peinture de Jan van Kessel (XVIIe siècle) - collection privée
Prédication

La foi comme une graine de moutarde (Luc 13:18-22 ; Luc 17:5-6)

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pasteur Marc Pernot

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prédication (message biblique donné au cours du culte)
à Genève, le dimanche de Pentecôte 2023,
par : pasteur Marc Pernot

peinture de Jan van Kessel (XVIIe siècle) - collection privée
Par deux fois dans l’Évangile, Jésus prend comme image de l’essentiel :

Une graine de moutarde

Une graine, c’est tout sec, cela semble n’avoir rien de vivant et pourtant, après quelques jours seulement en terre de la vie sort de cette petite chose. Il y a donc là une puissance de vie. On comprend que Jésus prenne une graine pour évoquer ce qu’est la foi.

N’importe quelle graine aurait pu symboliser cela, mais ici, à deux reprises, Jésus ajoute que parmi toutes les semences conservées au Jardin Botanique, il n’y a rien de mieux qu’une graine de moutarde pour dire ce que Dieu nous apporte par la foi. La moutarde est quelque chose de spécial, elle fait sauter au plafond et tord notre nez si on en met trop. Mais à juste dose, la moutarde est géniale : elle nous réveille une viande ou une salade, de même le wasabi pour le poisson.

Cette comparaison de Jésus met à sa juste place la foi dans notre vie. À l’image de la place de la moutarde dans notre alimentation : nous ne remplaçons pas nos plats préférés pour ne manger que de pleines assiettes à soupe de moutarde. On en ajoute la juste dose, à notre goût, pour accompagner certains plats. De même, la foi ne nous appelle pas à sacrifier notre vie en ce monde, la foi est là pour accompagner notre vie, pour la rendre plus savoureuse, la réveiller, en révéler la saveur propre.

En même temps, la moutarde, ce n’est pas du miel ou de la crème : la moutarde développe la saveur du plat en dérangeant nos papilles juste ce qu’il faut. La foi n’est pas non plus un oreiller moelleux, ni un doudou rassurant. La foi tient de la moutarde, elle nous secoue la vie, à travers elle, Dieu éveille notre vie, la rendant plus savoureuse et plus vivante, plus vivifiante, même.

C’est l’effet de l’Esprit de Dieu dans notre être. C’est ensuite l’effet de notre action modeste dans ce monde : un petit geste de paix que nous lançons dans le monde par la foi, cela semble peu de chose, avant que Dieu le fasse germer, pousser, grandir. C’est ainsi que Jésus a agit, passant de ville en village, rencontrant quelques personnes, il est un presque rien de graine de moutarde qui change l’histoire de l’humanité.

Prendre et lancer

Cela dit, Jésus ne compare pas le Royaume de Dieu à une graine de moutarde, mais « à une graine de moutarde qu’un humain a pris et qu’il lance dans son jardin ». C’est un geste délibéré de prendre cette graine (et pas une autre) et de la lancer dans son propre jardin. C’est un choix judicieux (de la graine), c’est une espérance (que ça peut pousser), c’est une implication de soi-même, dans notre vie et par notre geste.

Dieu fait le reste, nous dit Jésus.

On a pu penser que la foi était un exercice éprouvant et difficile comme de monter au sommet du Cervin à genoux : qu’il faudrait croire des choses invraisemblables, qu’il faudrait pratiquer des exercices héroïques, se sacrifier, se priver. Ce n’est pas ce que dit Jésus : il compare la foi à l’effort de prendre une graine de moutarde et de la lancer tout simplement dans notre jardin. Apparemment, il n’y a même pas à aller acheter la graine de moutarde, elle est là, à notre disposition, c’est ce que Dieu nous a déjà offert en Christ, il est la graine de moutarde que Dieu lui-même a lancée dans son jardin : dans ce monde où nous sommes.

