08 septembre 2024

Un homme travaillant dur avec un marteau-piquer - Photo de jesse orrico sur https://unsplash.com/fr/photos/roches-grises-et-noires-P6IqUKhatuM
Foi

Comment avancer dans la recherche de Dieu et avoir la foi quand on voit que c’est nous qui agissons dans notre vie, et que l’on n’a pas l’impression que Dieu y soit pour quelque chose ?

Question posée :

Bonsoir !
Ma question ce soir est un peu hasardeuse, mais je la tente quand même…
Comment avancer dans la recherche de Dieu et garder la foi (quand on l’a) quand on avance dans la vie, que l’expérience nous montre qu’il a fallu intervenir, assumer ses responsabilités, bref agir dans bien souvent des cas pour être là où on est ?
Par exemple pour démarrer dans la vie d’adulte il m’a fallu une situation financière stable pour pouvoir m’assumer seule, il a fallu que je cherche du travail, que je postule puis que je fasse mes preuves pour signer le CDI. Puis il a fallu que je cherche un logement puis que je constitue des dossiers de candidature à la location… D’autres exemples encore comme la santé : si je n’avais pas eu recours à tel ou tel traitement pour soigner telle ou telle maladie je ne serais peut-être pas là en bonne santé actuellement… les exemples peuvent être nombreux.
Mais si je n’avais rien fait, que j’aurais attendu que ça vienne de Dieu, que ça tombe du ciel je n’aurais rien. Les démarches ont été nécessaires, et c’est bien moi qui les ai assumées… Mon compte bancaire qui me sert à payer mon loyer et mes factures est alimenté par mon salaire qui lui-même dépend ne serait-ce que de ma présence au travail. Je ne peux pas m’attendre à un maintien de mon salaire si je décide du jour au lendemain de ne plus travailler et d’attendre que ça tombe du ciel.
Pareil pour le progrès (quand il va dans le bon sens c’est mieux), les découvertes scientifiques… Bien des choses qui étaient mystérieuses, inconnues, inexpliquées le sont en partie au moins aujourd’hui, on peut facilement imaginer que les découvertes ne s’arrêteront pas…
Tout cela paraît bien mathématique, matérialiste j’en conviens… mais je suis également capable d’aimer (heureusement !)… même s’il se pourrait que tout ça soit une histoire de cerveaux, de réactions biologiques… qui seront peut-être un jour montrées… mais sans que ça enlève la possibilité d’aimer (heureusement, on n’est pas des robots !)

Réponse d’un pasteur :

Bonsoir

Votre analyse est parfaitement lucide et juste, et par ailleurs, votre parcours révèle de bien grandes qualités humaines et spirituelles.

Notre théologie gagne à être une théologie expérimentale, pas seulement une théologie théorique, idéologique, dogmatique : seulement basée sur des constructions abstraites et de belles idées. Cela a trop souvent été le cas et tant et tant de personnes perdent la foi, car le Dieu qu’on leur a « vendu » n’est pas cohérent avec ce qu’ils observent dans la vie réelle, et ce qui leur arrive personnellement.

C’est ainsi que je me souviens d’une famille extrêmement croyante de la paroisse où j’étais pasteur, une famille à cheval entre notre église protestante et une église « évangélique ». Leur fille de 8 ans, une fillette adorable, a été frappée d’une leucémie. Les médecins l’ont soignée au mieux de la médecine moderne, la famille l’a entourée dans une prière ardente pour que Dieu la sauve, des amis ont même formé une chaîne de prière permanente en sa faveur. La fillette a entouré sa famille de sa joie et de sa tendresse inoxydables. Elle est morte après trois ans de combat et de souffrance. La foi des parents a été complètement ébranlée, car leur foi et la réalité de cette cruelle expérience n’étaient pas cohérentes entre elles. Si cette fillette est morte, ce n’est pas parce que Dieu n’existe pas, ou que Dieu serait indifférent ou méchant, c’est que ce dieu qu’ils imaginaient, un dieu tout puissant qui tient dans sa main la santé et la maladie de chacun, la vie et la mort, les accidents et les famines, la pluie et le beau temps, la course des oiseaux dans le ciel… ce dieu n’existe pas (heureusement). Sinon, des pains pleuvraient sur la table des enfants affamés, les tyrans seraient pris, eux, d’une leucémie foudroyante ou au moins d’un sommeil irrémissible le temps qu’ils se convertissent au lieu d’envahir ses voisins pour prendre ses terres…

Donc, je suis entièrement d’accord : c’est vous qui avez travaillé, réussi vos examens, trouvé un bon emploi, payé les factures. Ce n’est pas Dieu. Ou plutôt, pas directement.

