Simone Weil : Y a-t-il pour nous un autre principe que la force seule à l’œuvre dans l’univers ?
Face à l’usage de la force, face à l’abus de pouvoir, face à la puissance de la nature, du climat et de tout ce qui nous pèse, quel qu’en soit le nom, nous opposons une certaine force. C’est nécessaire.
La philosophe Simone Weil (1909-1943) attire notre attention sur le fait que le réel n’est pas uniquement une question de force. Elle écrit :
« Il n’y a qu’un choix à faire :
- Ou il faut apercevoir à l’œuvre dans l’univers, à côté de la force, un principe autre qu’elle,
- Ou il faut reconnaître la force comme maîtresse unique et souveraine des relations humaines aussi. »
(dans L’Enracinement)
Ce plaidoyer de la philosophe consiste à nous ouvrir à un autre principe que la seule force. Elle sait de quoi elle parle, car elle a connu la maladie et les menaces d’extermination nazie, elle a côtoyé les mouvements révolutionnaires. La force est parfois nécessaire, mais il serait dramatique de se limiter à cela comme unique principe à l’œuvre dans l’univers et dans notre vie.
À quel autre « principe » que la force pourrais-je m’ouvrir, moi ? Se poser la question de façon conséquente est déjà choisir la première voie pour vivre et penser, pour espérer, pour agir. Ensuite, si j’ai à cœur d’aider, par exemple, mes enfants, comment les éveiller à une recherche personnelle de cet ordre ?
De pure philosophe, Simone Weil s’est ensuite ouverte à la foi, sans pour autant aller jusqu’à demander le baptême, mais d’une façon très profonde qui a nourri sa philosophie comme une manière de vivre. C’est ainsi que dans une autre de ses œuvres, elle affirme que nous sommes comme une feuille que la chlorophylle rend capable de recevoir la lumière du soleil :
« Le travail du cultivateur ne consiste pas à aller chercher l’énergie solaire ni même à la capter, mais à tout aménager de manière que les plantes capables de la capter et de nous la transmettre la reçoivent dans les meilleures conditions possibles. L’effort qu’il fournit dans ce travail ne vient pas de lui, mais de l’énergie qu’a mise en lui la nourriture, c’est-à-dire cette même énergie solaire enfermée dans les plantes et la chair des animaux nourris de plantes. De même nous ne pouvons pas faire d’autre effort vers le bien que de disposer notre âme à recevoir la grâce, et l’énergie nécessaire à cet effort nous est fournie par la grâce. »
(dans Pensées sans ordre concernant l’amour de Dieu)
C’est ainsi que nous pouvons commencer à prier alors-même que nous ne croyons pas en Dieu, n’avons pas la moindre idée sur ce que c’est que prier ni sur ce que l’on appelle « la grâce de Dieu » : Choisir d’exposer notre être à cet autre principe que la force seule. Prendre un peu la peine d’exposer nos feuilles au meilleur. Selon ce que nous aurons choisi.
par : pasteur Marc Pernot
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…choisir d’exposer mes feuilles au Meilleur…