Une bible posée sur une table en bois avec un fond sombre - Image par StockSnap de https://pixabay.com/fr/photos/livre-bible-en-train-de-lire-table-2596785/
Bible

Comment continuer à intégrer ce texte des Nombres dans notre méditation spirituelle des Écritures ?

Une bible posée sur une table en bois avec un fond sombre - Image par StockSnap de https://pixabay.com/fr/photos/livre-bible-en-train-de-lire-table-2596785/

Question posée :

Bonjour Mr le Pasteur. En lisant Nombres 5:11-31, il me semble qu’un homme israélite ayant des soupçons d’infidélité vis-à-vis de son épouse, sans en avoir de preuve, peut l’amener devant le Prêtre qui lui imposera de boire l’eau amère susceptible d’avoir des conséquences médicales délétères. Si cette femme ne présente pas de complications, elle sera considérée comme innocente. Par contre, l’homme sera considéré comme innocent de toute faute (en rapport avec sa jalousie, je suppose) mais c’est son épouse qui sera chargée de sa faute (verset 31)! Jésus, quant à lui, pardonne à une femme adultère (Jean 8:1-11) alors que l’infidélité semble démontrée. Cependant, dans d’autres textes, il explique que pas un iota de la Loi ne sera aboli et qu’il est venu pour l’accomplir …., mais selon une lecture de la Loi avec le regard de la compassion et de l’amour. Ma question : comment continuer à intégrer ce texte des Nombres dans notre méditation spirituelle des Écritures ? Bien à vous.

Réponse d’un pasteur :

Cher Monsieur

Grand bravo de lire la Bible et de vous poser des questions, de chercher à méditer ces textes, c’est formidable et je suis certain que cela vous apportera énormément.

Pourquoi existe-t-il des textes scandaleux dans la Bible ?

La Bible n’est pas un livre fait de bonnes petites histoires morales, avec le héros à la conduite exemplaire et à la foi parfaite trace un chemin de vie à imiter. Sauf en ce qui concerne Jésus dont le portrait donne une figure à l’humain parfait, c’est vrai, mais pour tout le reste de la Bible, ce n’est pas le cas, bien au contraire. Chaque situation appelle à la réflexion, à l’interrogation. Que ce soit le comportement d’Abraham avec sa femme Sarah, ou celui de Jacob, celui de Noé, de David, des apôtres…

La même question se pose vis à vis des commandements, en particulier ceux de la Bible Hébraïque, mais aussi ceux de la bouche de Jésus lui-même. Ce serait de la folie de les appliquer à la lettre et ils ne sont pas là pour ça.

  • D’abord parce qu’effectivement certains viennent du fond des âges, avec ce tabou du sang qui rendrait les femmes impures à cause des règles (alors que c’est signe de vie), et même à cause de l’accouchement (qui est pourtant la vie). Ou ces commandements très approximatifs du point de vue médical en ce qui concerne la lèpre…
  • Le commandement que vous relevez appartient à cette classe de pratiques qui vient du fond des âges, à peu près sous toutes les cultures existait ce genre d’ordalie se fiant sur une sorte de tirage au sort (ou de piège impossible, c’est facile à manipuler) pour soi-disant laisser Dieu ou les dieux juger la personne mise en accusation. C’est comme cela que l’on avait une possibilité de se débarrasser d’une personne qui ne nous plaît pas, une personne atypique ou un concurrent gênant…
  • Mais même en dehors de cela, je ne pense pas que les juifs ou les chrétiens les plus fondamentalistes n’aient jamais pensé appliquer le commandement de faire lapider son enfant quand il est rebelle à l’autorité des parents (Deutéronome 21:21). Même il y a 2500 ans, d’après les rabbins, ce commandement du deutéronome n’a pas été appliqué (fort heureusement).
  • Et le commandement de Jésus de ne « pas résister au méchant » n’est pas non plus un commandement à prendre au pied de la lettre sans se poser de questions, sinon les pédophiles, gangsters et violeurs vont bien rigoler dans la cité idéale…

Passer ce texte, ou faire une lecture spirituelle

Donc, vous avez raison, il faut faire de ces textes une lecture spirituelle, autant que possible, une lecture qui se pose des questions, qui prend au sérieux ces textes même ceux qui ne nous plaisent pas, pour chercher ce que nous pouvons tirer de bon. Pour nous chrétiens, il est essentiel de chercher à faire comme vous dites, une recherche d’interprétation qui soit cohérente avec ce que nous voyons Jésus de Nazareth vivre concrètement. Si on n’y arrive pas avec un texte, il est bon de le laisser de côté, de passer tranquillement : on le comprendra une autre fois, ou non. Ce n’est pas grave, dans la somme de ces 66 livres de la Bible, dans la diversité des styles, des époques, des compréhensions de Dieu et de ce qui est essentiel… nous trouverons de quoi nous faire cheminer.

Je ne sais pas si spontanément j’ai envie de me réconcilier avec ce texte pénible en ce qui concerne la jalousie de l’homme et cette ordalie. Rien ne me semble cohérent avec ce qui est juste : le côté misogyne, la jalousie, cette épreuve mettant en danger la femme, cette épreuve cruelle ayant de plus un résultat aléatoire, l’innocence déclarée du mari ayant été injustement jaloux et ayant fait subir une grande peine morale, physique et publique à sa femme… et la lapidation de la femme si elle a l’estomac fragile et la « cuisse » déréglée… on est tout à fait en droit de passer ce texte sans approfondir.

