19 décembre 2022

une main d
Question

J’ai du regard des autres chrétiens de mon église et de ce qu’ils peuvent penser de mon absence.

Par : pasteur Marc Pernot

une main d'étudiant en train de faire ses devoirs - Photo de Green Chameleon sur https://unsplash.com/fr/photos/s9CC2SKySJM

Question d’uns visiteuse :

Bonjour,

Je me permets de vous solliciter par mail après avoir visiter la section questions-réponses de votre site internet. Je me trouve dans une situation un peu floue par rapport à ma pratique depuis que je me suis convertie et je n’ose pas m’ouvrir sur ces questions aux autres chrétiens de mon entourage par peur d’être jugée certainement, donc je viens à vous dans l’espoir de trouver des réponses.

Je n’arrive pas à être régulier dans mon service ou même dans le fait d’assister au culte dominical tout au long de l’année, et ça provoque chez moi beaucoup de frustration et d’anxiété. Les raisons qui me poussent à ne pas être régulier viennent souvent de mon quotidien scolaire, pendant certaines périodes de l’année je suis davantage chargée au niveau de mes devoirs ou des projets que je dois rendre, et je n’arrive pas à me déconnecter et à me dire « maintenant pose ça et va à l’église ».

Du coup je suis capable de ne pas y aller pendant plusieurs semaines. Quand les choses se calment j’y retourne, mais difficilement. Cette difficulté vient de la peur que j’ai du regard des autres chrétiens de mon église et de ce qu’ils peuvent penser de mon absence. Je n’arrête pas de me dire en boucle dans ma tête qu’ils vont me juger, qu’ils vont se dire que je ne suis pas vraiment chrétienne si je ne vais pas à l’église pendant un aussi gros lapse de temps. Inconsciemment j’accorde une très grande importance à l’avis des autres chrétiens et à leur validation, je ne sais pas pourquoi. Du coup , dans ces moments là quand je retourne à l’église, je me replie énormément sur moi-même, j’évite les regards, je plaque un faux-sourire sur mon visage alors que j’ai la boule à la gorge, j’évite les conversations et je repars vite à la fin du culte de la façon la plus discrète possible parce que je me sens mal à l’aise, j’ai l’impression non j’en suis persuadé que toute l’assemblée me juge. Et c’est comme ça à chaque fois, chaque dimanche que je rate c’est une mesure d’anxiété en plus que je me rajoute sur le coeur. J’en arrive à venir aux cultes uniquement dans le but que les autres chrétiens dans l’église ne me juge pas sur mon absentéisme prononcé, en gros je viens au culte pour éviter le jugement des autres. Même chose pour le service, à force de se faire rabâcher que celui qui vient juste au culte pour écouter le prêche est juste un consommateur , je me suis engager dans un service que j’honore plus assidûment mais juste pour éviter d’être vu comme un consommateur. Au final, ma vie a l’église repose beaucoup sur le regard des autres, pour moi la vie à l’église est une sorte de performance sociale où il faut prouver que tu es chrétien par ton service, par ta présence le dimanche. Quand je suis face aux autres, les injonctions que je perçois sont les suivantes : « montre nous tes oeuvres » « prouves nous ta foi ». Des trucs dans ce sens. Du coup je perds confiance en moi, et je me dis au final peut-être qu’ils ont raisons, ce n’est pas la première fois que j’ai ce genre d’approche ou de comportement. J’ai été dans deux églises en tout, et la première je la fréquentais de façon plus régulièrement mais toujours dans la peur de me faire juger au final, pire je pensais que si je ne servais pas Dieu allait m’oublier. Bref, tout ceci sur le long terme n’est pas très sain. A force de voir des jugements partout, je suis sur la défensive avec toutes les personnes de mon église, je les fuis, je les évite, je prie pour ne pas les croisées dans la rue. Ça commence à prendre des proportions assez énormes. J’envisage de ne plus retourner du tout dans l’église car je ne vois plus ce lieu que comme une énorme source d’anxiété et d’angoisse, mais ce serait comme donner raisons aux personnes de mon église, et ça entamerait encore plus ma confiance en moi.

Comment sortir de cette spirale infernale ?
Comment retrouver une pratique plus apaisée ?

Merci de l’attention que vous porterez à ce mail

Cordialement

Réponse d’un pasteur :

Bonsoir

Je suis épaté par votre démarche, elle me semble excellentissime, sincère, profonde, réfléchie.

Donc la première chose que je peux vous répondre, de bon cœur, c’est que vous n’êtes pas si mal partie que vous le pensez.

D’abord, c’est tout à fait normal de ne pas aller au culte si on a des examens à préparer, ou une surcharge de travail, ou une jolie occasion d’aller cueillir des champignons. L’église n’est qu’un exercice, c’est utile de pratiquer régulièrement, à son rythme. Mais c’est nocifs de se sentir culpabilisé si on manque. Bien sûr.

