Je suis gênée d’entendre à la messe : Je crois en l’Eglise, une, sainte, catholique et apostolique, comme si c’était un rejet des autres Eglises ?
Question posée :
Bonjour Pasteur,
croyante, je me définis plutôt comme protestante mais il m’arrive de participer à la messe catholique.
Or, au moment du credo, je suis toujours gênée d’entendre les catholiques dire : Je crois en l’Eglise, une, sainte, catholique et apostolique comme si ceci était un rejet officiel affiché des autres Eglises qui n’affichent pas tout à fait les mêmes idées mais qui n’en font pas moins partie de la chrétienté .
En vous remerciant pour votre réponse.
Réponse d’un pasteur :
Bonjour
Désolé pour le délai de réponse, j’ai été débordé par la paroisse.
Je vais aussi souvent à la messe quand je suis en vacances, et que la paroisse catho me plaît. On a le même patron, les mêmes évangiles, le même Souffle qui nous anime. Et en même temps, il est bon de varier un peu les angles d’approche de cet unique Dieu, Père du Christ et notre Père. Sinon notre foi commence à sentir un peu comme un terrier de marmotte à la fin de l’hiver (je suppose).
Cela ne veut pas dire que je suis d’accord avec tout. Je ne le suis pas non plus en allant au culte animé par un collègue, évidemment. Il ne me semble pas que ce soit un problème. Je prends cela comme un témoignage de la part de la personne, cela me sonne l’occasion de m’interroger sur ce qu’il ou elle dit et si par hasard il n’a pas un peu raison sur les bords, si c’est une alternative possible à ce que je pense, ou si effectivement je pense que ce n’est pas juste. Cela arrive évidemment à des personnes qui écoutent ce qu eje raconte, évidemment. Donc bravo de vous interroger, c’est excellent.
Je pourrais répondre en théologien : il s’agit de l’Eglise avec un E majuscule : l’Eglise composée de toutes les personnes que Dieu appelle, que Dieu reconnaît comme ses enfants, et par définition même de la grâce de Dieu, son amour immérité et inconditionnel pour chaque personne, cette « Eglise » avec un grand E est « universelle » (ce que signifie plus ou moins « catholique » en grec), il n’y en a qu’une et elle est « sainte » : appelée à un service particulier que personne ne peut faire à sa place, c’est pourquoi est est envoyée dans le monde (« apostolique ») par Dieu et animée par son Esprit. Il ne s’agit donc pas de l’église au sens de l’institution humaine, dont on parle ici, même s’il n’y en avait effectivement qu’une seule. Ce qui n’a jamais été le cas. Même du temps de Jésus il y avait des sensibilités et quand 10 apôtres étaient dans la chambre haute après la mort de Jésus, il y avait déjà Marie Madeleine qui, elle, cherchait, puis Pierre et Jean qui font équipe pour la rejoindre, ensuite on voit que Thomas fait bande à part et ne les rejoint que plus tard… Ensuite nous voyons dans le livre des Actes des apôtres que très vite il y a le club des personnes pratiquant la loi juive convaincus que Jésus est le Christ (les judéo chrétiens, autour de Jacques), et le club des personnes, juives ou païennes, qui abandonnent plus ou moins la loi juive pour se concentrer sur une confiance en la grâce de Dieu (autour de Paul). C’est normal, c’est bien d’avoir des personnalités différentes, des affinités et des sensibilités, des pratiques diverses pour exercer sa foi, ce n’est pas que quelque chose contre laquelle Dieu lutterait au contraire. Cette diversité est une richesse. Ce qui est un poison c’est de mépriser les autres, de les juger comme indignes. L’Esprit Saint, précisément est cette puissance de réconciliation, nous dit Paul (1 Corinthiens 12)
Ensuite, je suis bien d’accord avec vous, je pense : comment est entendue cette phrase « Je crois en l’Eglise, une, sainte, catholique » par une personne du XXIe siècle entrant par hasard dans l’église ? Et même comment un honnête paroissien entend ces mots si ce n’est dans le sens commun actuel ? Cette personne entendra « église catholique » comme parlant de l’église romaine (elle se présente précisément sous ce titre « d’église catholique » tout court. Et cette personne entend que cette institution particulière, par ailleurs très noble, est qualifiée de « sainte » ! Or ce mot est entendu souvent aujourd’hui comme une sorte de prix Nobel de moralité et de foi, ce qui est un peu problématique pour une église, qui comme toute les institutions humaines, est largement faillible, voir pécheresse, et a en tout cas bien besoin de se convertir encore et toujours. Au sens biblique « saint » signifiait « appelé par Dieu en particulier pour un service ».