Car si Dieu n’a pas de mains pour fabriquer du pain pour nourrir l’enfant affamé, mais il peut beaucoup, énormément, et très concrètement dans notre vie. Il peut toucher des cœurs sur la misère de ses proches, il peut renforcer le courage, l’espérance, la foi de celui qui a du mal, il peut ressusciter la vie de notre esprit. Il peut nous appeler à nous rassembler à quelques uns pour faire un projet : nous ne répondrons pas toujours, et pas exactement comme il l’entendait, mais ça fera avancer les choses. Dieu peut nous aider à être sensibles à la beauté, à entrer en résonance avec ce qui est bon, aimable, joyeux, harmonieux. Du courage pour ouvrir les yeux sur la réalité, comme vous faites, remettre en cause ce que l’on pensait juste et bon afin que ce soit meilleur encore. C’est ce que vous faites et c’est ce qu’on fait la gamine frappée par cette maladie et sa famille. Je ne sais pas ce qu’ils sont devenus, j’espère qu’ils ont pu guérir de leur théologie d’un Dieu tout puissant et sacrément cruel, pour un Dieu qui aime et qui accompagne, qui fait ce qu’il peut et qui le fait généreusement.

Votre regard lucide est vrai, en particulier quand vous parlez de votre capacité à aimer. Bien sûr, ce sont encore là des réactions chimiques, ou plutôt un chef d’œuvre d’organisation de la matière la rendant vivante et capable d’aimer, d’avoir une personnalité, de dépasser le niveau basique de la survie, de l’alimentation et de la reproduction pour avoir une aspiration, et même une spiritualité. Cette qualité de la matière est un saut qualitatif absolument hallucinant. Méditer dessus et méditer sur le fait que le monde matériel n’existe pas seulement, mais qu’en plus, il est beau : cela ouvre à une autre dimension. Cela qui a permis, ce qui a suscité, qui grandit ces qualités, je veux bien l’appeler Dieu. Et appeler prière l’acte qui consiste à me placer devant ce champ qui dépasse la simple matérialité. C’est à mon avis une piste très pratique pour avancer dans la foi, et donc dans la qualité de notre existence.

N’hésitez pas à compléter par ce qui vous inspire, vous.

Dieu vous bénit et vous accompagne.

par : pasteur Marc Pernot

Réponse de la personne :

Bonjour
Merci beaucoup pour votre réponse que vous avez pris le temps de me donner, vous m’aidez vraiment à dépasser ce traumatisme induit (ou plutôt réveillé) par cette fameuse amie d’enfance qui a rejoint récemment une église évangélique, qui l’aurait transformée en quelqu’un d’autre du jour au lendemain… le Dieu qui l’a soi-disant aidée est bien le premier que vous décrivez : celui qui permettrait de ne plus rien assumer dans la vie, d’attendre que tout tombe du ciel, qui contrôle la maladie etc. Je ne peux que prier pour que sa vision évolue et qu’elle sorte de cet aveuglement… car c’est bien ça qui m’a contraint de m’éloigner d’elle. Des discussions aberrantes, sans logique, quand je lui racontais des anecdotes sur ma vie je me sentais presque idiote de devoir faire quand même un minimum, alors qu’elle me disait contente-toi de prier… Elle allait jusqu’à prier à ma place (en me l’imposant, je n’avais plus le choix au final) en me disant que ce n’est pas elle qui parle mais Dieu qui parle en elle…. Sous-entendu qu’il allait m’arriver malheur si je continuais à prendre mes responsabilités…
C’est en cela que je continue à être inquiète pour elle qui semble avoir abandonné tout esprit critique, tout libre arbitre, toute logique…

Mais c’est certain qu’un Dieu aux commandes de tout qui permettrait de se déresponsabiliser est « pratique » pour séduire quelqu’un de perdu à un moment, prêt à accepter tout et n’importe quoi… ce n’est même pas à elle que j’en veux mais aux circonstances, à la personne qui s’est ce jour de février 2024 assise à côté d’elle dans le parc comme elle m’a dit qui l’aurait « évangélisée »… elle n’était pas aussi en forme qu’elle le disait à l’époque, là aussi je m’en étais rendue compte. Mais je n’ai rien pu faire…

Quelle tristesse pour cette petite fille de 8 ans et sa famille…

Je préfère de loin cette deuxième conception de Dieu que vous proposez… qui n’est qu’amour et ne reproche pas comme le ferait un narcissique tout-puissant de ne pas s’en remettre à lui au lieu de se responsabiliser, mais en se responsabilisant.
Belle journée.

par : pasteur Marc Pernot

Réponse du pasteur :

Bonsoir
Si sa foi fait vivre votre amie, c’est peut-être que, elle, avait besoin de ce genre de foi. Et qu’en temps utile, elle pourra évoluer dans sa foi. La personne humaine est si complexe.
Dieu vous bénit et vous accompagne
Marc

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