Marc Pernot le 14 avril 2024
Prédication

Des trois immortels : 1/3 Ressusciter « la foi » (1 Corinthiens 13 ; Luc 11:9-13 )

Dans la suite de Pâques nous regardons vers ce qui est rendu vraiment vivant. L’apôtre Paul lance ce cri «Maintenant donc ces trois choses demeurent pour toujours: la foi, l’espérance et l’amour». Trois qualités immortelles. En premier nous chercherons comment le Christ nous donne de ressusciter la foi, même si nous n’étions pas (très) croyant.

Texte, vidéo et poscasts de la prédication. Ceci est un témoignage personnel. N’hésitez pas à donnez votre propre avis ci-dessous.

pasteur Marc Pernot

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prédication (message biblique donné au cours du culte)
à Genève et en direct sur RTS religion, le dimanche 14 avril 2024,
par : pasteur Marc Pernot

Pâques est la découverte d’une vie. Pas d’une autre vie, mais d’une autre dimension de cette vie que nous avons la chance de vivre. Quoi ? Comment ? Qu’est-ce qui, dans notre être, est rendu vraiment vivant. Plus que vivant, et même source de vie. Dans une de ses pages les plus célèbres, l’apôtre Paul affirme que « Maintenant donc ces trois choses demeurent pour toujours : la foi, l’espérance et l’amour ». Il y aurait donc trois qualités immortelles : La foi, l’espérance et l’amour.

Lors de cette première prédication nous chercherons comment notre foi pourrait vivre même si nous n’étions pas (ou pas très) croyant ? C’est possible. Nous chercherons comment Dieu peut ressusciter notre foi, c’est à dire la rendre plus intense et plus libre, rayonnante de belles choses pour nous et pour ceux qui sont autour de nous. C’est cela avoir une foi « ressuscitée », car ce terme signifie littéralement « être éveillé », « être mis debout », les yeux ouvert, en train d’avancer. Seulement, tout dépend ce que l’on appelle « la foi », tout dépend de ce que l’on a comme conception de Dieu.

La foi est quelque chose qui peut embellir considérablement notre vie. Avoir une foi vivante est une chance, allez-vous me dire. C’est vrai, mais pas seulement. C’est comme la forme physique, il y a une part de chance et il y a une part de travail pour faire de l’exercice, bien se nourrir, se soigner et être soigné.

Typiquement, il y a différentes situations de foi :

  • il y a des personnes croyantes et pratiquantes,
  • il y a des personnes qui croient qu’il y a « quelque chose » mais pour qui ça ne change pas grand chose,
  • et il y a des personnes qui ne croient pas en Dieu.

Chacune de ces personnes peut vraiment voir sa foi ressusciter, une certaine foi, la sienne, et que cela rende sa vie vivante, pétillante, et source de vie à sa façon.

Commençons par le plus difficile :

Ressusciter sa foi quand on ne « croit » pas ?

C’est tout à fait possible. Je vous l’assure, et j’ai rencontré bien des personnes pour qui c’est le cas.

Paul parle ici d’un « chemin par excellente ». La question, nous dit Paul, n’est pas tant d’arriver quelque part : la question c’est d’être dans un bon cheminement. De même Jésus nous dit que la question n’est pas de « trouver » mais de chercher. Et il ajoute que si l’on bute sur une sorte de mur : on en cherche la porte et on frappe à cette porte.

Partons donc de ce premier obstacle : Vous ne croyez pas en Dieu, ou pas tellement ? vous pensez que l’univers n’est fait que de matière et de hasard ? Et c’est pour cette raison vous pensez ne pas être en mesure d’avoir la foi ? Je dirais : au contraire. Car si on pense qu’il n’y a pas de dieu pour faire avancer les choses, rien pour les orienter, rien pour nous venir en aide non plus… : si l’on pense cela il faut alors d’autant plus être aux commandes de sa vie, il faut d’autant plus chercher ce qui va pouvoir être créateur dans ce monde et dans notre vie.

Comment faire pour chercher cela ?

Ça peut se travailler par l’émerveillement : en cherchant ce qui nous touche par sa beauté ou sa grandeur, et s’étonner. Ça se travaille en cherchant en soi-même ce qui nous a rendu parfois plus vivant, ce qui a épanoui notre meilleure part, ce qui nous fait avancer, ce qui nous donne envie de rayonner. Ça se travaille aussi en interrogeant des personnes que l’on admire. Ça se travaille en questionnant les grands textes de l’humanité : pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que le chaos ? Qu’est-ce qui fait qu’une personne est plus que son poids de matière ? Qu’est-ce qui est source de vie, de mouvement et d’être (comme le dit Paul à Athènes, Actes 17:28).

