Dans la foule de supporters lors d'un match - Photo de Ahmet Kurt sur https://unsplash.com/fr/photos/un-grand-groupe-de-personnes-assises-dans-un-stade-_SYaBhnoBPY
Développement

Est-ce que mon approche rationnelle pourrait présenter un obstacle à une foi authentique ?

Question posée :

Bonjour
Je me permets de vous écrire car je me questionne actuellement sur le rapport entre la rationalité et la foi. Je crois profondément en Dieu, mais je sens que ma manière de croire diffère beaucoup de celle que je peux observer, par exemple, chez certains croyants charismatiques ou émotionnellement très expressifs.

Cela me conduit à me demander si mon approche rationnelle pourrait représenter un obstacle à une foi authentique, ou si elle constitue simplement une autre manière, tout aussi valide, de vivre ma spiritualité.

J’apprécierais beaucoup votre éclairage à ce sujet, car il me semble important de comprendre comment concilier une approche rationnelle avec une foi sincère et épanouissante.

Merci d’avance pour votre temps et vos conseils.

Bien cordialement.

Réponse d’un pasteur :

Cher Monsieur,

Chacun sa façon d’être. L’être humain est si riche de dimensions, il a été enrichi de rencontres et d’histoires, de culture et de prière, d’émotions et de pensées. Cela fait qu’il n’existe pas deux humains semblables. Chacun sa foi. Certains sont plus versés dans l’émotion, dans le sentiment religieux, d’autres personnes le sont moins.

Quelle est la « foi authentique » ? C’est une bonne question à se poser. Merci et bravo. La foi authentique pour une personne : c’est la foi qui lui correspond authentiquement, à elle. Ce n’est pas nécessairement la foi la plus facile ou la plus agréable pour cette personne, ce sera plutôt la foi qui va l’aider à tisser une meilleure relation avec Dieu, une foi qui va la faire vivre et cheminer, progresser, grandir, et être plus libre pour devenir authentiquement elle-même, grâce à Dieu, et porter ses fruits selon sa vocation propre.

Est-ce que l’approche par la réflexion serait un obstacle à une foi « authentique » ? Cela ne devrait pas, car l’intelligence est une bénédiction spéciale que Dieu a donné à l’humain. Ne pas la mettre au service de notre foi authentique serait comme décider de vivre notre vie en ce monde sans utiliser ses pieds pour avancer, par exemple. Ce serait une amputation. Ce ne serait pas une foi authentique. De même, renoncer à l’émotion, au sentiment religieux serait dommage pour une personne particulièrement sensible à cela, mais c’est un talent moins généralement partagé, et là encore, vous avez raison, il importe que chacun cherche à faire contribuer les meilleurs de ses talents à sa foi, c’est ainsi qu’elle sera authentique. Une foi sincère. Une foi ouverte.

Ce qui est certain, c’est que Jésus a beaucoup « travaillé » à faire réfléchir les personnes à qui il s’adresse. Ses disciples s’en plaignent d’ailleurs, à plusieurs reprises, dans les évangiles : « Pourquoi leur parles-tu en paraboles ? » (Matthieu 13:10), « Explique-nous« . Car ses paraboles sont toutes très complexes : sous leur apparence de petites histoires simples de la vie courante, à chaque fois, il y a une sorte de torsion qui pousse à réfléchir et à entrer dans une logique nouvelle. Parfois les paroles de Jésus sont littéralement impossibles et des disciples lui tournent le dos à cause de cela (Jean 6:66). Jésus cherche manifestement à éveiller l’intelligence des foules. Il explique que si ses paroles sont aussi complexes c’est afin de briser les certitudes toutes faites des personnes car il n’y a pas plus aveugle qu’une personne persuadée d’avoir déjà vu et de posséder ainsi le sujet. Les rencontres que Jésus organise sont des enseignements, ce ne sont pas des réunions de transes mystiques comme cela pouvait exister dans d’autres courants spirituels. Il semble donc qu’à la suite de Jésus, chaque personne est appelée à s’entraîner pour élever sa propre intelligence théologique et biblique.

Quand Jésus résume l’essentiel (Marc 12:30), il nous conseille :

  • « D’écouter et d’aimer Dieu » : c’est en quelque sorte la prière, une prière qu’il nous invite à pratiquer dans l’intimité de notre chambre, précisément, explique-t-il (Matthieu 6:6), pour que notre relation à Dieu soit profondément authentique, libérée de l’influence du groupe.
  • « D’aimer Dieu de tout son cœur, de toute son âme, de toute sa force » et Jésus ajoute à ce texte déjà millénaire à son époque de « l’aimer avec toute notre intelligence, notre raison » : c’est-à-dire non pas de sacrifier notre intelligence mais de la développer comme une des excellentes dimensions de notre être pour écouter et pour aimer Dieu en vérité. « Le cœur » dont il est question n’est pas ici le lieu des sentiments (qui étaient à l’époque évoqué plutôt par « nos entrailles« ), mais le cœur est ici le lieu de la décision personnelle. « Notre âme » serait mieux traduit par « notre être« , notre vie. « Notre force » c’est d’aimer en acte, concrètement. Jésus n’a pas ajouté l’émotion ou le sentiment dans ces 4 dimensions de notre foi.

Il ne me semble donc pas que votre démarche de réflexion soit contraire à une foi authentique, bien au contraire : c’est pour rendre notre foi la plus authentique possible que Jésus a mis l’accent sur la réflexion personnelle dans ce qu’il voulait apporter à ses disciples. Car il est très difficile de nous affranchir de nos préjugés et de l’opinion de la foule, de son ambiance, de ses humeurs, de ses émotions communicatives. Si l’on n’y travaille pas, cela nous rend étranger à nous même, et donc perturbe une relation authentique à Dieu, aux autres, et à nous-mêmes. La réflexion personnelle permet de faire le tri. Comme le dit Paul, « examinez toute chose et retenez ce qui est bon » (1 Thessaloniciens 5:21).

Ensuite, cet examen mobilise notre raison, certes, mais aussi notre prière, notre ouverture à l’Esprit saint. Cette intelligence et cet Esprit nous enseignent aussi en chœur que Dieu dépasse notre intelligence, qu’elle ne pourra jamais en faire le tour, que nous ne possédons pas Dieu mais qu’il est bon de le chercher sans cesse, que nous sommes en chemin vers lui. Comme souvent : un peu de science pense déjà tout savoir, plus de science nous apprend que la question est bien plus complexe. Dans le domaine de la foi aussi. C’est pourquoi il est essentiel de faire un petit peu plus de théologie, et un peu plus de prière, peut-être. Mais chacun vit sa vie comme il l’entend.

En ce qui vous concerne votre propre pratique de la foi, si vous aimez l’ambiance d’un culte charismatique, pourquoi vous en priver ? Associée à votre propre recherche par la réflexion et la prière personnelle, intime, dans votre sphère privée : cela me semble être une excellente façon de développer votre foi authentique.

Dieu vous bénit et vous accompagne.

par : pasteur Marc Pernot

Partagez cet article sur :
  • Icone de facebook
  • Icone de twitter
  • Icone d'email

Articles récents de la même catégorie

Articles récents avec des étiquettes similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *