De beaux épis de blés en gros plan - Photo de Michael Callaghan sur https://unsplash.com/fr/photos/7GPLUK0f2VU
Question

Combien a-t-il fallu de temps pour évincer la question des peines éternelles, de l’enfer et ce genre de terrorisme spirituel ? Des siècles ?

Par : pasteur Marc Pernot

De beaux épis de blés en gros plan - Photo de Michael Callaghan sur https://unsplash.com/fr/photos/7GPLUK0f2VU

Question posée :

Cher Marc,

Vous me direz que j’ai mis du temps à faire le lien, mais ce matin je lisais dans un livre de F. Varillon un texte avec la référence de Luc 3 : 17. Et j’ai enfin fait le lien avec Matt. 13. J’ai écrit avec un point d’interrogation dans ma tête le texte qui suit. Merci d’y répondre quand vous aurez un moment et si vous le désirez.

Le bon grain et l’ivraie

En Luc 3 : 17, Jean-Baptiste annonce du Christ : « Il a son van à la main; il nettoiera son aire, et il amassera le blé dans son grenier, mais il brûlera la paille dans un feu qui ne s’éteint point. »

En Matt. 13 : 24 – 30 : Jésus enseigne une parabole qui rejoint la prédiction de Jean-Baptiste :
« Il leur proposa une autre parabole, et il dit: Le royaume des cieux est semblable à un homme qui a semé une bonne semence dans son champ.
25 Mais, pendant que les gens dormaient, son ennemi vint, sema de l’ivraie parmi le blé, et s’en alla.
26 Lorsque l’herbe eut poussé et donné du fruit, l’ivraie parut aussi.
27 Les serviteurs du maître de la maison vinrent lui dire: Seigneur, n’as-tu pas semé une bonne semence dans ton champ? D’où vient donc qu’il y a de l’ivraie?
28 Il leur répondit: C’est un ennemi qui a fait cela. Et les serviteurs lui dirent: Veux-tu que nous allions l’arracher?
29 Non, dit-il, de peur qu’en arrachant l’ivraie, vous ne déraciniez en même temps le blé.
30 Laissez croître ensemble l’un et l’autre jusqu’à la moisson, et, à l’époque de la moisson, je dirai aux moissonneurs: Arrachez d’abord l’ivraie, et liez-la en gerbes pour la brûler, mais amassez le blé dans mon grenier. (Matt. 13 : 24-30) »

Alors, je me pose la question : combien a-t-il fallu de temps pour évincer la question des peines éternelles, de l’enfer et ce genre de terrorisme spirituel ? Des siècles ?

Bien cordialement et merci !

Réponse d’un pasteur :

Chère Madame

A mon avis il y avait depuis bien longtemps déjà ces deux options en ce qui concerne le jugement de Dieu

  • L’option égyptienne + grecque + indienne : avec une sélection des individus à leur mort et une orientation en fonction du bilan effectué, avec des peines ou des merveilles éternelles
  • L’option hébraïque : l’action et donc aussi le jugement de Dieu est à recevoir dans le présent (la question de la vie future étant délibérément péjorée ou évacuée) et bien des voix de la Bible évoquent ce jugement comme une purification de la personne, de chaque personne.

Il me semble que la question des peines éternelles n’a jamais tout à fait disparue, elle est même exacerbée dans certaines religions et sensibilités chrétiennes qui en font un argument de pression sur les fidèles.

Pierre et Paul, déjà, comparent le salut des justes au travers du déluge, le salut des hébreux et l’extermination des méchants égyptiens à notre baptême personnel, signe de notre purification par Dieu…
Et ce n’est pas nouveau à leur époque. Dans le Psaume 1er la figure du juste est exagérée (priant 24/24, et à qui tout réussit), le vannage du blé éliminant le méchant comparé à de la paille me semble claire aussi : chacun de nous est un épi avec paille et grain.

