20 mars 2023

un homme marche en montagne - Photo de Alexandra Mirgheș sur https://unsplash.com/fr/photos/b-JcAqZYLbI
Prière

J’aimerais savoir à quoi sert la prière, selon vous et selon le protestantisme libéral auquel je crois appartenir.

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Question posée :

Bonsoir Monsieur,

Je vous ai plusieurs fois contacté pour divers sujets, depuis 2013. Vos réponses ont toujours été très riches et j’ai toujours suivi vos blogs.

Ce soir je me pose une question simple dans sa formulation mais j’imagine très complexe dans sa réponse : j’aimerais savoir à quoi sert la prière, selon vous et selon le protestantisme libéral auquel je crois appartenir.

Je suis théologiquement assez loin des lieux communs du genre « Prier sert à s’adresser à Dieu pour lui demander des faveurs ou le remercier ou …. ».
J’aurais tendance plutôt à considérer la prière comme une manière de remettre certaines choses à Dieu, c’est-à-dire accepter qu’on ne maîtrise pas tout et donc accepter qu’on ne peut « que » formuler par des mots et des phrases (à voix haute ou silencieusement en soi) ce qui nous échappe.
Une façon de faire le maximum possible humainement chacun à son niveau.

Je ne suis pas certain d’être très clair.

Merci d’avance pour votre future réponse.

Bien à vous,

Réponse d’un pasteur :

Bonsoir

Merci pour votre question excellente. Et d’ailleurs pour vos éléments de réponse aussi.

A quoi sert la prière ?

  1. prendre un temps de recul par rapport à sa vie courante, ce que l’on a vécu, ce que l’on a sur le cœur, ce que l’on espère, nos projets, les personnes que nous aimons ou côtoyons, celles que nous avons du mal à aimer, ce qui nous fait honte, ou que l’on regrette, ce dont nous sommes fiers et heureux….Cela, je pense, est utile et même fondamental que l’on croie en Dieu ou non, que l’on soit chrétien ou non, croyant ou non. Cela aide à prendre sa propre vie en main, ne pas seulement subir toutes les influences et les hasards de la vie.
  2. faire cela devant un idéal auquel nous croyons. C’est un niveau supplémentaire important car cela nous oriente vers une visée que nous avons déterminée personnellement (c’est là qu’il est important de ne pas s’enfermer dans une église imposant des dogmes, ou une idéologie, car il y a aussi de redoutables intégrismes idéologiques). Comme croyant s, cet idéal nous l’appelons Dieu, il est pour le moins une figure de l’idéal de justice pour nous, et de ce qui est source de mieux dans ce monde et dans la vie. Encore faut-il avoir un peu réfléchi à ce que l’on pense sur Dieu, et que notre Dieu est un Dieu d’amour et de bonté, pas un terrible juge et despote. Car cette seconde dimension de la prière fait que nous évoluerons progressivement vers le Dieu auquel nous croyons. Cette seconde dimension n’est pas propre aux croyant s non plus, elle peut concerner aussi une personne qui a une démarche philosophique athée ou agnostique, et qui se forge elle aussi une certaine idée de ce que serait « quelqu’un de bien ».
  3. Un niveau au dessus serait, comme vous le dites, prier comme « une manière de remettre certaines choses à Dieu, c’est-à-dire accepter qu’on ne maîtrise pas tout et donc accepter qu’on ne peut « que » formuler par des mots et des phrases », ou par des soupirs inexprimables (comme le dit Paul). Cela me semble effectivement essentiel de se placer face au fait que nous ne sommes pas Dieu et en me^me temps que nous ne sommes pas seuls, que nous sommes gardés et aimés inconditionnellement, de façon ultime. Cela est peut-être assez spécifique au chrétien : cet amour et donc cette dignité inconditionnelle.
  4. Ensuite, sans imaginer Dieu comme un magicien (d’accord avec vous), il est possible de penser Dieu et de l’expérimenter comme une source transcendante de vie, de mouvement, et d’être (comme le dit Paul, encore). C’est à dire que l’efficacité de notre prière est certes un exercice spirituel fécond de toute façon, mais qu’en plus il y a une action de Dieu même si l’on ne sait pas trop comment. Qu’il y a un supplément d’être dépassant la simple mesure humaine, le simple travail sur soi. Et que Dieu coordonne d’une certaine façon les bonnes volontés qui s’offrent, qu’il nous souffle des idées nouvelles, des forces, des enthousiasmes nouveaux, venus d’ailleurs, surprenants…. Cela, effectivement est spécifique au croyant , et au croyant ayant une certaine ouverture à la mystique, à l’expérience croyant e. Personnellement, c’est quelque chose qui m’est cher et important, d’associer cette dimension plus sensible de ce 4e niveau à la dimension plus intellectuelle de mes deux premiers niveaux.

