16 octobre 2024

Photo en noir et blanc d'une jeune femme lisant un livre assise sur le bord d'un canal. Image par Patrick Marty de https://pixabay.com/fr/photos/fille-seine-paris-lecture-livre-803812/
Bible

Quand on me parle de guerre divine où la destruction d’un peuple est la volonté de Dieu, cela ne me convient guère. Quelle piste d’interprétation ? Je lis en ce moment Ésaïe.

Question posée :

Cher Marc Pernot,

Depuis quelques temps, je lis quotidiennement la Bible et récemment, j’ai décidé de me pencher sur le livre d’Esaïe. Toutefois, il me manque énormément de clés de lecture et de compréhension ce qui fait que j’ai de la peine à comprendre les textes autrement que littéralement et sans contexte ce qui, quand on me parle de guerre divine où la destruction d’un peuple est la volonté de Dieu, ne me convient guère. Pourriez-vous me donner quelques clés de lecture ou éléments de contexte sachant que je suis à la moitié du premier Esaïe (~ chap 14) ?

Merci d’avance !

Meilleures salutations,

Réponse d’un pasteur :

Chère Elodie

Bravo ! C’est une bonne idée de lire la Bible régulièrement et de se poser des questions : c’est très favorable pour avancer, pour grandir dans notre façon de vivre, d’espérer, d’agir, de prier et de s’ouvrir à Dieu.

Mais pour cela, vous avez raison : il est essentiel de ne pas laisser abîmer notre confiance en Dieu, ni par des prêches menaçants que l’on voit fleurir parfois, et encore moins par le texte de la Bible.

Pour cela, il me semble essentiel d’abord d’être bien nourri par l’Évangile du Christ, par ses paroles et par sa façon d’être qui manifestent l’amour de Dieu jusqu’à ses ennemis, ceux qui sont étrangers à ce qui est juste et bon. Ensuite, comme vous le dites, il nous revient de donner notre interprétation de ces textes anciens de la Bible hébraïque, qui contiennent des trésors, mais d’un abord plus rude, parfois. C’est dû en partie à l’ancienneté de ces textes, mais aussi au mode de communication et au statut de ces textes. Voici quelques cas typiques :

1) Nous invite à faire évoluer notre théologie.

Dans les récits du déluge ou de l’horrible sacrifice de son fils par Abraham : Dieu semble violent au début, mais s’arrange au cours du récit pour devenir un Dieu bon qui fait alliance ? En Christ, on sait que Dieu a toujours été bon : ce genre de récits nous encourage à nous-mêmes convertir notre théologie. Nous pensions peut-être que Dieu pourrait être un Dieu violent qui punit et qui tue, qui éprouve, nous convertissant, nous découvrons un Dieu qui est et demeure en toute circonstance un Dieu de tendresse. Vous trouverez ce genre de récits dans les prophètes comme Esaïe, avec Dieu qui dit au début qu’il en a assez et qu’il va punir, tuer, écraser les méchants, à commencer par son peuple, puis on voit Dieu qui dit ensuite qu’il va les sauver.

2) Une libération de ce qui nous enferme, nous fait souffrir

L’exode des Hébreux hors d’Égypte se fait par l’aide de Dieu qui noie les soldats du pharaon dans la mer et permet aux Hébreux de se mettre en route : c’est la Pâque qui est une figure de notre libération de ce qui nous opprime, nous fait souffrir, nous rend esclave. L’avantage de ce langage figuré est qu’il permet d’identifier ces Égyptiens à tout ce qui nous empêche d’être nous-mêmes, nous rend esclave, pour aller vers la vie bonne et belle, juste et vraie avec les autres et avec Dieu. Une relecture de ces récits est donc toute trouvée et fort utile : car chacun a ses chaînes et ces forces qui le retiennent en arrière, ses résistances, ses difficultés, ses traumatismes, son caractère… Cela peut être relu par nous comme l’aide miraculeuse de Dieu pour éliminer radicalement ce qui nous fait du mal en nous. Parce que les vrais Égyptiens ne sont certainement pas moins aimés par Dieu, et il ne veut donc pas leur mort, mais qu’ils puissent avancer dans leur vie comme les autres. À la fin de l’Exode, à l’entrée-même en terre promise, Josué et les Hébreux butent sur Jéricho et à la population locale qui résiste à l’envahisseur, ce que l’on comprend facilement. Encore une fois, Dieu donne une victoire miraculeuse à son peuple et il aurait ordonné de tout détruire dans Jéricho : la ville, ses richesses, ses habitants du plus jeune au plus âgé, ses animaux, des vaches jusqu’au plus petit poulet. Horrible. Ce « pas de quartier » à Jéricho nous appelle à tourner la page radicalement, avec l’aide de Dieu, sur certains de ces points de blocage sur le chemin de la vie.

