des macédoniens. (16:9) L’équipe formée par Paul, Silas et Luc ne perd pas une seconde, « immédiatement, ils cherchent » à réaliser ce nouveau projet. Après s’être effacé devant le prophète, l’entrepreneur qui est en Paul reprend alors la main pour l’organisation pratique du projet remanié. C’est une collaboration main dans la main entre la réflexion et la foi : une intelligence pour faire des projets, l’inspiration venue de Dieu pour les faire évoluer, et l’intelligence pratique, l’organisation pour les mettre en œuvre.

Avec un discernement spirituel modeste et souple

Mais était-ce vraiment Dieu qui lui a parlé dans ce songe ? Le récit de Luc est nuancé. Il dit : « nous en avons déduit que Dieu nous avait appelé à annoncer la Bonne Nouvelle aux Macédoniens. »(16:10). Ils présentent cela comme une déduction, ce qui montre à la fois une écoute de ce que Dieu pourrait vouloir leur souffler comme piste, et une humilité respectueuse de Dieu. Il leur semble que cela vient de Dieu mais ils n’ont pas reçu de Dieu une table en pierre gravée de son doigt et signée de son nom. Là encore il y a l’intelligence et la foi qui travaillent la main dans la main : après y avoir réfléchi, ils pensent que cette idée leur vient de Dieu tout en sachant que c’est une déduction de leur part d’attribuer à Dieu cette réorientation de leur projet. C’est exactement cela. Ils ont l’intelligence modeste et prête à changer ses plans, ils ont aussi l’inspiration prophétique modeste, ne prenant pas la première idée qui leur semble venir de Dieu comme étant certainement une pure révélation de Dieu lui-même.

C’est sage, et c’est un vrai respect pour Dieu. Bien des voix s’expriment au fond de notre être. Il y a l’Esprit de Dieu qui souffle en toute personne (même si elle ne l’appelle pas comme ça). Il y a aussi nos émotions, parfois géniales (pas toujours) : peut-être est-ce la compassion qui a fait frémir les entrailles de Paul pour aller en Macédoine, c’est comme cela que l’on pourrait aussi interpréter sa vision. Et puis : bien d’autres voix s’expriment au fond de notre être : le désir, la peur, la soif d’être vivant et reconnu, nos blessures anciennes plus ou moins graves, et des traces de notre bonheur, l’envie de faire du bien. Tout cela bruisse au fond de notre conscience.

Être ouvert au souffle prophétique est essentiel, mais avec aussi un discernement spirituel qui n’affirme pas détenir la pure révélation de Dieu, comme le font souvent les faux-prophètes. C’est nous qui discernons que Dieu nous appellerait en Macédoine, dit Luc. D’un côté, cela va s’avérer exact puisqu’en allant là-bas ils vont effectivement fonder une belle église dans la ville de Philippe (la qualité des fruits révèle la qualité de l’arbre, comme dit Jésus Mt 7:18). D’un autre côté, heureusement qu’ils gardent une modestie dans leur discernement spirituel puisque la vision leur avait suggéré explicitement l’appel d’un homme mâle, et qu’arrivé à destination ce sont des femmes et uniquement des femmes qui ouvriront les portes de la Macédoine à l’Évangile. En particulier Lydie, qui avait un commerce dans le secteur du luxe ultime (la somptueuse pourpre).

L’observation, le recueil d’informations, l’ouverture

Dans ce cheminement de Paul : l’intelligence et le discernement spirituel on déjà été sources de bons projets et de souplesse. À ces deux forces vient s’ajouter ici une troisième composante essentielle. C’est l’observation, c’est le recueil d’informations. Paul, Silas et Luc découvrent cette ville qu’ils ne connaissent pas, ils prennent plusieurs jours pour se renseigner et ils apprennent qu’il y aurait peut-être un lieu de prière juive au bord de telle rivière.