L’image du vannage, des vendanges et du pressoir, du feu permettant de tirer l’or du minerai… sont autant d’images d’un jugement de Dieu comme un soin allant chercher le meilleur en chacun.

Il faudra encore des siècles et des siècles pour que soit abandonnée cette idée nocive d’un Dieu qui sélectionnerait parmi ses enfants les plus performants, laissant à la mort (ou pire encore aux tortures éternelles) ses autres enfants. Hélas. Nous ne sommes donc pas inutiles en proclamant notre louange en Dieu pour son amour qui garde chacun de ses enfants, et en prendra toujours soin.

Le fait qu’en chacun de nous le bien et le mal, le bon grain et l’ivraie soient mêlés est une réalité. Faisons confiance que Dieu ne laissera pas perdre le moindre bon grain qui existe en la plus méprisée des personnes. Car Dieu est comme cela. Un Dieu qui aime.

Dieu vous bénit et vous accompagne.

par : pasteur Marc Pernot

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9 Commentaires

  1. Xavier dit :

    Il est très significatif aujourd’hui de voir nombre de commentateurs rester prisonniers d’une conception du Royaume avec le temps comme donnée permanente. Non. Le temps est un élément de la Création et Dieu et son royaume ne relèvent pas de cette dimension. L’éternité appliquée à l’enfer ou au paradis ne conserve pas ( plus) un sens dès lors qu’on quitte la pensée antique située dans le domaine de la représentation anthropique du monde, avec la terre, le ciel, les eaux du ciel, les eaux souterraines, l’espace et le temps comme cadre de l’univers divin.
    La transcendance et les découvertes scientifiques font un sort maintenant à ces représentations.

  2. Marcelle dit :

    Le bien et le mal se cotoient depuis toujours a nous avec le Christ de faire le tri dans notre vie sachant que le Seigneur nous ouvre toujours ses bras misericordieux et nous attend tounours

  3. Rosset Claire-Lise dit :

    Cher Marc,

    Comment vous remercier de votre éclairage culturel, cultuel et théologique sur la notion des peines éternelles ? Merci infiniment de votre éclairage libérateur.

    La référence au psaume 1 me parle beaucoup, dans le sens qu’il est si facile de se laisser entraîner dans la chute de l’autre, avec cette escalade dans la violence du verset 1 : méchant-pécheur – moqueur.

    « Heureux l’homme qui ne marche pas selon le conseil des méchants,
    Qui ne s’arrête pas sur la voie des pécheurs,
    Et qui ne s’assied pas en compagnie des moqueurs,
    Mais qui trouve son plaisir dans la loi de l’Éternel,
    Et qui la médite jour et nuit ! »

    Alors, cette prière du Notre Père prend tout son sens : ne me laisse pas entrer en tentation, mais délivre-moi du mal que je peux faire à autrui et à moi-même.

    Quant au bon grain et à l’ivraie, je me demande si je ne participe pas moi-même au jugement d’autrui sans miséricorde et à leur peines éternelles. Je m’explique. Au mois de janvier, j’ai lu le magnifique livre d’Alphonse Maillot : Jonas ou le sourire de Dieu. Ce livre m’a beaucoup interrogée et aussi amusée.
    Et je me disais : tu es ce Jonas. Oui, tu es ce Jonas à vouloir que le feu descende du ciel sur tous les tyrans de ce monde, sur tous ceux qui brisent la vie de leurs victimes par des actes dignes des Assises. Ta petite justice ne dépasse pas celle des scribes et des pharisiens.
    Tu ne peux pas supporter que Dieu fasse « lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et qu’il fasse pleuvoir sur les justes et sur les injustes. »

    L’enfer, c’est les autres, disait Sartre. A moi de veiller à ne pas être un enfer pour mon prochain, celui, celle dont je désire me rendre proche avec un amour qui ne peut venir que du Dieu d’amour, sans le laisser rôtir à la broche aux siècles des siècles avec une joie mauvaise au coin de mes lèvres.

    En compagnie de Jonas, je crois avoir reçu la plus belle remontrance et la plus belle leçon théologique de ma vie.