Vous faites exactement le bon diagnostique : le problème est que vous attachez trop d’importance au jugement des autre sur vous-même. Ensuite, c’est tout à fait normal, tout le monde est naturellement comme cela car l’humain est un animal social et donc les relations avec les autres ont pour nous une grande importance. Cela demande un travail, une évolution progressive afin d’avoir assez d’assurance, assez d’estime de soi pour ne pas trop craindre le regard des autres, sans pour autant être indifférent à ce que sont et ce que pensent les autres non plus.

La réflexion aide à faire ce travail. La foi aussi. Comme vous avez les deux : et l’intelligence et la foi (manifestement), je pense que vous progresserez bien dans cette démarche. Si l’on a une ou deux personnes qui sont de véritables amis (dans la famille proche éventuellement), cela aide aussi énormément dans ce domaine. Vous êtes peut-être très sensible, c’est à la fois une immense qualité, ou cela deviendra une qualité géniale, mais effectivement, il est bon de ne pas trop non plus vous exposer à la méchanceté de certaines personnes.

La foi aide dans ce domaine, car Dieu agit directement pour nous aider à avancer. Seulement il me semble particulièrement important de se forger peu à peu un profonde conviction que Dieu est amour, qu’il vous aime inconditionnellement , qu’il vous aimerait même si vous étiez son ennemie (nous dit Jésus), même si vous étiez la plus perdue de ses brebis perdues (il y a de la marge !). Et donc que jamais en aucune circonstance vous auriez à craindre que Dieu vous oublie !!! En travaillant sur cette conviction, en particulier dans la prière, je pense que vous recevrez de lui plus d’estime de vous même. Si Dieu vous aime et est attaché à vous c’est bien que vous êtes aimable à ses yeux.

Ensuite, dans le domaine de la religion et des œuvres, vous avez tout à fait raison. L’authenticité est essentielle. La sincérité. La conviction personnelle.
C’est pourquoi Jésus nous invite à prier chez nous, en privé, porte fermée. Ce qui se passe entre Dieu et nous ne regarde personne.
Les activités en église sont uniquement des exercices afin de nous aider à avancer. C’est ce que dit Jésus « le sabbat (la religion) est fait pour l’humain, et non l’humain pour le sabbat (la religion) ». C’est donc à vous de sentir quelle activité, quel rythme, quelel église vous convient, c’est à dire est favorable à votre bon cheminement personnel, à la fois dans votre équilibre personnel, dans votre foi, dans votre réflexion théologique. Ensuite, vous pouvez doser avec souplesse, évaluer ce qui vous convient, adapter le programme comme vous le feriez pour du sport. Et dans cela, les autres n’ont absolument rien à vous dire. Si une personne vous faisait une remarque (on n’est jamais à l’abri de croiser une personne maladroite), ce que dit cette personen est le reflet de ce que cette personne a, elle, dans son cœur, car elle n’a absolument pas à faire à quiconque la moindre remarque non sollicitée en ce domaine. Et le pasteur non plus (encore moins, dirais-je, car lui sait que l’on n’a pas à juger son prochain – c’ets l’histoire de la paille et de la poutre que raconte Jésus).

C’est une bonne idée d’être au service des autres, c’est vrai. Mais là encore, c’est bon quand c’est fait sincèrement, quand cela nous vient comme une envie personnelle de faire cela, que cela vient parce que nous aimons le résultat de cette action, le bien qu’elle fait, les équipes qui agissent. Nous pouvons être fiers de ce que nous faisons, mais si c’est la seule motivation, c’est quand même un problème, à mon avis.

Je ne peux être certain de ce qui est le mieux pour vous aujourd’hui. C’est à vous de discerner par vous-même.

  • Peut-être qu’il suffit que vous adaptiez le rythme de votre pratique à l’église en allant régulièrement mais moins souvent, genre une ou deux fois par mois, de quitter poliment ce service auquel vous vous astreigniez (et si cela ne plait pas aux responsables de l’église : d’en choisir une plus respectueuse de la personne).
  • Plus probablement, comme vous le dites, peut-être qu’il est nécessaire, à ce stade, de prendre une pause radicale afin de couper cette spirale infernale. De quelques mois peut-être. Avant de reprendre là où ailleurs quand vous le sentirez. Et pendant ce temps là entreprendre ce travail sur vous même, par la réflexion, la prière, en étant en relation avec de bonnes personnes. Peut-être en prenant des temps de retraites spirituelles autrement ?

En tout cas, soyez assurée que Dieu vous comprend, et qu’il vous accompagnera dans ce que vous choisirez. Bien sûr.
Dieu vous bénit et vous accompagne.

par : pasteur Marc Pernot

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