Fondamentalement, l’Évangile du Christ est une incarnation de la Parole de Dieu nous dit l’Évangile selon Jean. Le projet de Dieu, son espérance viennent insuffler la vie dans la pâte de ce monde, dans nos vies, dans notre société. Cette incarnation de la Parole de Dieu n’est possible qu’en tenant compte de ce monde tel qu’il est. En aimant ce monde. L’intelligence et le souffle prophétique sont des moteurs, ils forment une dynamique pour ce monde. Encore faut-il connaître ce monde. C’est pourquoi nous ne pouvons pas bouder ce monde où nous sommes. C’est pourquoi nous sommes appelés comme Luc et Paul ici à suivre les informations venant de ce monde, avec un large spectre, avec ouverture, sans préjugés, sans dégoût, sans mépris, avec bienveillance et souplesse.

Cela a été sans doute une surprise pour l’apôtre Paul : il s’attendait à une synagogue de juifs mâles, avec leurs barbes et leur kippas, ils trouvent une réunion de prières de femmes appartenant à la catégorie des « craignant Dieu », c’est à dire de personnes s’intéressant à la théologie et à la spiritualité biblique sans pour autant suivre les règles religieuses juives. Contrairement à ce que l’on pense parfois, Paul n’avait pas de problème pour collaborer avec des femmes et même à ce qu’elles aient une place prééminente comme ici où Lydie devient la principale de l’église, Paul se laisse même imposer par Lydie de venir s’installer dans sa maison avec son équipe.

L’intérêt pour ce monde, l’observation, l’information est la troisième source permettant à Paul d’avancer avec souplesse. Lydie fait également preuve des ces qualités mises ici en valeur. Elle s’ouvre à cette nouveauté qu’apportent cette étrange équipe : Paul à la fois théologien juif et philosophe grec, Silas le romain, et Luc ce médecin grec. Lydie aussi avance avec intelligence, elle aussi prie et s’intéresse à Dieu, il va ouvrir son cœur et elle pourra recevoir l’information nouvelle qui lui vient par Paul. Elle forme alors des projets, et elle sera vite une bénédiction pour ceux de sa maisonnée, puis pour la fondation d’une église bien vivante.

À ces trois forces faut-il ajouter la théologie ?

C’est possible, car Dieu va aider Lydie à avancer par l’écoute des paroles de Paul, que nous savons très théologiques et philosophiques. Dans le sens inverse, l’autre femme forte de ce récit, la servante pythonisse, a une bonne théologie mais néanmoins cela va conduire à la catastrophe. Pourtant ce qu’elle dit est bien : « Voici des hommes, des serviteurs du Dieu Très-Haut, ils vous annoncent la voie du salut. »

Quel est le problème avec cette Pythonisse par rapport à Lydie ou Paul ? Elle est, comme eux, ouverte à la nouveauté qu’elle sait reconnaître en Paul. Elle aussi fait preuve d’intelligence et de détermination. Elle monte un projet et enseigne de belles choses comme Paul. Elle donne des directives aux gens comme Lydie qui oblige Paul et son équipe à déménager. Elle sait aussi être au service d’autres (c’est son métier). Elle produit des richesses comme Lydie avec son commerce de luxe. Objectivement, il n’y a pas de différences flagrantes entre ce que fait la servante pythonisse et Lydie, ou Paul.

La différence se voit dans ce que leurs actions produisent. Celles de Lydie ou de Paul font que la foi grandit et se renforce autour d’eux(16:5 et 15), alors que le discours de la Pythonisse ne développe rien de bon. Là encore, on reconnaît la qualité de l’arbre à ses fruits, comme le dit Jésus. Ce n’est pas que la jeune servante soit mauvaise, ni son comportement, ni sa théologie. Paul ne la chasse pas, c’est son « esprit de python » qu’il chasse. Cet esprit est comme le serpent-python de la Genèse qui pousse Adam et Ève à se prendre pour dieu à la place de Dieu. Ce serpent de la Genèse parle bien, lui aussi, seulement : ses paroles ne produisent pas de la vie mais de la mort. Ce n’est pas rare, hélas. Bien de belles paroles dogmatiques, moralistes, idéologiques, paroles brutales produisent de la détresse et de la mort. Alors que ce qui est inspiré par l’Esprit de Dieu ou par l’amour manifesté en Christ, cela produit de la vie, de la paix, fait grandir la foi, lui donne du souffle.