3) Le « petit reste » que Dieu sauve : la bienveillance radicale de Dieu

Dans bien des textes, comme dans le PSAUME 1er, il y a une figure du méchant et une figure du juste. Les deux concernent toute personne. Dieu cherche à éliminer ce qui en nous est méchant : notre méchanceté et à supprimer sa racine dans notre être (la peur, l’angoisse, les traumatismes, une volonté de puissance destructrice…), et Dieu cherche à délepper en chacun toute potentialité de bonté et de créativité. Dans les prophètes, vous trouverez mention parfois du « petit reste » au milieu du peuple infidèle et rebelle, Dieu partant de ce petit reste et envoie massacrer le reste. On peut le relire comme un soin de Dieu pour faire vivre, comme un médecin opère une personne d’un cancer par l’ablation d’une tumeur. Ce n’est pas pour torturer ou punir la personne, mais pour la sauver. C’est un appel à discerner ce qui ne va pas en nous et à compter sur Dieu pour nous aider.

Voilà quelques pistes de relecture possibles en fonction de votre propre inspiration. En lisant le texte biblique, la question est de nous lire nous-mêmes, nous et notre monde, et de chercher ce que nous pouvons faire pour avancer et comment nous ouvrir à ce que Dieu espère nous apporter pour nous sauver : nous libérer, nous soigner, nous aider à avancer dans la vie, relever le meilleur en nous… C’est donc un aller-retour entre la lecture biblique et la prière : pour une observation et une réflexion lucide, une confiance en Dieu.

Dieu vous bénit et vous accompagne.

par : pasteur Marc Pernot

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6 Commentaires

  1. Marie dit :

    C’est une « grille de lecture » intéressante. J’en ai une autre, un peu audacieuse je l’avoue: J’AIME beaucoup l’idée que Dieu lui-même se convertit. C’est ainsi que je lis aussi les « marchandages » entre Abraham et Dieu, entre Moïse et Dieu. L’homme rappelle Dieu au meilleur de lui-même: « vraiment, si tu es CE Dieu là, tu ne peux pas faire cette chose, tu te renierais toi-même ». J’emploie la même grille de lecture dans l’Evangile, quand Jésus rencontre cette femme syro-phénicienne, dont il refuse de guérir la fille, parce qu’elle n’est pas juive. La foi de cette femme, prête à soulever des montagnes, non pas pour elle mais pour sa fille, « convertit » Jésus, qui ne peut plus se refuser à elle. J’espère que je ne vous choque pas 🤨.. Bien à vous, comme toujours.

    1. Marc Pernot dit :

      Oui, tout à fait. Grand merci, Marie.
      On trouve une « conversion de Dieu » explicitement dans l’histoire du Déluge. Je comprendrais cela de deux façons :

      1. Dieu est vivant, donc il évolue, il tient compte de la situation présente.
      2. C’est notre pensée sur Dieu qui est appelée à évoluer, à changer, à travers ces récits de conversion de Dieu. Par exemple dans l’histoire du Déluge : passer d’une idée que Dieu serait intransigeant à l’idée de que Dieu fait alliance avec nous bien que nous soyons imparfaits. Cela change effectivement tout.

      Pour Jésus et la femme Syro-Phénicienne, je ne pense pas que Jésus était xénophobe avant de la rencontrer, le fait d’être le Christ inclut de toute façon l’ouverture du salut de Dieu à toutes les nations. Mais Jésus accepte de déroger à sa stratégie pour transmettre le salut au monde.
      Voir https://jecherchedieu.ch/temoignages/jesus-et-la-cananeenne-non-jesus-n-etait-pas-xenophobe-matthieu-15/

      1. Jean-Pierre dit :

        Bonjour Pasteur Marc Pernot,
        Bonjour chers amis visiteurs de ce site,
        Grand merci pour tous vos commentaires, pour toutes vos excellentes réflexions !!!
        Personnellement, depuis quelques années maintenant, en relisant et relisant la Bible, je ne crois plus que Dieu ait ordonné toutes ces guerres, toutes ces exterminations, tous ces massacres décrits dans l’Ancien Testament :
        2 Rois 19:35 (Bible version Louis Segond – LSG) : « Cette nuit-là, l’ange de l’Éternel sortit, et frappa dans le camp des Assyriens cent quatre-vingt-cinq mille hommes. Et quand on se leva le matin, voici, c’étaient tous des corps morts. »
        Deutéronome 25:17-19 (LSG) : « 17 Souviens-toi de ce que te fit Amalek pendant la route, lors de votre sortie d’Égypte, 18 comment il te rencontra dans le chemin, et, sans aucune crainte de Dieu, tomba sur toi par derrière, sur tous ceux qui se traînaient les derniers, pendant que tu étais las et épuisé toi-même. 19 Lorsque l’Éternel, ton Dieu, après t’avoir délivré de tous les ennemis qui t’entourent, t’accordera du repos dans le pays que l’Éternel, ton Dieu, te donne en héritage et en propriété, tu effaceras la mémoire d’Amalek de dessous les cieux: ne l’oublie point. »

        1 Samuel 15:1-3 (LSG) : « 1 Samuel dit à Saül: C’est moi que l’Éternel a envoyé pour t’oindre roi sur son peuple, sur Israël: écoute donc ce que dit l’Éternel. 2 Ainsi parle l’Éternel des armées: Je me souviens de ce qu’Amalek fit à Israël, lorsqu’il lui ferma le chemin à sa sortie d’Égypte. 3 Va maintenant, frappe Amalek, et dévouez par interdit tout ce qui lui appartient; tu ne l’épargneras point, et tu feras mourir hommes et femmes, enfants et nourrissons, bœufs et brebis, chameaux et ânes. »

