16 août 2018

pas oui = non (illustration) - Image:
Ethique

La Bible permet elle le viol conjugal ?

Par : pasteur Marc Pernot

pas oui = non (illustration) - Image: 'untitled' by zogh  https://creativecommons.org/licenses/by-sa/2.0/ http://www.flickr.com/photos/62584153@N07/6361675023

Quand ce n’est pas oui = c’est non ! Quand c’est non = c’est non aussi.

Question posée :

Bonjour ou bonsoir

Dieu tolère-il le viol de la femme par son mari ? Je me suis toujours demandé, pourquoi Dieu a-t-il « écrit » des choses comme ça, ou a fait écrire des choses comme ça, si je puis dire ?

J’ai déjà demandé à des frères et sœurs dans mon église, les uns me disaient clairement qu’ils ne voyaient pas où il était question de ça, les autres me disaient clairement que oui, et alors ? Et ils ajoutent qu’il ne fallait pas remettre Dieu et sa Parole en question, ce que je ne fais absolument pas, je cherche simplement des réponses.

J’espère ne pas vous embêter avec toutes mes questions…

Réponse d’un pasteur :

Bonjour madame

Bien sûr que Dieu ne tolère pas le viol conjugal ! Comment le pourrait-il, lui qui veille sur chacun de ses enfants comme une tendre maman sur son bébé ? Comment le voudrait-il alors qu’il commande d’aimer son prochain ?

Mais les mentalités sont lentes à entendre la volonté de Dieu. Et l’apôtre Paul n’a peut-être pas une expérience de ce que peut représenter une relation sexuelle contrainte ? Et la condition de la femme, sa place dans le couple avait encore à être revisitée à la lumière de tout le respect et l’amour, le service que Jésus place au cœur de toute relation humaine et donc encore plus dans l’attitude de chacun vis à vis de son conjoint.

Ce n’était sans doute pas l’intention de Paul, et encore moins la volonté de Dieu, mais oui, j’ai malheureusement été témoin de bien des femmes maltraitées à cause d’une lecture littérale de ces versets de Paul :

« Femmes, que chacune soit soumise à son mari, comme au Seigneur; car le mari est le chef de la femme, comme Christ est le chef de l’Eglise qui est son corps, et dont il est le Sauveur. Or, de même que l’Eglise est soumise à Christ, les femmes aussi doivent l’être à leur mari en toutes choses. » (Ephésiens 5:22-24).

En effet, même si ensuite Paul dit aux maris d’aimer leur femme comme le Christ a aimé l’église, le commandement donné à l’épouse ne laisse place à aucune réserve du genre « à condition que votre mari n’abuse pas… », il y a bien marqué, sans limite ni réserve que la femme doit être soumise à son mari comme au Seigneur lui-même !!! Et l’on sait bien quelle est la volonté de certains maris quand ils rentrent en colères, avinés, ou excités, ou travaillés par leurs hormones, ou mal éduqués par des parents qui on laissé leur garçon traîner dans la rue et devenir un petit caïd trouvant normal de faire ce qui lui passe par la tête.

D’ailleurs, l’apôtre Pierre dans sa lettre dit la même chose mais il sait bien (lui qui est marié et qui en a peut-être été coupable lui-même) que l’homme abuse parfois. Alors Pierre conseille à la femme de subir en espérant que cela va instruire l’homme dans la voie du bien et de l’amour. C’est parfois vrai, c’est bien souvent faux, le fait de se laisser maltraiter par son mari induit un risque de surenchère, le mari se faisant une joie d’interpréter la patience de la femme comme une acceptation tacite :

« Femmes, que chacune soit de même soumise à son mari,
afin, que, si quelques-uns n’obéissent point à la parole,
ils soient gagnés sans parole par la conduite de leur femme » (1 Pierre 3:1).