Si je n’ai pas l’amour, je ne suis rien

C’est ainsi qu’à l’intelligence, la foi, l’adaptabilité de Paul, sa bonne théologie, il convient d’ajouter l’indispensable : cette qualité d’amour qu’est Dieu et que le Christ nous a fait connaître (1 Corinthiens 13).

pasteur Marc Pernot

PS. Si vous désirez, vous trouverez ici la prédication sur la suite de ce texte, Paul est toujours dans la ville de Philippes, il est arrêté et subit un tremblement de terre.

Textes de la Bible

Actes 16:5-19

5 Les Églises devenaient plus fortes dans la foi et croissaient en nombre chaque jour.

Paul et Silas traversèrent la Phrygie et la région de Galacie car le Saint Esprit les avait empêchés d’annoncer la Parole en Asie. Arrivés aux limites de la Mysie, ils tentèrent de gagner la Bithynie, mais l’Esprit de Jésus ne le leur permit pas. 8Après leur traversée de la Mysie ils descendirent à Troas. Une nuit, Paul eut une vision : un Macédonien lui apparut, debout en prière et lui disant : « Passe en Macédoine à notre secours ! » 10 À la suite de cette vision de Paul, nous avons immédiatement cherché à partir pour la Macédoine, en déduisant que Dieu nous avait appelé à leur annoncer la Bonne Nouvelle. 11 Prenant la mer à Troas, nous avons mis le cap directement sur Samothrace, et le lendemain sur Néapolis, 12 et de là à Philippes, ville principale du district de Macédoine et colonie romaine.

Nous étions depuis quelques jours dans cette ville. 13 Le jour du sabbat, nous en sommes sorti par la porte, pour aller au bord d’une rivière où pensions qu’il y avait un lieu de prière. Nous nous sommes assis et nous avons parlé aux femmes qui étaient assemblées. 14 Une des femmes, du nom de Lydie, était une marchande de pourpre originaire de la ville de Thyatire qui (sans être juive) s’intéressait à Dieu. Elle écoutait car le Seigneur avait ouvert son cœur pour s’attacher à ce que Paul disait. 15 Quand elle fut baptisée, elle et sa maisonnée, elle fit cette demande : Si vous estimez que j’ai foi au Seigneur, entrez et demeurez dans ma maison. Et elle nous y a forcés.

16 Un jour que nous nous rendions au lieu de la prière, une jeune servante qui avait un esprit de Python vint à notre rencontre – elle procurait de gros gains à ses maîtres avec ses oracles. 17 Elle nous suivait, Paul et nous, en criant : Ces hommes sont les serviteurs du Dieu Très-Haut ; ils vous annoncent la voie du salut. 18 Elle fit comme cela pendant de nombreux jours. Excédé, Paul se retourna et dit à l’esprit : Au nom de Jésus Christ, je t’ordonne de sortir d’elle ! » Et, à l’instant même, l’esprit sortit. 19 Ses maîtres, qui voyaient s’enfuir l’espoir de leurs gains, mirent la main sur Paul et Silas, et les traînèrent jusqu’à la place publique devant les magistrats.

(cf. Traduction TOB)

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3 Commentaires

  1. Simplicius dit :

    Merci pour cette prédication !

    Mais je ne suis pas entièrement d’accord, la Pythonisse agit par intérêt mercantile et par dépendance hiérarchique envers ceux qui l’exploite financièrement. Cela ne me paraît pas si intéressant, il ne s’agit pas d’une compréhension personnelle désintéressée sur les plans financier, de pouvoir, social, de reconnaissance interpersonnelle… Ensuite je doute fort que l’Esprit Saint communique des inspirations du type de celle racontée ici. Cela relèverait d’un miracle entre métaphysique et Univers physique.