Mais bon, je veux bien relever le défi. La piste qui est souvent intéressante pour lire ce genre de textes difficiles est de chercher s’il pourrait avoir du sens en le comprenant comme parlant entièrement de nous-même (chaque personnage de l’histoire représentant une partie de la personne que nous sommes). Cette piste d’interprétation est millénaire, on la trouve par exemple chez Philon d’Alexandrie (contemporain de Jésus). Ici, nous serions alors à la fois l’homme, la femme et le prêtre. Cela pourrait nous donner à penser, que quand nous avons l’impression qu’en réalité notre vie ne serait peut-être pas tellement fidèle à ce que nous croyons (ce qui n’est pas invraisemblable), nous pouvons alors prier Dieu (plutôt que d’aller voir le pasteur, mais bon, pourquoi pas aussi) et demander à Dieu dans la réflexion et la prière de nous aider à voir clair, à l’épreuve des faits. Dans tous les cas, nous ne sommes pas coupables de douter de nous-même (sas exagérer non plus). Et pour ce qui est de notre infidélité, nous la détecterons alors à la douleur de nous être trompé nous-même, d’avoir raté notre cible, nous pourrons alors travailler là-dessus en nous aidant du secours de la Loi (de la Bible) et de la prière pour progresser, avec l’aide de Dieu… et réduire ce qui en nous était souffrant, tordu, blessé, mal grandi ?

Se réconcilier avec Nombres 5:11-31 ?

Pour ce qui est de la question de l’infidélité, c’est vrai que c’est un poison de l’âme, l’infidèle trompe l’autre et se trompe lui-même. C’est même à mon avis plus ennuyeux que cela, aussi bien dans notre vie avec d’autres personnes, que dans notre propre cheminement de vie personnel. L’infidélité est comme si dans le langage, les mots n’avaient plus de sens défini que le mot « chaud » pouvait parfois signifier « froid », ou comment nous pourrions circuler sur les routes si « rouge » voulait tantôt signifier « vert », jaune ou rouge, si « droite » voulait tantôt signifier « gauche » quand on le décide… la sécurité routière serait asse aléatoire. De même pour ce qui est de la vie.

Quand à la jalousie, c’est aussi un sacré poison.

Bonne lecture de la Bible, bonnes recherches, avec l’aide de Dieu.

Dieu vous bénit et vous accompagne.

par : pasteur Marc Pernot

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9 Commentaires

  1. Au sujet des paraboles dit :

    Oui merci pour ce très beau texte d’Ephrem.

    I. Voici une interprétation personnelle de pourquoi Jésus parle en paraboles en public, mais les explique au moins en partie en privé à ses disciples : la loi mosaïque de la Torah-Pentateuque (et non les Dix Paroles du décalogue) prévoit une punition sévère pour des enseignements de Jésus dont certains peuvent être considéré comme blasphématoires (voire les différents récits du procès de Jésus devant le Sanhédrin). Il cherche aussi à faire s’éloigner de lui par du semblant de non-sens au moins momentanément certains qui cherchent à le piéger et à rapporter aux autorités ses faits et gestes jugés hors-la-loi-mosaïque.

    II. Suggestions pour l’interprétation de paraboles des enseignements de Jésus :
    1. lecture poétique, poétisante ? Écoute des différents sens des mots. Intuition d’un sens cherchant à allier le sensible (analogies de la parabole) et l’intelligible (l’enseignement) en même temps. Le sujet ou l’enjeu reste ineffable : la « vie éternelle ici-bas » : l’entrée-sortie éphémère ou plus ou moins prolongée dans le Royaume de Dieu ?
    2. recours au contexte historique partagé de la culture commune des auditeurs de Jésus à l’époque : résonnance, parallèle, écho, intertextualité avec un ou plusieurs livres d’une traduction de la Bible hébraïque (ou des targums correspondants en araméen, ou de la Peshitta) ou de la Septante en grec ? Recours à des « concordances » (je dis bien des car elles ne sont pas équivalentes, ni complètes), présentes dans certaines bibles d’étude (ou plus simplement recherches sur des moteurs de recherche en ligne avec quelques mots clefs et noms de livres bibliques), en se focalisant par exemple sur les entrées compatibles sur le fond avec l’épître 1-Jean : Dieu est Amour et justice, et Dieu est Lumière et il n’y a pas de ténèbres en lui, même dans sa justice divine. Et recherche de concordances entre les thèmes des analogies dans les paraboles : qui est le berger, les brebis ou équivalents dans ces textes… : David ? Dieu-l’Éternel ? Quel rôle Jésus indique-t-il alors pour lui-même à travers la parabole : un nouveau Moïse qui révèle l’essentiel ? un nouveau David ? un envoyé oint de Dieu, un Messie donc ? Dieu-le-Fils ? Cette révélation parabolique, indirecte, ouvre la voie à toutes les interprétations, les Bibles d’étude, les commentaires bibliques, les essais de théologie, les méditations bibliques…
    [3. peu praticable, ou équivalent des pistes noires en ski, mais cela a pu jouer aussi dans l’établissement du texte tel qu’il nous est parvenu : 3. écoute poétisante en langues sources (grec/araméen : Peshitta/hébreu) ]

  2. Lili dit :

    « Le Seigneur a coloré sa parole de multiples beautés, pour que chacun de ceux qui la scrutent puisse contempler ce qu’il aime. Et dans sa parole il a caché tous les trésors, pour que chacun de nous trouve une richesse dans ce qu’il médite ».
    C’est très beau et je trouve, assez vrai, car il est difficile vis-à-vis de cette parole de se sentir entièrement étranger. Parfois l’écho est nul ou très faible certes, mais parfois il est aussi bouleversant, on ne sait pas toujours pourquoi. C’est surprenant. C’est aussi un encouragement à partager les points de vue. Merci pour ce texte qui apporte sa lumière de si loin.

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