09 février 2019

illustration de jeune homme en colère - Image:
Ethique

Pourrais-je honorer mes parents alors qu’ils me traitent comme si j’étais un moins que rien ?

Par : pasteur Marc Pernot

illustration de jeune homme en colère -  Image: 'Anger'  by jev55  https://creativecommons.org/licenses/by-nc/2.0/ http://www.flickr.com/photos/52024976@N06/28974249996

Question posée :

Bonjour , Pasteur Pernot , j’ai 18 ans et je me pose la question en tant que chrétien sur le respect des parents car il est dit dans les dix commandements « tu honoreras ton père et ta mère » mais mes parents n’ont aucun respect pour moi ce qui fait que je leur dis des choses horribles que je ne pense pas ce qui me fait mal et le rend coupable comment Pourais-je honorer mes parents alors qu’il me traite comme si je n’étais qu’un moins que rien ?

Réponse d’un pasteur :

Bonsoir Monsieur

Oui, pas facile. Je reconnais.

Il y a deux choses :

1) ce que l’on aimerais arriver à faire : l’idéal que l’on aimerait arriver à atteindre

2) ce que l’on arrive concrètement à réaliser.

Vous avez raison. L’idéal est évidemment de respecter ses parents. Parce que, d’abord, nous sommes appelés à respecter toute personne, sans condition de performance de sa part. C’est comme cela que Dieu nous regarde, et fort heureusement.

Mais respecter ne veut pas dire non plus se laisser maltraiter. Ni laisser faire n’importe quoi à n’importe qui. Parce que si on laisse la personne faire des méchancetés c’est un peu une façon de la laisser un malade être malade sans s’en préoccuper, et c’est laisser le monde être un peu ou beaucoup abîmé. C’est vrai qu’il y a des parents vraiment horribles avec leurs enfants, il y a même des tortures physiques, parfois, et des tortures psychologiques possibles aussi, et qui ne laissent pas de traces visibles sur le corps. Ce n’est pas acceptable. En ce cas, même si c’est dur, il faudrait que le jeune demande de l’aide, ou fasse signe à un professeur, grand parent, médecin…

Sinon, l’idéal est d’arriver à se réjouir et garder le meilleur, et laisser passer le reste. Je pense c’est en réalité ce que veut dire Moïse dans ses « 10 paroles » où il conseille d’honorer ses parents. Qu’est-ce que ça veut dire ? « Honorer » c’est accorder du poids, de l’importance. Ces personnes qui sont vos parents ont de l’importance pour vous. Dans le passée car elles vous ont donné la vie ce qui n’est pas tout à fait rien. Mais même aujourd’hui, ces personnes ne continuent elles pas un peu à participer à vous donner la vie ? Déjà matériellement peut-être : le toit, la nourriture, les vêtements, une préoccupation de chaque jour pour vous. Ils espèrent pour votre avenir, sans doute. Et s’ils veulent vous imposer des choses ce n’est peut-être pas uniquement pour brimer mais c’est peut-être une bonne volonté parfois maladroite ? Mais une bonne volonté quand même pour votre avenir. Peut-être qu’il faut accepter et reconnaître leur bonne volonté mais négocier en expliquant mieux et plus clairement ce dont vous avez besoin ?

Je connais une fille qui, le jour de ses 18 ans, a été mise à la porte avec une valise de vêtements par ses parents, sans avertissement préalable. Elle est allée dormir chez une copine, s’est débrouillée pour trouver l’assistance sociale de son arrondissement qui lui a trouvé un foyer, elle poursuit ses études de droits tout en travaillant le soir dans un restaurant… Mais même ainsi, il y aurait à « honorer » chez ses parents, la vie mais aussi une langue, quelques belles choses dans l’éducation et les soins reçus dans le passé. Un ou deux beau geste ou souvenir à garder dans son cœur comme quelque chose qui a été un vrai bonheur. Honorer : ce n’est pas excuser le mauvais, c’est simplement garder le bon et chercher à le reconnaître pour l’aimer.

Jésus conseille même d’aller plus loin que le respect et « d’aimer son prochain » ! Cela ne veut pas dire de trouver tout le monde sympathique et en particulier pas celui qui nous fait du mal, mais cela veut dire d’espérer que notre prochain puisse être plus en forme : que son meilleur côté se développe et que ce qui ne va pas en lui puisse s’arranger un peu. Ceci est parfois possible. Mais pas toujours, c’est vrai. En ce qui concerne les parents, comme toute personne humaine, il y a du bon et du moins bon dans ces personnes. L’idéal est d’arriver à voir à peu près clair, avec intelligence et honnêteté, pour voir ce qu’il y a de quand même bien et bon, de ne pas manquer de le souligner quand cela se manifeste. Et de passer sur le moins bon. Parfois de dénoncer quand quelque chose ne va vraiment objectivement et clairement pas : un mensonge, un vol, une injure, une trahison, une violence physique sont des manquements de base. Bien sûr, c’est alors à dénoncer, puis passer. C’est cela qui est génial, car cela est bon pour les deux : les parents deviendront meilleurs (peut-être), et le fils aussi va continuer à trouver de bonnes choses pour avancer.

Bon. Ça, c’est la théorie.

Ensuite, ce n’est pas facile de se contrôler. Surtout avec des proches où l’énervement peut s’installer, la rancœur, les blessures non résolues, etc. Ce n’est pas bon, bien sûr, et l’on ne peut s’en satisfaire, comme vous le dites. Même si c’est compréhensible, il est donc de travailler là dessus. Et devenir plus libre de faire ce que l’on pense être juste, et de ne pas faire ce que l’on sait très bien être mauvais. Nous en sommes tous là. C’est pourquoi dans le « Notre Père », Jésus nous apprend à prier le « ne nous soumets pas à la tentation ». C’est mal traduit, car ce n’est pas Dieu qui nous tente. Je pense que l’on pourrait traduire « Fais que nous ne soyons pas enfermé dans la tentation » : aides-nous à trouver une porte de sortie, car c’est au-delà de nos forces.

Déjà, vous regrettez de dire des choses horribles. C’est un bon début.

Sur le moment, dans la colère, cela peut partir. Cela nous arrive à tous. Mais ensuite, après la prière, par exemple, on peut entrer en soi-même et regretter, comme vous le faites. Bravo. Deuxième étape, l’exprimer. Avoir le courage de dire, ne serait-ce qu’en quelques mots dits à vos parents, exactement ce que vous venez d’écrire : « Papa, Maman : hier, j’ai dit des choses horribles que je ne pensais pas. Je suis désolé. » Deux secondes de courage. Pour vous-mêmes. Déjà. Pour eux, aussi. Et se sentir plus fort, et pouvoir légitimement un peu fier. Car c’est vrai que ce n’est pas facile.

Et commencer à chercher aussi, toujours dans la prière, si par hasard on ne trouve pas un petit truc qui a été bon, juste, sympa, généreux… de la part des parents ? Et s’en réjouir. Et peut-être avoir alors ce même courage, celui de dire un petit mot : « merci pour ces vacances, cela a été génial » ? Et quand vous aurez 10 fois eu le courage de dire désolé et de dire merci même pour une petite chose, alors si vous avez une critique ou un reproche à faire à vos parents je pense qu’ils vont le recevoir autrement, et que cela a bien plus de chance de les aider à être meilleurs. C’est comme cela que l’on éduque ses parents !

Dieu vous bénit et vous accompagne

pasteur Marc Pernot, église protestante de Genève

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