28 février 2024

photo en noir et blanc d'une personne brandissant deux gros pouces vers le bas, refusant fortement une opinion - Image par Luisella Planeta LOVE PEACE 💛💙 de https://pixabay.com/fr/photos/pouces-vers-le-bas-d%C3%A9sapprouver-6744093/
Question

ThéologieS : Dans quelle mesure un pasteur peut dire que telle ligne théologique est bonne et que telle autre ne l’est pas ?

Par : pasteur Marc Pernot

Question posée :

Dans quelle mesure un pasteur peut dire que telle ligne théologique est bonne et qu’elle autre ne l’est pas ? Ne pourrait-on pas penser qu’il y a diverses lignes théologiques comme il y a de la diversité dans l’Humain ?

‭‭1 Thessaloniciens 5:19-21
[19] N’éteignez pas l’Esprit, [20] ne méprisez pas les prophéties, [21] mais examinez tout et retenez ce qui est bon.

Réponse d’un pasteur :

Bonsoir

Et merci pour votre message.

Bravo pour cette recherche.

La diversités de lignes théologiques

Je suis du même avis que vous, il existe bien des lignes théologiques, et c’est une richesse, cohérente avec la richesse de la diversité dans l’humain. Cette diversité de lignes est due à la personnalité de chacun mais aussi à son histoire personnelle, les rencontres et les lectures qu’il a faites, les choix de chacun.

Respecter cette diversité est assez essentielle, pour plusieurs raisons :

  • Parce que c’est bon de respecter notre prochain, sa personnalité, sa sensibilité, son histoire.
  • Refuser cette diversité est en quelque sorte prendre notre opinion théologique ou éthique pour la vérité même de Dieu. C’est déjà se prendre soi-même un peu pour Dieu, c’est assez problématique au point de vue spirituel, c’est problématique dans notre rapport aux autres, et c’est problématique pour l’équilibre de cette personne, car elle est dans l’illusion. Et c’est problématique au point de vue spirituel, car si l’on confond notre système de pensée et nos expériences avec Dieu, cela refuse la nouveauté et la surprise venant de Dieu, or sa caractéristique principale est d’être créateur, d’être source de nouveauté et de surprise. Tel est l’Esprit Saint, nous dit Jésus (Jean 3:8)
  • Entendre d’autres opinions est enrichissant car on n’a pas pensé à tout, et que cela nous aide à nous interroger nous-même, et à approfondir nos opinions et la façon dont nous les étayons.
    Il est donc essentiel d’accepter cette pluralité de lignes théologiques. Et plus que de les « tolérer » avec indifférence, mais plutôt de s’y intéresser au moins un petit peu, de discuter de questions théologiques et philosophiques avec nos proches et à d’autres occasions.

Toute personne mérite le respect, mais toute opinion n’est pas également bonne

Mais cela ne veut pas dire que toute opinion soit respectable. La personne qui la pense doit être respectée, certes, mais cela ne veut pas dire que nous soyons obligé de penser que toutes les opinions se valent, et encore moins penser que toutes les opinions seraient acceptables.

  • Par exemple, il y a des personnes qui ont une théologie assez fumeuse, peu étayée, voire une théologie incohérente assumée avec ce genre d’arguments « c’est le grand mystère de la foi », ou un argument d’autorité du genre « la tradition la plus ancienne » a toujours pensé cela, ou un certain fondamentalisme, citant quelques versets censés justifier cette idée (laissant de côté le faut qu’il y a d’autres versets et d’autres interprétations). C’est assez problématique, et peu honnête, la ficelle est certes bien grosse mais cela peut malheureusement tromper quand même des personnes.
  • Pire, sur la base de certains passages bibliques, des théologiens chrétiens ont soutenu les thèses racistes de l’apartheid. Ce n’est pas une interprétation acceptable, même au nom de la liberté des enfants de Dieu, et de la multiplicité des interprétations. Comment peut-on dire que c’est une mauvaise interprétation ? C’est qu’elle contredit précisément l’amour de Dieu pour chacun de ses enfants, et l’amour pour notre prochain que nous commande le Christ.
  • Donc oui, il est possible de dire que telle interprétation est inacceptable à nos yeux. C’est finalement ce que dit Paul dans le verset que vous citez « Examinez toute chose » (avec un respect de principe, avec ouverture sur la possibilité que cette chose peut-être surprenante puisse éventuellement venir de Dieu… et ensuite « retenez ce qui est bon ». Il y a du tri à faire. La parole qui tue ou méprise l’autre n’est pas une bonne parole.
  • Et on est appelé à trouver telle interprétation plus ou moins intéressante, plus ou moins riche. Ce n’est pas nécessairement un jugement de valeur, mais une question d’affinité. C’est par l’Esprit que nous garderons ce qui est bon (pour notre cheminement) ? C’est à dire par la réflexion, la prière, notre propre conscience. Mais nous ne sommes pas propriétaire de l’Esprit, c’est pourquoi il est mieux d’avoir l’aopinion modeste et de rester prêt à évoluer, non ?