Donc je trouve effectivement problématique d’asséner aujourd’hui ce texte ancien et difficile, sans préciser de quoi on parle. C’est plutôt un texte à étudier dans un groupe de réflexion théologique. Personnellement, comme « crédo » je dirais simplement « Jésus est le Christ », cela dit tout, à mon avis, et renvoie à cette personne qui unit indubitablement tous les chrétiens, d’une façon universelle.
En tout cas, vous pouvez entendre, vous, cette phrase comme renvoyant effectivement à l’humanité entière, aimée et espérée par Dieu.
Il vous bénit et vous accompagne.
par : pasteur Marc Pernot
PS. Voir, si vous le voulez, cet article : Le « Crédo » ou « Symbole des apôtres » 4/4 : Je crois la Sainte Église ??
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Bonjour,
C’est effectivement un rejet des autres Églises. La fonction d’un credo ou de toute autre confession de foi est de définir ce qui est la vérité de foi, non seulement positivement (ce qui fait l’essentiel de la foi de l’Église) mais aussi négativement (les écueils à éviter et erreurs condamnées). Voici par exemple comment se terminait originellement le symbole (credo) de Nicée : « Ceux qui disent : il y a un temps où il n’était pas : avant de naître, il n’était pas ; il a été fait comme les êtres tirés du néant ; il est d’une substance, d’une essence différente, il a été créé ; le Fils de Dieu est muable et sujet au changement, l’Église catholique et apostolique les anathématise [c’est-à-dire, les condamne et les exclut de l’Église]. »
Il n’y a rien de gênant à savoir pourquoi nous sommes dans une Église et pas dans une autre. Si cette foi est confessée dans votre Église avec la bouche et avec le cœur, réjouissez-vous et rendez grâces à Dieu. Notre-Seigneur a voulu fonder son Église sur l’apôtre Pierre, suite à la juste confession de foi qu’il délivra. Confesser sa foi est d’abord une joie et une grâce : « Tu es heureux, Simon, fils de Jonas ; car ce ne sont pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela, mais mon Père qui est dans les cieux. » (Matthieu 16,17) Notez dans les versets que les autres disciples donnent à la question « Qui dites-vous que je suis ? » des réponses fausses (Jean-Baptiste, Élie) ou insuffisantes (l’un des prophètes), et ne reçoivent pas cette promesse et cette bénédiction. Confesser sa foi est aussi une nécessité (pour ceux qui sont en âge et en capacité de le faire) en vue du salut : « Celui qui me confessera devant les hommes, je le confesserai devant mon Père qui est aux cieux. » (Matthieu 10,32)
C’est sur la confession de foi de Pierre « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant » (Mt 16:16) que Jésus bâtit son église, non sur Pierre lui-même, qui est appelé « satan » juste après par Jésus (Mt 16:23).
Comme le dit l’apôtre : « Personne ne peut poser un autre fondement que celui qui a été posé, savoir Jésus-Christ. » (1 Corinthiens 3:11).
L’Eglise c’est avant tout le Christ et nous le proclamons.. j’ai réagi il fut un temps. Mais la puissance des mots va au delà. Le concile Vatican ii nous a rappelé que le Christ est venu pour tous les hommes. Alors il n’y a pas de réduction. Merci pour votre réaction elle permet de creuser notre réflexion.