Découragement et remords après bien des deuils cruels.
Question posée :
Bonjour Pasteur,
Je viens vous confier humblement ma douleur.
Malgré mon choix de rester en vie pour mon fils de 20 ans, malgré la foi que j’ai conservée, j’en remercie Dieu, malgré mon courage à me débrouiller sans mon défunt mari qui me manque aussi, sans la famille et les anciennes connaissances qui m’ont délaissée totalement, malgré mon but d’écrire et de composer de la musique en son souvenir, je suis dans une souffrance immense après le brutal décès de ma fille de 18 ans.
Je l’aimais, je voulais qu’elle vive, elle me manque cruellement a chaque instant, j aurai tout fait pour la sauver, j’aurai accepté de mourir a sa place sans hésiter une seconde, je ne sais pas si elle savait tout cela.
Bien que croyante je ne sais pas si elle est auprès de Dieu, bien que je prie pour cela.
Je me sens coupable de n’avoir pas été assez proche d’elle peut-être.
Je suis découragée, de ma faiblesse actuelle, de mes maladresses passées irréparables, du cruel silence des hommes, du silence de Dieu aussi.
Je vous remercie de me lire. Je vous remercie si vous parvenez a me répondre.
Recevez mes salutations respectueuses et fraternelles.
Réponse d’un pasteur :
Chère Madame,
Vous êtes une preuve vivante que l’amour est plus fort que la mort.
Et ce n’est pas une idée abstraite, c’est quelque chose d’infiniment fort, puissant, profond et vrai.
C’est un cri bouleversant.
Certes, Dieu ne « répond » pas avec des sons mais cet amour puissant qui nous habite, amour « plus fort que la mort » n’est-il pas déjà une transcendance absolument stupéfiante ?
Que faire d’une telle puissance de vie ? Oui, elle nous blesse par sa singularité, nous qui sommes aussi fait de matière en ce temps actuel.
C’est à mon avis à vivre simplement. Tout simplement : Nous aimons ? Alors vivons cet amour, c’est l’honorer.
On ne froisse pas une œuvre d’art, on ne déchiquette pas une fleur, on ne piétine pas un enfant, on ne méprise pas un beau sentiment.
Ah qu’il est beau, bon et vrai de vivre notre amour en l’honorant par la gratitude, par un sourire d’un instant. Ne serait-ce que cela. Et s’il nous inspirait parfois un geste qui rend une seconde une seule personne plus vivante ou ce monde un peu plus juste et plus beau ? Quelle victoire sur tout ce qui est de l’ordre de la mort, et qui blesse et qui fait souffrir, tout ce qui tue ce qui est beau et vrai.
N’ayez crainte que votre fille ne connaisse pas vos sentiments pour elle !
L’amour est plus fort que la mort, vous en êtes la preuve vivante. Comment pouvez vous l’aimer encore alors qu’elle n’est plus présente physiquement ? De la même façon elle vous connaît et vous aime, par cette vie même qu’est l’amour.
Donc : non ! les « maladresses passées » ne sont pas « irréparables » : elles sont résolues, dépassées, comprises, pardonnées par ce lien qu’est l’amour. C’est même plus beau que cela : en pensant à ces maladresses passées vous mettez tant d’amour pour votre fille que ces événements regrettables deviennent source de vie car ils sont l’occasion d’une pensée aimante et si belle. C’est ce retournement qui fait en quelque sorte la conclusion du livre de la Genèse, le premier livre de la Bible, quand Joseph pardonne les horreurs que ses frères avaient fait contre lui, il dit : « Vous aviez combiné de me faire du mal : Dieu l’a transformé en bien, pour accomplir ce qui arrive aujourd’hui, pour sauver la vie à un peuple nombreux. » (Genèse 50:20). C’est le sens même de la résurrection : puissance de vie pour transformer aujourd’hui et maintenant le mal et bien. Cette puissance de l’amour transforme une maladresse passée en un bel instant d’amour et de tendresse que vous exprimez. Certes c’est une douleur quand on repense à la maladresse commise, mais cette douleur devient pensée aimante, devient un lien fort qui traverse le le temps et le visible, devient au contraire dans le présent une tendresse et non une maladresse. Le mal passé peut même devenir ainsi, comme le dit Joseph dans cette conclusion de la Genèse, source de vie pour un peuple nombreux. Pourquoi pas ? il y a une telle force dans votre amour. Et vous savez comme moi que parfois un tout petit geste, quand il est inspiré d’amour et de tendresse, peut transformer la mort en vie.
Cela ne veut pas dire que la mort d’une fille de 18 ans soit justifiée par cette puissance de résurrection, afin que de ce mal sorte un bin ! Quelle horreur ! C’est absolument l’inverse. C’est parce que cette mort est insupportable qu’il faut que cette mort n’ai pas le dernier mot. Qu’elle soit vaincue, que la vie l’emporte, que l’amour la traverse. C’est ce que l’on appelle la puissance de la résurrection face à la mort. Puissance de conversion de l’horreur en tendresse : ce miracle s’accompli en se manifeste de façon tellement vraie dans votre message : et s’il est un cri de douleur, c’est celle d’un accouchement. Il est bien normal que vous soyez épuisée par ce travail. Alors, maintenant, prenez soin de vous. Bien soin de vous !
Ensuite, je suis persuadé qu’il n’y a pas eu que des maladresses dans ce que vous avez fait pour votre fille. Des maladresses, nous en faisons tous. Aucun parent n’est parfait. Aucun enfant n’est par fait non plus. Aucun ami. Plus ou moins, certes, mais en voyant votre amour, je suis persuadé qu’effectivement il s’agissait plus de maladresse que de gestes méchants vis à vis de votre fille. Arriverez vous à vous pardonner comme je suis persuadé que, elle, aujourd’hui vous comprend et vous pardonne ? Arriver à se pardonner à soi-même est une chose qui est parmi les plus difficiles, une des choses que l’on maitrise le moins. C’est pourquoi, je pense que le chemin passe par la prière, pour que Dieu nous aide dans ce chemin, et nous accompagne, pas à pas, de petit progrès en grandes avancées, vers la vie.
Dieu vous bénit et vous accompagne.
par : Marc Pernot, pasteur à Genève
PS. « Un Psaume des montées » de la Bible, le Psaume 121
Je lève mes yeux vers les montagnes…
d’où le secours me viendra-t-il ?
Le secours me vient de l’Éternel,
qui fait les cieux et la terre.
Il empêche ton pied de glisser,
il ne dort pas, ton gardien.
Non, il ne dort pas, il ne somnole pas,
celui qui veille sur son peuple.
L’Éternel est ton gardien,
l’Éternel est ton ombrage,
il se tient près de toi.
Le soleil, pendant le jour,
ne pourra te frapper,
ni la lune durant la nuit.
L’Éternel te garde de tout mal,
il garde ta vie,
L’Éternel te garde,
au départ et à l’arrivée,
Dès maintenant et pour toujours.
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