    Bien fraternellement, et merci pour tout
    Claire-Lise

  4. Stéphane dit :

    J’aime beaucoup l’image de l’élagage de Marc Pernot, elle sonne juste et résonne avec l’évangile. Par ailleurs, il y a un danger évident à croire qu’il y a peu d’élus ou que la grâce peut manquer comme dans le jansénisme, ceux qui se croient justes se croient tout permis comme on le voit aux Amériques en ce moment.

  5. Rosset Claire-Lise dit :

    Bonjour,

    Je vous invite à écouter la conférence de Céline Rohmer sur 1 Cor. 3 où elle développe ce qu’est le jugement « dernier », dans le sens que nos oeuvres seront jugées, mais jamais notre être qui est, par définition, sauvé par la seule grâce de Dieu .

    La vie pour toujours avec Christ. Conférence avec Céline Rohmer et François Vouga :

    https://www.youtube.com/watch?v=JDWnVT2BSG8

    Très réconfortant

    Bien cordialement
    Claire-Lise Rosset
    .

    1. Marc Pernot dit :

      Merci
      Je n’ai pas écouté la conférence. Mais à ce que vous me dites :
      je suis du même avis que nos œuvres méritent d’être examinées, en particulier par nous-même et avec l’aide de Dieu, comme des symptômes de ce que nous sommes. Et aussi pour réparer autant que faire se peiut les dégâts.
      Notre être en tant que personnalité profonde, est accepté et gardé par la seule grâce de Dieu, je suis aussi de cet avis.
      Mais notre être a quand-même besoin d’être « jugé », si l’on veut, je préférerais : purifié, soigné, amélioré, grandit. Car nous sommes loin d’être parfaits, notre genèse est toujours en cours, et il y a des blessures, des cicatrices et même des amputations que nous avons subies et qui doivent être examinées, soignées, enlevées. Pour nous délivrer. Et il peut y avoir aussi de la méchanceté en nous : cela ne peut rester en l’état. Cela peut partir dans une certaine mesure avec nos traumatismes anciens, mais pas seulement, il y a aussi une hubrys, que nous voyons dans un certain sens en Adam et Eve et leur serpent qui parle. Là aussi, Dieu vient, examine et soigne. Et c’est encore une bénédiction.

  6. Rosset Claire-Lise dit :

    Cher Marc,

    Merci de clarifier le mot « être ». Je pense à ce verset d’un psaume de David : ô Dieu, crée en moi un coeur pur !

    Pour ma part, j’ai été encouragée à bien des reprises par le fait qu’il y a en moi comme en autrui, une part indestructible, divine. Est-ce du registre de l’ être ou l’âme ? Je ne le sais.

    Quoi qu’il en soit, longtemps j’ai mis sur mon bureau le sonnet d’Anvers pour me garder de sombrer dans une forme d’anéantissement :

     » Mon âme a son secret, ma vie a son mystère  » (Sonnet d’Anvers)

    De cette divine présence dans ton âme, ne doute jamais.
    N’as-tu pas éprouvé que ton âme est ici-bas une forteresse imprenable,
    un inviolable sanctuaire ?
    Tout ce qui est humain en toi peut succomber aux entreprises des hommes
    ou des événements, on peut déchiqueter ton corps, dévier ton intelligence,
    violenter ton cœur et même troubler ta conscience ;
    mais au seuil de l’âme toutes les puissances expirent, et le plus faible,
    le plus déshérité des hommes, peut fermer sur son secret une porte
    que nul ne saurait forcer ; comme Jésus devant Hérode, il peut demeurer silencieux.
    Ici est l’inviolable asile, ici la liberté ;
    et tous les martyrs ont buriné dans l’histoire humaine cette vérité :

    Ne craignez pas ceux qui peuvent bien tuer le corps,
    mais qui, après cela, ne peuvent rien de plus. »

    Merci et bien fraternellement
    Claire-Lise

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