    Le vrai problème c’est quand, indépendamment de tout enjeu économique ou social, des personnes expriment des croyances sans filtres. Mais là nous sommes tous constamment soumis à de tels énoncés, y compris en lisant la Bible sauf à partir du principe que tous les versets sont littéralement vrais, ce qui me paraît dangereux, où dans n’importe quelle Église, et encore plus si l’on assiste à un culte ou une messe hors de sa paroisse habituelle, par exemple lors d’un voyage, ou de la messe de Noël… Je pense qu’il vaut mieux apprendre à laisser couler les énoncés quand ils sont sans intéreêt pour nous après réflexion. Mais s’ils nous font souffrir d’une manière ou d’une autre alors qu’ils sont exprimés sans chercher à blesser, juste comme expressions de foi, croyance, ou résultat d’un raisonnement « probabiliste, recherchant ce qui serait le plus plausible, c’est peut-être aussi le signe que l’on y perçoit quelque chose de non résolu en nous-même par rapport à un élément de croyance un peu disruptif, qui sort de sons système théologique et philosophique habituel. Discuter de façon ouverte c’est accepter ce genre de risques, accepter d’écouter des point de vue divergent, qui paraissent impertinents tellement ils sont divergents, mais qui pourtant ne sont que le résultat d’une réflexion sincère. Il me semble qu’on peut juste essayer d’amortir un peu les chocs par un narratif plus doux, lors de l’expression de croyances par soi-même, et lors de la réception de croyances exposées. Il est aussi possible de se mettre des oeillères au sens figuré pour voir son chemin sans voir trop d’éléments de réalité plus perturbant. Mais un résultat possible de la pensée théologique par soi-même, au sens du protestantisme, puis au sens du philosophe Emmanuel Kant (Qu’est-ce que les Lumières ?), cela peut précisément être une certaine créativité en matière de croyances, et une entrée en dialogue un peu disruptive par rapport aux différents consensus de croyances préalables, même pour des paroisses libérales. Même, ou peut-être surtout, en recherchant le maximum de cohérence interne à chaque instant, après elle n’est que partiellement atteinte bien sûr, et il y a et il y aura toujours de nombreux points à continuer de faire évoluer, à améliorer… comme en sciences.

    Ensuite l’Amour (Agapé en grec) n’est-il pas une perfection divine, comme la Bonté : seul Dieu est bon (comme selon Jésus en Marc 10:18), on peut sans doute extrapoler en disant que seul Dieu est Amour…
    Donc en combinant au (demi) verset de la prédication de Paul en 1-Corinthiens 13:2 « quand j’aurais même toute la foi qui transporte des montagnes, si je n’ai pas l’Amour, je ne suis rien », le syllogisme conduit à conclure : personne n’a l’Amour, personne n’est rien, tout le monde est poussière (pour rejoindre le Qohéleth). Ce verset de Paul fait exprès d’être excessif. Mais personnellement je prefère extraire de 1-Corithiens 13 un Évangile qui décrit ce qu’est l’Amour selon Paul, et surtout remplacer 1-Corinthiens 13:2 par 1-Corinthiens 13:1, le verset précédent, moins agressif, plus empreint d’un peu d’Amour (?).

    Voici ce que cela donne par exemple (recherche d’un Évangile dans 1-Corinthiens 13, ce que j’en retire, personnellement, à titre d’exemple) :
    XIII.1. Quand je parlerais les langues des humains et des anges, si je n’ai pas l’amour, je suis une pièce de bronze qui résonne ou une cymbale qui retentit. 4. L’amour est patient, l’amour est bon, il n’a pas de passion jalouse ; l’amour ne se vante pas, il ne se gonfle pas d’orgueil, 5. il ne fait rien d’inconvenant, il ne cherche pas son propre intérêt, il ne s’irrite pas, il ne tient pas compte du mal ; 6. il ne se réjouit pas de l’injustice, mais il se réjouit avec la vérité. 13. Or maintenant trois choses demeurent : la foi, l’espérance, l’amour ; mais c’est l’amour qui est le plus grand.