Paul dit par ailleurs :

« Ce n’est pas la femme qui dispose de son corps, c’est son mari. De même, ce n’est pas le mari qui dispose de son corps, c’est sa femme. » (1 Corinthiens 7:4 )

Les choses semblent bien équilibrées entre le mari et la femme. Et c’est très bien ce qui concerne l’idée qu’il n’est pas bon d’utiliser son corps pour aller coucher à droite ou à gauche (ni pour l’homme ni pour la femme, bien sûr). Dans ce sens, oui, en nous engageant, ne nous appartient pas au sens où nous pourrions en faire n’importe quoi, ne pas l’entretenir mais aussi en disposer pour coucher avec d’autres.  Seulement, ce n’est pas facile à une femme de violer son mari, par contre le fameux « Ce n’est pas la femme qui dispose de son corps, c’est son mari. » a été reçu avec grande joie par bien des hommes ! Oui, cette phrase peut être interprétée (littéralement mais de travers quand même) comme imposant aux femmes de se soumettre docilement comme un objet que possèderait son mari ! Une mauvaise interprétation, littérale, de ce verset a donc, reconnaissons-le, engendré bien des peines et de la douleur par des femmes qui du coup, par la foi, n’osent pas se refuser quand elles n’ont pas de désir (ce qui a d’autant plus de chance d’arriver qu’elle a un mari brutal qui ne pense qu’à assouvir son propre plaisir et qui se sent propriétaire du corps de la femme).

Et en plus, quelques versets plus loi, Paul piège les femmes dans le couple, même quand son mari serait épouvantable en affirmant très très très solennellement, avec encore une fois aucune limite ni circonstances limitant la portée de cet ordre « du Seigneur », selon lui :

« A ceux qui sont mariés, j’ordonne, non pas moi, mais le Seigneur, que la femme ne se sépare point de son mari. »

Par conséquent, violée, battue, humiliée, la femme devrait accepter, pardonner, continuer à rester avec ce mari ayant plus de forces physique qu’elle !

Et bien non.

Cette mauvaise lecture littérale n’est en aucune façon fidèle à Dieu. C’est curieux car pourquoi est-ce que certains vont utiliser ces versets pour exiger à leur femme de se soumettre à la dictature de leur mari et de son sexe ?! Pourquoi ne prennent-ils pas comme essentiels ces versets de la bouche même de Jésus appelant à chercher prioritairement  le bien de l’autre ? Ou ces versets où Paul également appelle à considérer l’autre comme supérieur à soi-même ? Non, ce sont comme par hasard une interprétation autorisant les hommes à être de véritables tyrans domestiques qui sont élevés au rang de parole divine ! Ce n’est pas la faute de l’Evangile mais uniquement la folie du sexisme mâle.

Même si elle arrive à pardonner un jour au mari qui la maltraite, la femme ne doit pas accepter de se laisser maltraiter. Car si Dieu aime le pécheur, il a horreur du mal. Et le devoir de tous est de protéger la victime contre l’agresseur. Même quand on est soi-même la victime, il n’est pas question de laisser l’agresseur continuer à agir de cette façon. Ce n’est même pas bon pour lui non plus, d’agir comme cela comme si c’était normal. Et c’est dramatique pour la femme et pour les enfants éventuels. Mais si souvent l’agresseur se débrouille pour que la femme battue, humiliée, violée se sente elle-même coupable ! ! ! Ces versets, quand ils sont lus à la lettre sont très puissants dans ce mécanisme pervers. Surtout avec les menaces de certains fondamentalistes qu’il ne faut pas remettre Dieu et sa Parole en question. Certes mais leur erreur criminelle, en ce cas est de confondre ce genre de verset et la parole de Dieu. Car la parole de Dieu est source de vie, elle est amour elle est certainement contre la violence, particulièrement entre époux.

Alors que celui qui frappe une autre personne est coupable de violence. Celui qui force une autre personne à avoir une relation sexuelle est coupable d’agression sexuelle. Celui qui pénètre une autre personne sans qu’elle le désire est coupable de viol. C’est cela qui est profondément contraire à la volonté de Dieu. Il n’est donc absolument pas question de laisser cela se commettre sans le dénoncer, afin de mettre un point final à cela.

Donc, non, absolument non, Dieu ne valide pas le viol conjugal.
C’est simplement la lecture fondamentaliste de la Bible qui conduit à l’autoriser.

Que Dieu vous bénisse

par : Marc Pernot, pasteur à Genève

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Un commentaire

  1. Jeep22 dit :

    Il semble que le cher Shaoul/Paulos était célibataire, certains commentateurs comme Spong suggérant même qu’il avait des tendances inavouables refoulées. Mais même autrement on se retrouve avec le schéma d’une Eglise catholique dont le personnel est censé ne rien connaitre de la vie de couple, qui continue à exclure les femmes, et qui se mêle de donner des conseils de vie de couple.

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