Ce n’est pas un effort immense de soulever et de lancer une graine de moutarde, elle pèse environ 5 millièmes de gramme (j’ai pesé). Mais encore faut-il le faire, et pour cela, encore faut-il avoir eu l’idée de le faire. À quoi bon saisir cette graine qui ressemble à un grain de sable tout sec et le lancer en terre ? Comment savons-nous qu’en elle il y a ainsi une puissance de vie ?

Cela nous a été appris par les générations passées.

L’agriculture est une des découvertes majeures de l’humanité, elle date de 10 ‘000 ans environ, et cette découverte s’est transmise de génération en génération.

Quant à la spiritualité, ce qu’elle apporte a commencé à être découvert dès l’aube de l’humanité, il y a 100’000 ans, et cela a été approfondi de génération en génération jusqu’à nous-même, aujourd’hui, ce matin. Dans cette histoire de la spiritualité, Jésus-Christ a apporté quelque chose de vraiment décisif.

La spiritualité, vers la profondeur de l’être

Qu’apporte donc la spiritualité ? C’est ce dont Jésus témoigne en parlant ici du Royaume de Dieu, avec les aventures de notre graine de moutarde. Comment ?

Nous n’avons pas seulement un corps, nous sommes un corps. Nous voyons par nos yeux, nous touchons avec nos mains, nous entendons les sons : tout cela nous rend particulièrement sensible à la surface des choses. Or ce n’est pas tout et l’essentiel est souvent à l’intérieur. C’est vrai pour l’œuf ou la banane, par exemple. C’est encore plus vrai pour les personnes humaines et pour notre vie. Comment donc approfondir la réalité ?

La science cherche au-delà de la première évidence, par exemple le soleil semble s’élever dans le ciel, se coucher de l’autre côté et passer par derrière pour revenir le lendemain. Nous savons qu’en réalité c’est nous qui tournons autour du soleil à 100’000 km/h sans ressentir cette vitesse. De même : nous vivons en grande partie à la surface de notre être, et nous avons beaucoup de difficulté à entrer dans la profondeur de nous-même. Or c’est tout à fait essentiel car là aussi, le meilleur est dedans : c’est notre personnalité qu’aiment ceux qui nous aiment, c’est notre esprit, ce quelque chose de vivant, d’infiniment personnel, qui nous rend capable de choisir et d’aimer.

Chercher ce que nous sommes à l’intérieur, les philosophes y travaillent, par exemple Socrate dont la devise était « connais-toi toi-même » (γνῶθι σεαυτόν).

Jésus nous dit que par la foi Dieu est d’une aide prodigieuse dans ce domaine, il travaille en nous comme le fait la graine de moutarde que nous lançons dans notre jardin et qui germe : cette graine va pousser à la fois dans la profondeur par ses racines et en hauteur par ses pousses, bientôt ses hautes branches.

La spiritualité : vers la hauteur

La profondeur de l’être nous est en grande partie inaccessible. Nous vivons en surface, nous déplaçant, produisant, récoltant pour manger, échangeant entre nous. C’est là que joue la graine de moutarde de la foi : nous la saisissons et nous la jetons à la surface de notre vie, Dieu ira chercher le meilleur des profondeurs de nous-même pour une grande élévation de nous-même.

C’est un immense service. Le premier.

La spiritualité : vers une paix intérieure féconde

Il y en a un autre, nous dit Jésus. Cette graine de foi devient comme un arbre et les oiseaux du ciel font leur nid dans ses branches. Qu’est-ce que Jésus veut dire par là ? Les oiseaux sont de jolis animaux aériens, mais ils sont sauvages et nous ne savons pas les domestiquer, ils représentent les multiples belles dimensions de nous-même mais qui sont un peu comme en vrac. L’arbre de notre foi de moutarde est à même d’accueillir tous les oiseaux sauvages de notre être, il les abrite, les coordonne, leurs chants deviennent un concert, et ils peuvent y bâtir un nid, et fonder notre avenir.