    Mais il est vrai que par exemple Galilée lui-même aurait sans doute énormément gagné à s’inspirer un peu plus de ceci lors de sa « médiation scientifique » avec les autorités ecclésiales de son époque, et le monde entier aussi. Mais sur le fond il avait raison peut-être à 99,5%. Même en étant désagrable et en chamboulant les croyances des responsables religieux de l’époque, il avait raison sur le fond concernant par exemple la rotation des satellites de Jupiter autour de Jupiter, et non autour de la Terre comme cela était crû par défaut à l’époque. Mais cela n’a été compris que progressivement, sur plusieurs siècles, jusqu’à sa réhabilitation par les héritiers de ceux-là même qui l’avait condamné, et aujourd’hui l’Église catholique est elle-même active dans le domaine de la recherche en astrophysique, avec au moins un observatoire astronomique tenu par des religieux aux États-Unis… (!). Georges Lemaître, celui qui a émis l’hypothèse du Big Bang, était d’ailleurs un prêtre catholique, et un chercheur en astrophysique.

    Et Jésus ? Et les prophètes de l’Ancien Testament (Jérémie…) ? N’ont-ils pas chamboulé bien des croyances établies ? Jésus n’a-t-il pas chassé les vendeurs du Temple ? Un peu ce que fait Paul ici avec la Phytonisse. N’est-ce pas d’une manière ou d’une autre manquer de respect aux croyances « vides » ou non, des vendeurs ? Pourtant il a sans doute eu raison, peut-être aurait-il pu juste essayer de procéder de façon plus douce … ? Ou quand un des Évangiles fait dire à Jésus que « avec un peu de foi vous pourriez dire à cette montagne (la montagne du Temple de Jérusalem) de se jetter dans la mer » : n’est-ce pas irrévérancieux pour les Juifs ? Ou encore dans l’Évangile de Jean, quand Jésus dit à ses auditeurs pharisiens qu’il leur faudrait le manger chair et sang de façon symbolique, alors qu’ils ont l’interdit de manger du sang selon le livre du Lévitique… Pas très réaliste du coup une partie de ce passage de Jean 6 il me semble.

    Enfin, et surtout, Paul lui-même a-t-il toujours appliqué ce type de principe ? Est-ce que du point de vue des Juifs, certains éléments de la théologie paulinienne ne seraient pas agressifs : « Loi de mort », ou un fort risque d’interprétation blessante du pssage sur Hagar et Sara en Galates 4:21-31, figures des deux alliances : allégorie de l’alliance de la Loi pour l’esclavage…, sous-entendu d’un possible déshéritage, expropriation… Et certains auteurs théologiens de religion juive contemporaine font aujourd’hui ce type de reproches à certains passages de la théologie de Paul…
    C’est certainement un point d’attention majeur pour le dialogue judéo-chrétien, en parallèle des amalgames dans l’Évangile de Jean sur « les Juifs »…, au lieu de certains pharisiens, certains responsables du Temple…, ce qui indique qu’au moment de la rédaction, la communauté johannique s’était séparée de la communauté juive, donc sans doute pas mal après la destruction du Temple de Jérusalem en 70.

    1. Marc Pernot dit :

      Je ne vois pas d’indice dans le texte que la servante ferait de la publicité pour Paul « par intérêt mercantile et par dépendance hiérarchique ». Quand elle vend ses oracles, oui. Mais là, précisément, ce n’est pas marqué. Mais bon, les textes nous sont donnés pour qu’on les interprète librement, en fonction de ce qui nous préoccupe personnellement aussi.
      Bravo pour vos recherches.

