12 décembre 2022

barque sur un lac, avec d
Question

Je suis dans une période géniale de ma vie, est-ce que je vais le « payer », Dieu venant équilibrer pour chacun le bonheur et le malheur ?

Par : pasteur Marc Pernot

barque sur un lac, avec d'étranges lumières dans la nuit - Photo de Johannes Plenio sur https://unsplash.com/fr/photos/DKix6Un55mw

Question posée :

Bonjour, cher pasteur,

J’ai changé de région pour faire mes études. Ce nouveau départ est une bouffée d’air pur dans ma vie, j’avance sereine et désireuse de vivre tt ça avec force et ferveur. je me découvre une grande facilité de contact avec les gens, je m’entoure déjà de personnes que j’apprécie, mon installation autant matérielle que spirituelle est une véritable réussite avec une relation amoureuse comme cerise sur le gâteau. Je suis comblée, heureuse en réalisant mon bonheur. Je remercie chaque jour Dieu d’une façon étonnamment spontanée et répétée… et pourtant j’ai peur que tout cela m’échappe et je culpabilise d’être bien. J’ai l’impression, sûrement idiote, que pour équilibrer les choses, ce bonheur me sera repris par un événement terriblement douloureux…je sais que ça ne colle pas avec l’image de dieu bienfaiteur et aimant, je sais que ce serait justement mal de ne pas profiter de ce bonheur, mais j’ai toujours cette peur d’être punie parce que je suis heureuse. Et pourtant je suis très consciente de ma chance et de ce bonheur simple, mais qui me comble. Ce serait aussi rendre dieu responsable des douleurs infligées dans notre vie, ce qui ne colle pas non plus avec la notion de libre-arbitre à laquelle j’adhère…mais j’avoue avoir encore beaucoup de doutes et de craintes à ce sujet et j’aimerais votre avis sur cette image d’un Dieu « régulateur de bonheur et de douleur. »

Je vous remercie beaucoup.

Réponse d’un pasteur :

Bonjour,

Je suis tout à fait d’accord avec votre conception de Dieu : il est uniquement source que de bien, comme que nous le révèle Jésus-Christ. C’est ce dont témoigne Jean avec force au début de sa 1ère lettre, et dans la suite avec cette confession de foi limpide « Dieu est amour » (c’est plus qu’un comportement pour lui d’aimer, c’est sa nature, si je puis dire). Cette théologie n’est effectivement pas compatible avec cette impression que nous pouvons ressentir de « je vais devoir le payer » quand on est heureux et « qu’est-ce que j’ai fais au bon dieu » quand on a un malheur. Cette impression me semble basée sur une certaine notion de justice qui nous influence, cette notion de justice est celle qui existe souvent en ce monde dans les échanges commerciaux et dans la justice du tribunal. Tout se paye. Mais, même en ce monde, il existe aussi d’autre type de justice, par exemple celle de l’amour que relève Jésus Christ dans sa vie et dans ses paroles, et que reprend Jean dans sa lettre (en particulier). Une maman ne fait pas payer son lait et ses soins au bébé, les relations entre amis et celles entre amoureux fonctionnent aussi sur le mode de la gratuité, de l’abondance.

La justice de Dieu n’est pas non plus basée sur ce genre de principe où tout devrait se payer, le bonheur comme les fautes. La justice de Dieu est l’amour, pas l’équité. Il veut que chacun soit heureux, et quand une personne a plein de bonheur et de chance, il s’en réjouit simplement, au premier degré, comme le font tous ceux qui aiment cette personne. Et il n’est pas question de faire payer à la personne heureuse, ni à son enfant, ni à son ami cet instant de bonheur, il n’est pas question, pour aucune des personnes qui l’aiment, de lui faire payer son bonheur par une jolie catastrophe avec plein de souffrances pour équilibrer !