Et comme vous le dites, effectivement, je pense que Prière et Théologie débouchent ou doivent déboucher sur :

Les fruits très concrets de la prière

  • en terme de construction de soi et de sa propre vie,
  • en actes (cherchant, comme vous le dites, à faire le maximum possible humainement à notre niveau)

Ce qui marche à mon avis super bien…

  • Encore faut-il pour cela que la prière soit sincère et authentique, sinon, cela « marche » à mon avis beaucoup moins bien. Au contraire, il y a des risques de tordre quelque chose d’essentiel dans ce cheminement. C’est pourquoi, je pense, Jésus insiste tant pour dire que la prière est une pratique intime, dans la pièce la plus reculée de la maison, porte fermée, seul à seul avec notre Dieu (Matthieu 6:6).
  • Et encore faut-il s’exercer régulièrement à cet exercice, c’est comme tout. Paul parle de s’entraîner comme un gymnaste (1Timothée 4:8).

Bravo pour votre démarche et pour votre interrogation, précieuse.

Dieu vous bénit et vous accompagne.

par : pasteur Marc Pernot

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7 Commentaires

  1. Pascale dit :

    La prière permet aussi d’exprimer plus facilement sa gratitude car on l’adresse à quelque chose/quelqu’un, elle incite alors à davantage voir le beau, le bon autour de soi et cela fait vraiment du bien, à soi-même et peut-être même à d’autres.
    Merci, Marc, pour ce que ma prière est devenue, c’est à vous que je le dois.

  2. Maignan Mariev dit :

    Oui, la prière honnête et vraie dans sa chambre fait du bien, nous démontre la Présence, la profondeur de l’amour de Dieu de jour en jour.
    Vous oubliez dans votre commentaire la puissance de la liturgie, liée aux émotions visuelles et auditives, mais aussi aux autres de l’assemblée et du clergé. Je pense à la liturgie en slavon de 3heures et plus dans les églises orthodoxes, une liturgie, qui ouvre à la beauté de Dieu, au Royaume ..difficile à exprimer, qui ouvre un chemin aussi …

  3. Valarcher dit :

    Prier pour moi c’est parler à la Vierge Marie de notre vie familiale, professionnelle, sociale… Et lui demander d’interseder pour nous .
    C’est aussi s’émerveiller d’un événement, d’un paysage et remercier Dieu de sa présence dans notre vie et de la foi qu’il nous donne.
    C’est méditer sur les questions des mystères de la passion du Christ , de notre existante personnelle , de l’univers…

  4. Michel dit :

    très riche et féconde reconstruction ! cela aide considérablement à la prière, temps essentiel de la pratique fidèle

  5. Didier dit :

    J’ai envie de dire , sans malice : Priez et vous saurez. Décrire le goût d’une orange n’a rien à voir avec le fait de mordre dans une orange.

    1. Pascale dit :

      Oui, mais toutes les oranges ne sont pas fantastiques. Choisir son orange avec soin (par exemple écouter les conseils d’un habitué des oranges) peut éviter d’être définitivement écœuré.

  6. Corinne dit :

    Merci pour la question et la réponse au sujet de la prière, qui toutes deux me parlent et font sens pour moi.

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