Chercher comme on veut mais s’interroger, chercher ce qui nous apparait à nous comme étant source de vie. Ensuite, chaque fois que l’on relève l’indice d’une source : l’affiner encore, puis se placer face à elle régulièrement dans une méditation personnelle, sans se culpabiliser mais afin d’en vivre plus concrètement.

Cette démarche est une démarche de foi. Au sens où cette personne croit en « quelque chose » qui l’inspire pour avancer et être plus vivant. Même si on n’appelle pas ce quelque chose « Dieu » au sens de la religion, c’est une foi et cette foi peut être vraiment éveillée (ressuscitée). D’ailleurs Paul non plus dans ce passage que je vous ai lu n’utilise pas le mot « Dieu », il utilise volontairement le mot « Amour » à la place. Je pense que tout le monde a noté dans sa recherche personnelle qu’un instant de belle relation est une source de vie ?

Ensuite, c’est vrai que si l’on fait le lien entre ce qui est pour nous une source de vie et ce que les religions appellent « Dieu », cela permet d’entrer en dialogue avec un univers immense de théologies, d’arts et de spiritualités. Cela ne nous oblige pas pour autant à adopter ce que l’autre entend par « Dieu » ni sa façon de le vivre. Il est alors possible d’entendre les expressions comme « Dieu », « Christ », « Esprit-Saint » et les traduire intérieurement par « ce qui est source de vie », ou par « l’amour », si on veut, comme le fait Paul ici. C’est ainsi qu’il est tout à fait légitime d’être pratiquant dans une église chrétienne quand on « ne croit pas en Dieu », car la Bible est une des excellentes sources dans la recherche de ce qui fait vivre, le culte et la prière personnelle sont des exercices spirituels qui ont fait leurs preuves pour aider à chercher l’essentiel et à en vivre.

Passons à un autre cas de figure :

Ressusciter sa foi quand on est croyant et pratiquant ?

C’est tout à fait possible. Sur ce chemin de résurrection, quels sont les murs qui font obstacle et dont il est bon chercher les portes ? Paul nous le montre ici. Le mur serait de penser connaître Dieu et ne plus chercher. C’est une sclérose de notre foi qui devient un mur qui nous coupe du Dieu vivant, un mur qui nous coupe parfois de ceux qui ne pensent pas comme nous.

Paul cherche à nous montrer des portes dans ce mur :

  • il nous montre que toute connaissance sur Dieu est comme celle d’un enfant,
  • et il appelle ici Dieu « Amour », afin que nous n’ayons pas peur d’oser mettre en question nos idées préconçues sur Dieu.

Paul n’y va pas de main morte pour désacraliser les enseignements présentés comme sacrés : « Les messages de prophètes ? ils seront abolis… la connaissance ? elle sera abolie ». Autrement dit : ne confondons pas les doctrines sur Dieu avec Dieu lui-même.

Pourtant Paul est un formidable théologien, il nous apprend à réfléchir, à nous creuser la tête, à approfondir, à faire dialoguer la pensée biblique et la philosophie… il le fait ardemment en ouvrant des perspectives novatrices. Il nous ouvre à cette liberté.

Comment ressusciter notre foi, alors ? Paul reprend les exercices essentiels pratiqués par le croyant… mais il en change la perspective. Pourquoi ? parce que c’est Dieu « Amour » qui nous ressuscite, c’est lui qui est source de vie, pas les exercices en eux-mêmes.

C’est dans cette perspective que Paul nous invite à vivre ces exercices que lui-même passe son temps à faire : la recherche théologique, le dialogue avec les humains, se savoir soi-même prophète (chercher au fond de notre propre conscience), agir avec générosité dans le service des autres. Ce sont des portes utiles, mais ce ne sont que des portes. Tant qu’elles restent fermées elles sont tout autant un obstacle que le mur. Reste à frapper à la porte, reste à demander à celui qui nous ouvrira qu’il nous donne de quoi vivre. Jésus nous dit que Dieu nous donnera alors son Esprit même si notre prière est maladroite. Cette perspective c’est ajouter la prière à l’étude, c’est ajouter la prière à la réflexion personnelle, ajouter la prière à nos actions de service. Vivre ces exercices avec sincérité puisque Dieu nous aime déjà. Le laisser alors ressusciter un peu plus notre foi.