      1. Simplicius dit :

        Merci. Et merci d’avoir attiré mon attention sur ce passage.

        ça ne me préoccupe pas personnellement du tout, je pense qu’il n’y a pas toujours de rapport entre préoccupations et compréhension ou interprétation du texte.

        Il s’agit ici de ma compréhension en première lecture simple basée sur les versets suivants :
        Actes 16:16 […] « elle procurait de gros gains à ses maîtres avec ses oracles » […]
        Actes 16:19 : « Ses maîtres, qui voyaient s’enfuir l’espoir de leurs gains ». […]

        => ainsi donc selon ma première lecture simple du texte, la servante pythonisse me parassait être en situation de dépendance hiérachique vis à vis de ses maîtres (pas de Paul), et ses maîtres ont précisément l’espoir de gains : « Ses maîtres, qui voyaient s’enfuir l’espoir de leurs gains ». J’en ai tenu compte dans l’interprétation globale du comportement du personnage, elle ne m’a pas paru agir librement, un peu comme une employée, une salariée, de nos jours. J’ai peut-être dit cela par expérience professionnelle de cette situation de salariat, à tord ou à raison.

        Il est vrai que cela pourrait correspondre au fait que « l’esprit de python » ayant été chassé par Paul, les maîtres n’ont plus la possibilité qu’elle effectue des oracles et divinations.

        Il me semble que si la servante pythonisse agissait vraiment par intérêt pour le message de Paul, pour l’Évangile, elle aurait parlé directement à Paul et à ses compagnons. Elle aurait d’abord dû se séparer de la dépendance à ses maîtres.

        Mais effectivement il existe plusieurs lectures. La servante pythonisse a pu être fascinée par l’enseignement de Paul et de ses compagnons, mais ne pas avoir le courage de les rejoindre, ou de les interroger directement… Ceci indépendamment de toute considération financière et hiérarchique par rapport au fait que ses maîtres lui demandent de gagner de l’argent en étant consultée pour ses oracles. Mais à l’inverse, elle a pu vouloir créer de l’attention dans l’espoir que des « clients » potentiels lui demandent un oracle, y compris concernant l’enseignement de Paul et de ses compagnons ? Cela paraît également cohérent.

        Mais de toute façon, tout ce passage me paraît d’un réalisme partiel. Si je comprends bien, il est sous-entendu que c’est l’esprit de divination pythonique qui inspire à la servante pythonisse son comportement qui consiste à suivre Paul et ses compagnons. Or je ne crois absolument pas à l’existence d’un quelconque « esprit de python », de divination, d’oracles… La personne pythonisse pouvait être convaincue d’avoir un esprit, mais je ne crois pas au fait qu’elle en ait effectivement eu un. Or le texte semble suggérer la réalité de cet « esprit », de cette sorte de « démon » intérieur réel, d’une sorte d’esprit métaphysique.

        Cela me fait penser au passage de Luc 4:31-35 où une personne a un démon en lui qui reconnaît en Jésus « le Saint de Dieu »… Et Jésus chasse le démon en lui disant de sortir… Ou encore en Luc 8:26-33 avec une légion de démons qui sort du Gérasénien (près de la Galilée) pour aller dans un troupeau de cochons… Je doute fort du réalisme de ces passages. A la rigueur en lecture allégorique, la légion pourrait symboliser les légions romaines, et le Gérasénien serait une figure de la Judée/Samarie/Galilée, en sous-entendant que Jésus aurait eu le pouvoir de libérer Israël de ses colonisateurs sans violence si tout Isarël avait davantage suivi son enseignement ?

        Partant de la croyance (ma croyance, mais je pense assez répandue de nos jours) formulée en principe de la seule transcendance de Dieu, il n’y a alors plus de démons ni d’esprits impurs, ni d’esprit de divination… Reste alors seulement la croyance des acteurs et auteurs de ces récits en ces esprits et démons. Ou la supercherie de la servante pythonisse et des maîtres vis à vis des clients de oracles…

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