Envoyer balader les interprétations nocives

Dans le second texte où Jésus parle de notre foi comme une graine de moutarde, il nous révèle un troisième super pouvoir de notre foi, extrêmement utile et salutaire, nous dit Jésus. Elle nous permet de « dire à un sycomore ‘Déracine-toi et va te planter dans la mer’, et il nous obéira ». C’est apparemment un pouvoir génial, si utile pour vivre et même pour « augmenter notre foi ». Mais cette image de Jésus est un peu plus difficile à saisir pour nous aujourd’hui.

Le sycomore dont il parle est un arbre qui était connu pour faire de très mauvaises figues. Ensuite, dans la culture de l’époque, le figuier est une figure de l’interprétation de la Bible et de notre vie. De mauvais fruits dans ce domaine sont nocifs pour notre développement et pour notre foi. Tant de personnes ont perdu la foi simplement à cause d’une mauvaise théologie. Ce sycomore et ses fruits représentent les fausses nouvelles, les discours manipulateurs, les préjugés, les ambiances pénibles… la pire de ces mauvaises interprétations nocives est la mauvaise image que nous avons de nous. Nous sommes souvent déçu de nous-même, nous voudrions être autre, avoir d’autres talents, vivre une autre vie. C’est une image troublée, souffrante, dont nous avons du mal à nous débarrasser. La foi, même une minuscule foi comme une graine de moutarde, nous dit Jésus, suffira à avancer dans cette difficulté. Dieu nous donne la puissance de faire ce miracle : avoir un nouveau et beau regard, un regard vrai, en profondeur. Un point de vue élevé. Et grâce à cela, envoyer balader cette déception de nous-même et de notre vie. Se découvrir aimé, apprécié, honoré, espéré par Dieu. Par Dieu lui-même qui s’y connaît en humanité !

Le mode d’emploi de cette graine de moutarde aux prodigieux pouvoirs : c’est la prendre et la lancer dans notre jardin.

pasteur Marc Pernot

Textes de la Bible

Luc 13:18-22

Jésus dit alors : « À quoi est comparable le Royaume de Dieu ? A quoi le comparerai-je ? 19Il est comparable à une graine de moutarde qu’un humain a pris, qu’il lance dans son jardin, et qui grandit et qui devient un arbre, et les oiseaux du ciel font leur nid dans ses branches. »

20Et Jésus dit encore : « À quoi comparerai-je le Royaume de Dieu ? 21Il est comparable à du levain qu’une personne a pris et qu’elle mélange dans trois mesures de farine, jusqu’à ce que le tout ait levé. »

22Et Jésus passait par villes et villages, enseignant et faisant route vers Jérusalem.

Luc 17:5-6

Les apôtres dirent au Seigneur : « Augmente en nous la foi ! »

6Le Seigneur dit : « Si vous avez de la foi gros comme une graine de moutarde, vous direz à ce sycomore : “Déracine-toi et va te planter dans la mer”, et il vous obéira.

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3 Commentaires

  1. Catherine dit :

    J’étais très triste ce matin et votre commentaire de ces deux passages bibliques sur la graine de moutardes m’a redonné un peu espoir. Merci.

  2. Pascale dit :

    Quelques petites remarques :
    1) Merci pour cette prédication dont je pourrais dire qu’elle m’a enrichie. En particulier, j’ai trouvé l’image de Jésus comme graine de moutarde lancée par Dieu dans son jardin, absolument magnifique et tellement encourageante.
    2) Pour ajouter un élément dans le parallèle entre les bienfaits de la moutarde et celui de la foi dans notre vie : dans toutes les cultures, la moutarde a largement été employée pour ses propriétés médicinales, tout comme la foi peut nous aider à guérir des aspects souffrants de notre vie.
    3) Comme souvent, vous développez ce qui pourrait sembler un détail de la narration. Ici le sycomore. C’est vrai qu’il faut une certaine culture pour en saisir la portée, mais ce qui m’a étonnée, c’est que dans plusieurs traductions on trouve le mot mûrier ou tout simplement arbre. On perd alors la richesse de ce détail ; si, dans certains cas, le choix du traducteur sert un choix théologique, ici je n’en vois pas l’intérêt.

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