Cela nous amène à la troisième configuration :

Ressusciter sa foi quand on est croyant sans relation à Dieu ?

C’est tout à fait possible. Quels sont les murs qui font obstacle sur ce chemin d’éveil et dont il faut chercher les portes ? C’est souvent que cette personne est fâchée contre une certaine idée qu’elle a de Dieu, ou fâchée par ceux qui parlent ou agissent en son nom.

Je me souviens d’un monsieur juif âgé qui m’a dit qu’il était fâché contre « lui là-haut », car pendant la 2nde guerre mondiale la totalité de sa famille de 40 personnes a été massacrée sauf lui. Je comprends, et je compatis, en même temps c’est précisément là qu’un travail de théologie et de prière pourrait nous ouvrir une porte. On peut demander à Dieu des comptes, râler comme Abraham, comme Moïse, David, Job et Jésus-lui-même sur la croix. Dieu est amour, il ne se fâche pas contre nous. Frapper à la porte et le redécouvrir autrement. Et là aussi, chercher ce qui est source de vie dans notre vie, et faire le lien avec Dieu, le voir autrement.

En nous invitant à suivre ce Dieu qui est amour, Paul pourrait nous réconcilier avec la Bible, la théologie et même avec l’église : les aimer ce n’est pas être naïf, c’est faire le tri, garder le meilleur sans les prendre pour Dieu. L’Église peut être utile comme une salle de sport pour nous aider à chercher notre propre porte vers Dieu. Cette porte qu’est le Christ.

Ça peut rendre service, car si l’on reste croyant en « quelque chose » sans que ça change grand chose à notre façon de vivre et d’espérer : c’est comme si nous étions un amoureux « non pratiquant » d’une personne qui nous aime d’un amour fou, et qui nous attend en vain derrière la porte.

Amen

pasteur Marc Pernot

Textes de la Bible

1 Corinthiens 13

Voici la chemin par excellence, nous dit Paul :

1Quand je parlerais les langues des humains et des anges, si je n’ai pas l’amour, je suis une cloche qui résonne ou une cymbale qui retentit. 2Quand j’aurais la capacité de parler en prophète, la science de tous les mystères et toute la connaissance, Quand j’aurais même toute la foi qui transporte des montagnes, si je n’ai pas l’amour, je ne suis rien. 3Quand je distribuerais tous mes biens, quand même je livrerais mon corps pour être brûlé, si je n’ai pas l’amour, cela ne me sert à rien.

4L’amour est patient, l’amour est bon, il n’a pas de passion jalouse ; l’amour ne se vante pas, il ne se gonfle pas d’orgueil, 5il ne fait rien de malhonnête, il ne cherche pas son propre intérêt, il ne s’irrite pas, il ne compte pas le mal ; 6 L’amour ne se réjouit pas de l’injustice, mais il se réjouit de la fidélité ; 7 L’amour pardonne tout, il a confiance en tout, il espère tout, il supporte tout. 8L’amour ne meurt jamais.

Les messages de prophètes ? ils seront abolis ; les langues ? elles cesseront ; la connaissance ? elle sera abolie. 9Car c’est partiellement que nous connaissons, c’est partiellement que nous parlons en prophètes ; 10mais quand viendra l’accomplissement, ce qui est partiel sera aboli. 11Lorsque j’étais tout petit, je parlais comme un tout-petit, je pensais comme un tout-petit, je raisonnais comme un tout-petit ; lorsque je suis devenu un homme, j’ai aboli ce qui était propre au tout-petit. 12Aujourd’hui nous voyons comme de loin, d’une manière confuse, mais alors ce sera face à face. Aujourd’hui je connais partiellement, mais alors je connaîtrai comme je suis connu.

13Or maintenant trois choses demeurent : la foi, l’espérance, l’amour ; et c’est l’amour qui est le plus grand. Suivez l’amour.

Luc 11:9-13

Jésus leur dit : « 9Eh bien, moi, je vous dis : Demandez, et l’on vous donnera ; cherchez, et vous trouverez ; frappez à la porte, et l’on vous ouvrira. 10Car quiconque demande reçoit, qui cherche trouve, et à qui frappe à la porte on ouvrira.

11Quel père parmi vous, si son fils lui demande un poisson, lui donnera un serpent au lieu d’un poisson ? 12Ou bien, s’il demande un œuf, lui donnera-t-il un scorpion ? 13Si donc vous, tout mauvais que vous êtes, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, à combien plus forte raison le Père céleste donnera-t-il l’Esprit saint à ceux qui le lui demandent !