Choisir son église, les personnes avec qui débattre

Mais si ce pasteur (ou tout autre personne) a tendance à rejeter toute parole contraire à son opinion, ou sortant de la doctrine fondamentale de l’église, si la pluralité de pensée n’est pas acceptée, il y a un problème, oui. Vraiment, Mais ce n’est alors pas très utile de chercher le conflit. On ne discute qu’avec les personnes qui sont ouvertes à la discussion, sinon c’est une perte énorme d’énergie et cela génère de la dispute, du conflit, parfois même de la haine. Ce n’est pas bon non plus. Le mieux est alors de poursuivre son chemin, je pense. Et de chercher une meilleure compagnie pour discuter de théologie ? En particulier c’est pourquoi je fais en sorte que sur ce site https://jecherchedieu.ch personne n’injurie une autre personne, ni la menace de peines éternelles ou autre gracieuses paroles de mort. Comme nous ne laisserions pas une personne de la paroisse injurier une autre personne non plus. Évidemment.

Dieu vous bénit et vous accompagne.

par : pasteur Marc Pernot

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9 Commentaires

  1. Patricia dit :

    Trouver une écoute attentive et compatissante

  2. Lili dit :

    Je retiens aussi dans cette formule de Paul : « examinez tout », le « tout » qui comprend ce dont nous sommes absolument certains. A ce sujet, j’ai rencontré un petit écho à votre formule : « c’est pourquoi il est mieux d’avoir l’opinion modeste et de rester prêt à évoluer, non ? ». Vous le connaissez peut-être.

    « On connaît bien les méthodes qui accroissent le degré de vérité de nos croyances : elles consistent à écouter tous les partis, à essayer d’établir tous les faits dignes d’être relevés, à contrôler nos penchants individuels par la discussion avec des personnes qui ont des penchants opposés, et à cultiver l’habitude de rejeter toute hypothèse qui s’est montrée inadéquate. […] Tout au contraire en religion et en politique : bien qu’ici il n’y ait encore rien qui approche de la connaissance scientifique, chacun considère qu’il est de rigueur d’avoir une opinion dogmatique qu’on doit soutenir en infligeant des peines de prison, la faim, la guerre, et qu’on doit soigneusement garder d’entrer en concurrence par arguments avec n’importe quelle opinion différente. Si on pouvait seulement amener les hommes à avoir une attitude agnostique sur ces questions, neuf dixièmes des maux du monde moderne seraient guéris ; la guerre deviendrait impossible ; car chaque camp comprendrait que tous les deux doivent avoir tort. Les persécutions cesseraient. L’éducation tendrait à élargir les esprits et non à les rétrécir. »,
    Bertrand Russell, Essais scientifiques, 1929.

    Toutes les idées ne se valent pas, non, loin de là et si on suit Russell il y a bien quelques moyens pour y voir plus clair et éviter les idées « fumeuses », la mise à l’écart de la certitude, « l’agnosticisme », faisant cesser les guerres et les persécutions d’après lui. J’adore cet optimisme – vraiment – mais le désir de certitude est si puissant chez nous que le doute n’est pas toujours envisageable, que cela peut même provoquer un refus de penser autre chose. La certitude semble fonctionner comme une forteresse et revêtir tant d’avantages : protection contre les autres surtout en groupe, stabilité due à la cohérence dont l’incohérence non questionnée reste invisible, tranquillité d’esprit, pas d’effort puisqu’on est à l’arrêt, pas de questions et donc pas d’angoisses, pas d’insomnies. Cela ressemble au bonheur. Mais les conséquences que Russell éclaire sont bien terribles : infliger la guerre en guise de preuve… comme c’est bien vu, et si actuel, un siècle après.

    Finalement c’est toute l’attitude contraire d’un Jésus qui s’est entouré d’un petit groupe de disciples, déambule partout : villes, plaines, lacs, montagnes où il rencontre les autres, provoque l’instabilité en proposant des idées nouvelles, l’intranquillité d’esprit en posant des questions abyssales : « Qui dites-vous que je suis ? » ou en réalisant des « miracles », en s’exprimant par paraboles, avec quelques insomnies à la clé. On voit qu’une telle proposition fait bouger les lignes et révolutionne les idées, fait penser plus loin, autrement.

