Un manuscrit de la Bible vieux de 2000 ans (trouvé à Qumran) - fichier wicommons auteur वियानी विन्सेंट डिसिल्वा
Bible

Les protestants affirment que la Bible est première. Or, c’est l’Église qui a constitué la Bible ?

Par : pasteur Marc Pernot

Manuscrit de la mer morte

Fragment des Psaumes (psaumes 33 et 35), manuscrit sur cuir du 1er siècle, trouvé à Qumrân

Question posée :

Bonjour Marc,

J’ai une question à vous poser. En discutant avec d’autres chrétiens, ils m’ont opposé un argument redoutable : « Les protestants affirment que la Bible est première. Or, c’est l’Église qui est apparue avant la Bible puisque c’est l’Église qui a constitué le canon des Écritures. Donc l’Église précède la Bible. » Que leur répondre ?

Bonne journée.

Réponse d’un pasteur :

Cher Monsieur

Votre question est fort intéressante, à mon avis. Pas tellement par ce côté dispute entre chrétiens (je serais vous – mais je ne le suis pas- je ne répondrais pas à ce genre d’attaques autrement que par une pirouette : peu importe car nous sommes unis en Christ). Mais votre question est intéressante sur le statut de la Bible.

Le « canon des écritures » est la liste des livres les plus reconnus. Il a fallu attendre la fin du IVe siècle pour que la liste soit officiellement imposée. Certes, c’est donc l’église au sens du catholicisme romain qui a clôt le débat sur cette liste.

Ce n’est pas très sérieux de dire que les Ecritures n’existaient pas avant ce canon, et donc que ce serait l’église (au sens d’une institution autoritaire centralisée) qui aurait fait la Bible, qui l’aurait enfantée.

Car alors, que lisaient Irénée de Lyon et Clément d’Alexandrie au IIe siècle, Origène ou Saint Jérôme ? Ce serait étrange de dire que ces géants ne connaissaient pas les Ecritures. Le « canon » n’était pourtant pas établi à leur époque, avec des différences selon les églises : quelques livres étaient reconnus par les uns et pas par d’autres, ces livres sont de toute façon encore aujourd’hui considérés comme secondaires par rapport aux 4 Evangiles et aux grandes épîtres. Et les livres non retenus dans le canon sont encore étudiés avec grand intérêt aussi, parfois plus qu’une épître de Jude qui est entrée dans le « canon » mais dont la plupart des croyants et même des théologiens seraient bien en peine de citer un seul verset.
Par conséquent, j’en suis désolé pour vos apôtres de la sainte église, mais les Ecritures Saintes, et en particulier les 4 évangiles et les grandes épîtres de Paul, le Tanakh juif (Loi, prophètes et écrits du Premier Testament) existaient à la fin du premier siècle. Cela forme le fond essentiel de ce que nous lisons, étudions, prions, dans notre chambre et dans les églises. Et cela a été ainsi durant presque dix générations avant même que le concept d’une église autoritaire et centralisée soit inventé par l’empire romain.

Mais, néanmoins, ce n’est pas tout à fait faux de dire que ces textes de la Bible et leur interprétation s’inscrivent dans des traditions. Ils ont été rédigés par des personnes et par des communautés pour des communautés. Ces multiples textes de la Bible s’inscrivent donc dans des traditions. Ces textes ne sont pas tombés du ciel. Ils sont inspirés par l’Esprit, mais un Esprit animant ces personnes qui en rendent témoignage dans leur contexte. Par conséquent, si on ne peut donc pas dire que l’Eglise précède la Bible, il est par contre vrai de dire que des églises ont historiquement précédé la Bible. Des églises au pluriel. La force de cette compilation de livres qu’est la Bible est son pluralisme. Dans son écriture, et dans sa réception, il n’y a pas d’unique église (au sens d’une unique institution centralisée, avec une seule interprétation, un seul dogme), mais il y a plutôt une unique église au sens de l’apôtre Paul qui compare l’humanité à un corps vivant ayant de multiples membres différents, unis par l’Esprit, unique église qui embrasse l’ensemble des personnes qui cherchent Dieu en Christ, quelle que soit la chapelle que fréquente, ou non, la personne. On appelle cette église l’Eglise universelle » au sens où elle englobe toute les églises particulières et les personnes.

Cela relativise chacun de ces témoignages, qu’il soit ou non reconnu dans cette liste officielle qu’est le « canon » des écritures. Cela relativise aussi chacune des églises, même s’il arrivait que certaines de ces églises se prenne pour l’unique église, et donc continuent à considérer que les autres églises devraient se mettre sous sa seule autorité, confondue avec celle du Christ lui-même. Dieu nous en garde.

Bien amicalement

par : Marc Pernot, pasteur à Genève

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