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6 Commentaires

  1. Magdalena dit :

    L amour remplacé la charité pourquoi ?

    1. Marc Pernot dit :

      Parce que le sens du mot charité en français a changé, c’est devenu assez péjoratif, cela fait penser au sous que l’on jette au mendiant sans même le regarder. C’est pourquoi les traductions récentes comme la TOB ont mis « l’amour » au lieu de « la charité ». Mais vous avez raison, cette traduction touche à quelque chose d’essentiel : c’est en grec « l’agapè »

      1. Magdalena dit :

        je pensais juste qu il est difficile d aimer son prochain d Amour mais on peut passer par la charité plus à portée de tous et qui peut ouvrir aors à l amour de l autre,du prochain?

        1. Marc Pernot dit :

          C’est vrai que le commandement d’aimer peut être mal compris, c’est pourquoi les anciens avaient mis « caritas » en latin, et non « amor ». En réalité, je pense que « aimer » dans ce contexte c’est être en relation, c’est noter la présence de l’autre, se soucier de lui. Et « haïr » c’est l’ignorer, faire comme s’il n’existait pas, ne comptait pas. C’est donc encore plus facile que « la charité ». Et c’est sans doute très utile de manifester au mendiant qu’il existe et que l’on se préoccupe de lui.

  2. Lili dit :

    Merci beaucoup pour ce premier opus !

    Pour ma part je me reconnais dans le premier point. Si la démarche peut sembler paradoxale, elle me semble « naturelle » et c’est vrai que, même dans ce cas, on peut trouver des paroisses IRL accueillantes – je vous avoue qu’il faut quand même chercher, ce n’est pas aussi évident que votre optimisme le laisse paraître, mais ça c’est tout vous ! – Néanmoins, on finit par trouver. et on fait de belles rencontres C’est vrai que les lieux de réflexion ne sont pas si nombreux alors on apprécie vraiment lorsqu’une paroisse propose des sujets sociétaux à la réflexion, avec des prédications enrichissantes et des études bibliques conséquentes en plus. Il y a bien aussi des conférences à droite et à gauche, si on n’habite pas trop loin d’une université ou autre, mais ce n’est pas toujours facile de développer un sujet précis à moins de s’inscrire pour une année, ce qui demande du temps et parfois des finances conséquentes.

    Je ne sais pas si c’est la foi qui se travaille, comme vous dites, « en interrogeant des personnes que l’on admire » ou « en questionnant les grands textes de l’humanité » mais en tout cas cela engage un dialogue : en « vrai », sur le net ;), et même avec ces auteurs du temps passé qui philosophent souvent de façon si actuelle. Cela stimule la réflexion, favorise les idées nouvelles et je crois que cela rend aussi plus tolérant. Pas dans le sens basique où on accepte que les autres aient leurs idées – en gros chacun chez soi et en s’en fichant pas mal de ce qu’ils pensent – mais en acceptant qu’ils aient aussi des idées estimables, remarquables qu’on puisse partager et par là élargir le sens de nos expériences. Cela peut nous faire sortir de certaines impasses, celles dont nous héritons ou que nous construisons patiemment, cela ne peut être que profitable, il me semble.

    1. Marc Pernot dit :

      Grand merci pour ce retour. En ce qui concerne la prédication et pour ce retour d’expérience. Passionnant.
      Je sais bien qu’il y a des paroisses décevantes dans ce qu’elles offrent, dans ce que raconte l’officiant, dans l’accueil déplorable, des lieux de cultes encombrés, sales et moches. C’est vrai. Seulement si je suis optimiste c’est dans l’exercice spirituel accompli quand on sort de chez soi dans l’espérance de quelque chose de neuf de cette petite heure avec d’autres personnes. Il y a effectivement, par le fait même, le risque d’être déçu puisque l’on attendait « quelque chose » de substantiel. C’est pourquoi je propose d’attendre plutôt du fait d’avoir fait un pas de côté dans notre course. Si l’apport se révèle être ensuite bon pour nous, ce sera une bonne surprise supplémentaire, tout au plus. Et si c’est surréaliste c’est une expérience ethnographie en milieu réel. Avec de quoi sourire, avec de quoi compatir, avec de quoi être en colère parfois devant des paroles traumatisante, mais c’est la vie réelle. En on s’y est intéressé. Ensuite, si on peut trouver une ou quelques paroisses qui nous apportent de quoi nous faire avancer, c’est génial. Effectivement. Et ça existe.

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