Au contraire, Dieu nous aide dans les temps de bonheur, car nous avons alors besoin de son aide tout comme dans les moments de malheur. Dans le bonheur, Dieu nous aide à avancer encore, alors que tout nous dit de tenter de faire du sur place afin que notre bonheur dure. Seulement, le bonheur est une dynamique, selon la Bible, et je crois que c’est parfaitement vrai. Le bonheur est comme le ski nautique, quand on n’avance pas, on s’enfonce. C’est pourquoi Dieu nous aide en tout moment, en toute circonstance à avancer :

  • Dans le bonheur, Dieu nous aide à avancer plus loin, à convertir cette force qu’est le bonheur en une dynamique positive, comme l’exprime poétiquement le début du psaume 23 (ci-dessous). c’est effectivement un excellent moment pour investir dans notre qualité d’être, dans la profondeur de notre foi et de notre, dans l’élévation de notre spiritualité et de nos idéaux, dans la largeur de notre vison et de notre compassion et de nos engagements pour voir ce que nous pouvons apporter autour de nous (c’est ce que symbolise ici l’onction d’huile sur la tête).
  • Et dans le malheur, Dieu nous aide à avancer pour nous en sortir, comme l’exprime le milieu du psaume 23 :

L’Éternel est mon berger : je ne manque de rien.
Sur des prés d’herbe fraîche il me fait reposer,
il me mène près des eaux paisibles.
Il restaure mon âme,
Il me conduit par le juste chemin, pour l’honneur de son nom.
Quand je marche dans la vallée de l’ombre de la mort,
Je ne crains aucun mal, car tu es avec moi : Ta houlette et ton bâton me rassurent.
Tu dresses devant moi une table,
En face de mes adversaires ;
Tu oins d’huile ma tête,
Et ma coupe déborde.
Oui, le bonheur et la grâce m’accompagnent
Tous les jours de ma vie,
Et je reviens ou je demeure dans la maison de l’Éternel pour toujours.

Et c’est pourquoi Jésus nous propose une vision dynamique de la vie et du bonheur, lui aussi. Par sa propre façon d’être, sans cesse en mouvement et par ses paroles. L’Évangile témoigne de ce qu’il est « cheminement, vérité (c’est à dire fidélité), et vie » (Jean 14:6). C’est intéressant, car le cheminement suppose que l’on change, c’est pourquoi il est intéressant d’y ajouter la vérité (au sens de fidélité, dans la pensée hébraïque) : fidélité à Dieu qui est lui-même vivant et source de vie, fidélité à nous-même car c’est en évoluant que nous cheminons vers une version plus aboutie de nous-même.

Il y a un passage intéressant de l’Evangile (Jean 9) où Jésus croise la route d’un homme frappé de malheur, Jésus dit que la question n’est pas de savoir s’il mérite cette souffrance, mais que de toute façon cela invite, cela NOUS invite (nous et pas seulement Jésus) à faire les œuvres de celui qui l’a envoyé (Dieu). C’est nous qui sommes chargés d’apporter un supplément de bonheur et de chance autour de nous, à commencer par ceux qui souffrent, bien sûr. Mais rien ne nous empêche aussi de faire du bien à une personne heureuse. C’est ce que fait Dieu, je pense.

Dieu vous bénit et vous accompagne.

par : pasteur Marc Pernot

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2 Commentaires

  1. Pascale dit :

    « Je remercie chaque jour Dieu d’une façon étonnamment spontanée et répétée… et pourtant j’ai peur que tout cela m’échappe et je culpabilise d’être bien.»
    Personnellement, je vois aussi quelque chose de positif dans cette culpabilité, car elle contient au fond une forme de souci de l’autre, d’un désir de justice : oui, je vais bien, mais je sais bien que ce n’est pas le cas de tout le monde. Et pour résoudre ce conflit, on finit par se dire que les choses vont de toute façon s’inverser.
    C’est parfois un peu compliqué de trouver un bon équilibre entre le fait de vivre pleinement les bons moments, d’apprécier la beauté de la vie, d’en être reconnaissant, et de ne pas oublier ceux qui sont dans la peine, de compatir, au sens de « souffrir avec ». En particulier, je suppose, lorsqu’on est pasteur et que bien des gens s’adressent à vous en confiant leurs soucis.

    1. Marc Pernot dit :

      C’est vrai. Surtout par internet, en présence physique, les personnes osent moins, ou alors en ajoutant d’un air gêné : il y a bien des personnes qui souffrent plus. Comme s’il y avait une honte à se plaindre, et comme si la souffrance des autres nous soulageaient. Alors que les souffrances ne se compensent pas, elles s’ajoutent à la souffrance du monde.

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