        Mon avis est que présenter Dieu comme un guerrier impitoyable et destructeur est une injure, une insulte, une grave offense, un affront, un outrage envers Lui qui est Amour.
        C »est également invraisemblable et impossible au vu des versets suivants :

        1 Thessaloniciens 5:15 (LSG) : « Prenez garde que personne ne rende à autrui le mal pour le mal; mais poursuivez toujours le bien, soit entre vous, soit envers tous. »

        1 Pierre 3:9 (LSG) : « Ne rendez point mal pour mal, ou injure pour injure; bénissez, au contraire, car c’est à cela que vous avez été appelés, afin d’hériter la bénédiction. »

        Romains 12:21 (LSG) : « Ne te laisse pas vaincre par le mal, mais surmonte le mal par le bien. »

        1 Jean 4:8 (LSG) : « Celui qui n’aime pas n’a pas connu Dieu, car Dieu est amour. »

        1 Jean 4:16 (LSG) : « Et nous, nous avons connu l’amour que Dieu a pour nous, et nous y avons cru. Dieu est amour; et celui qui demeure dans l’amour demeure en Dieu, et Dieu demeure en lui. »

        Jésus déclare en Matthieu 5:43-45 (LSG) : « 43 Vous avez appris qu’il a été dit: Tu aimeras ton prochain, et tu haïras ton ennemi. 44 Mais moi, je vous dis: Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent, faites du bien à ceux qui vous haïssent, et priez pour ceux qui vous maltraitent et qui vous persécutent, 45 afin que vous soyez fils de votre Père qui est dans les cieux; car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et il fait pleuvoir sur les justes et sur les injustes. »

        Jacques 1:13 (Bible version : Parole de Vie) : « Quand quelqu’un a envie de faire le mal, il ne doit pas dire : « C’est Dieu qui me pousse au mal. » Dieu ne peut pas avoir envie de faire le mal et il ne pousse personne au mal. »

        Il est donc impensable que Dieu ait pu ordonner des génocides (ni aucun autre massacre décrit dans la Bible) et j’en suis fermement convaincu aujourd’hui.
        Tous ces horribles massacres ne doivent pas être attribués à Dieu qui est amour (1 Jean 4:8,16).

        Les prophètes ont à tort attribué à Dieu toutes ces horreurs commises en son nom. Dieu n’en est pas responsable. Mais Dieu a permis que ces récits soient consignés dans la Bible. Toutefois, Dieu n’a pas dicté la Bible mot à mot.

        Romains 2:24 (LSG) : « Car le nom de Dieu est à cause de vous blasphémé parmi les païens, comme cela est écrit. »

        Ecclésiaste 7:20 (LSG) : « Non, il n’y a sur la terre point d’homme juste qui fasse le bien et qui ne pèche jamais. »

        2 Timothée 3:16-17 (LSG) : « 16 Toute Écriture est inspirée de Dieu, et utile pour enseigner, pour convaincre, pour corriger, pour instruire dans la justice, 17 afin que l’homme de Dieu soit accompli et propre à toute bonne œuvre. »

        Amitiés fraternelles,
        Jean-Pierre Wisniewski

        1. Marc Pernot dit :

          Grand merci pour cette belle étude.
          Dieu vous bénit et vous accompagne avec amour, effectivement.

        2. Johanna dit :

          Bonjour mon frère ,
          C’est une belle remarque que vous faîtes . En effet, Dieu est Amour et on le voit à travers l’exemple de Jésus Christ . D’ailleurs lorsqu’on nous présente l’amour dans la bible il est dit :  » L’amour est patient, il est plein de bonté; l’amour n’est pas envieux; l’amour ne se vante pas, il ne s’enfle pas d’orgueil, il ne fait rien de malhonnête, il ne cherche pas son intérêt, il ne s’irrite pas, il ne soupçonne pas le mal, il ne se réjouit pas de l’injustice, mais il se réjouit de la vérité; il pardonne tout, il croit tout, il espère tout, il supporte tout. L’amour ne meurt jamais. » L’Amour est la base de la chrétienté, c’est pourquoi notre foi se vit comme une relation et non comme une liste de règle à respecter . Toutes relations est forgé par l’amour . Le mal qui, se fait sont dût par nos actes .
          Soyez bénis

  2. Machaon dit :

    Il n’y a pas des personnes bonnes et des personnes méchantes Tout se trouve en nous et par la Parole de Dieu par son enseignement Il nous donne la victoire sur toutes ces ombres
    Mais avant tout il faut être à l’écoute de ce qu’il nous dit pour discerner nos ombres
    Il faut laisser passer la lumière et accepter ce qu’elle nous montre pour agir aux côtés de notre Père
    C’est un combat quotidien
    Loué sois Tu Père de toute éternité pour ton amour pour l’humanité Amen

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