    Le hic c’est qu’il faut relativiser sa propre pensée et en même temps prendre la pensée de l’autre au sérieux pour pouvoir dialoguer avec lui. Et cela demande un effort, d’autant plus que parfois cette pensée manque cruellement de sérieux ou se présente sous la forme d’un effrayant catéchisme. C’est pourquoi l’éducation a un rôle crucial à jouer en proposant des points de vue divergents, en insistant sur ce que, souvent, la vérité a d’approximatif. Manquer cet objectif, c’est risquer d’induire tous les dégâts que Russell évoque. Est-ce qu’on ne peut pas entendre dans ce sens cette formule de Jésus dans l’évangile de Jean : « dans la maison de mon père, il y a plusieurs demeures »? pour contourner tout dogmatisme.

    1. Marc Pernot dit :

      Grand merci, c’est super intéressant.

      « le désir de certitude est si puissant chez nous que le doute n’est pas toujours envisageable, que cela peut même provoquer un refus de penser autre chose. »

      C’est pourquoi l’annonce de la « grâce de Dieu » est centrale dans le christianisme. Cela devrait nous soulager un peu : un socle est là, un roc sur lequel nous pourrons alors bricoler librement nos improbables constructions (nous dit Jésus dans une parabole), voire notre palais comme celui du facteur cheval. La forteresse est alors au fond de nous, elle ne nous enferme pas. Le ciel est alors la limite, et on peut accepter que l’autre soit différent, que notre construction change, évolue.

      Grand merci à celles et ceux qui nous apprennent à lire et à penser. Et à avoir de l’humour : on ne peut vraiment discuter qu’avec une personne avec qui ont pourrait rigoler.

  3. Marie-Dominique dit :

    Le Pasteur ne juge. Pas il affirme des convictions appuyées sur des références de vecu et d etudes
    Étant donné l historique du lieu de vécu de toute personne si l on met l humain au cœur de touts considérations alors il y a des thèmes communs d études et des idées des souhaits des valeurs en convergence quelle que soit la dénomination confessionnelle et Jésus nous dit l Amour est premier cf St Paul si j ai toutes les œuvres de la foi mais si je n ai pas l amour !

    1. Marc Pernot dit :

      Merci Marie-Dominique.
      J’espère que le pasteur ne juge pas. Et j’espère que nous affirmons des convictions appuyées sur du vécu, de l’étude et de la prière. Il y a des données d’étude qui sont assez objectives : le temps des verbes, l’histoire, les faits… mais beaucoup dans l’étude est subjectif quand même, tout autant que son expérience de la vie et de la prière. La parole du pasteur est donc plutôt à prendre comme un témoignage personnel de cette personne. Enfin : hyper d’accord avec vous : l’amour est le premier, celui de Dieu pour nous, et que cela nous inspire !

  4. Pascale dit :

    « La parole du pasteur est donc plutôt à prendre comme un témoignage personnel de cette personne. » Oui, mais comme vous l’évoquez dans l’article à propos de la confession, la parole d’une personne munie d’une fonction officielle reconnue peut avoir une force particulière, ce qui donne aussi au pasteur une responsabilité particulière. Il a donc plutôt intérêt à tourner sa langue 49 fois dans sa bouche avant de parler 🙂

    1. Marc Pernot dit :

      Oui. Vraiment.
      C’est encore plus délicat par e-mail avec une personne que l’on ne connaît pas.
      Donc, comme dirait Jésus, non pas 7 fois mais 77 fois 7 fois tourner son mail dans son clavier avant de le cracher. J’ai installé l’option 15 secondes de délai avant que l’e-mail soit complètement parti une fois qu’on a appuyé sur le bouton.

  5. Nathalie dit :

    Une théologie ,qui se veut parole sur Dieu ou de Dieu , et qui ne contient pas d’amour, ni le proclame ni le vit, ce n’est que du blabla creux.

  6. François dit :

    Si on désirait – et une fois n’est pas coutume chez les humains, hélas ! – respecter la diversité des manières de penser, de s’exprimer, de croire, alors il est exclu de penser à UNE théologie, une manière de croire…
    Les êtres humains sont très divers, ils varient beaucoup du nord au sud, de l’est à l’ouest et par delà les océans…
    Chacun a sa propre manière de se voir, de voir la divinité, sa divinité, sa conscience. Toute autre vue risque beaucoup d’aboutir à un enfermement de nous même à l’intérieur de barrières que d’autres auraient conçues pour nous, ce qui n’est à mon avis pas souhaitable. Bien sûr, du point de vue de ceux à qui échoit la direction de peuples, souvent munis de leur propre diversité, le programme peut sembler difficile ; et l’appareil législatif et des Chambres qui sont à la tête d’un État, montre bien la difficulté inhérente à une telle entreprise. Pour illustrer ce propos, je rappellerai « Le Prince » : cet ouvrage n’a pas vieilli…
    Alors, pour ce qui est des idées…

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