Une jeune femme lève les bras en signe d'ouverture et de joie, elle est dans de l'herbe éclairée de soleil face à un pan de montagne couverte de sapin - Photo de Hanny Naibaho un petit peu éclaircie, partant de https://unsplash.com/fr/photos/homme-levant-les-bras-entre-greenfield-djLvhqqzesU
Question

Jésus ne baptisait pas dans l’eau, aurait-il demandé de baptiser ? d’eau ou d’Esprit ?

Question :
Bonjour Monsieur le Pasteur,
Je viens vers vous avec 2 questions concernant le baptême :


  • Pourquoi Jésus ne l’a jamais pratiqué lui-même ? Il l’a reçu (alors qu’il n’en avait sans doute pas besoin), il a demandé à ses disciples de l’administrer par toutes les nations. Ce geste est devenu depuis un sacrement de base pour la religion chrétienne, dans un contexte rituel très éloigné de celui d’origine.
  • Qu’en est-il du baptême de l’Esprit ? (que l’on classerait au niveau supérieur par rapport à celui de l’eau). En quoi consiste-t-il, de nos jours (s’il existe…), et qui est digne de le recevoir ?


Je suis bien consciente que ce sujet exigerait de très importants approfondissements, mais j’ose tout de même solliciter de votre part une réponse « dans les grandes lignes », si cela est possible. Un très grand merci par avance pour le temps que vous voudrez bien accorder à une petite réponse.

Bien cordialement.

Réponse d’un pasteur :

Pourquoi Jésus a reçu le baptême de Jean

Bravo de vous poser des questions, c’est excellent.

Je ne suis pas certain que Jésus n’avait pas besoin d’être baptisé par Jean. C’est effectivement ce qu’on lit dans bien des commentaires. Cela ne me convainc qu’à moitié pour deux raisons :

D’abord, avec cette hypothèse, ce geste de Jésus de demander le baptême serait alors une sorte de mascarade, il aurait fait semblant uniquement pour donner un exemple pédagogique. Je trouve que cela ne correspond pas à la façon d’être de Jésus, lui qui dit : « Que votre parole soit oui, oui, non, non ; ce qu’on y ajoute vient du mal. » (Matthieu 5:37), et dont le comportement est toujours si sincère et engagé.

Jésus et le sens du baptême

Ensuite, est-ce que Jésus pourrait être parfait, absolument parfait en vivant son ministère en ce monde ?

Jésus refuse qu’une personne l’appelle « bon » car, dit-il, Dieu seul est bon (Luc 18:19). Cela veut dire que Jésus considère qu’il est lui-même perfectible. Je crois que c’est le propre de tout humain. Bien sûr. L’humain est un être en évolution. Si Jésus ne connaissait pas de progression possible, il ne serait pas humain : il serait, contrairement à nous tous, né parfaitement parfait dès la première seconde. Ce n’est pas réaliste et ce n’est pas ce que dit l’Evangile (Luc 2:52). C’est ainsi que, lors de son baptême, la voix de Dieu aurait dit, selon certaines versions ancienne des manuscrits des évangiles « Tu es mon fils, aujourd’hui je t’ai engendré » (Luc 3:21 citant le Psaume 2:7), cela a donc bien apporté quelque chose à Jésus.

Pour ce qui est de ses actes, nous pouvons remarquer que Jésus n’a pas eu le moindre geste de compassion avec les Esquimaux, ils n’ont pourtant pas la vie facile dans ces conditions extrêmes dans lesquelles ils vivent. Bien sûr Jésus ne pouvait pas être partout, mais on peut toujours faire un petit peu plus, il aurait donc besoin en tant qu’homme de gérer quand même une sorte de culpabilité sourde de ne pas avoir tout fait. Il me semble sage et juste qu’avant même de se lancer dans ce ministère extraordinairement difficile qui est le sien, Jésus ait eu besoin de se plonger dans la grâce de Dieu, dans son pardon.

Jésus face aux contradictions de la Loi

De plus, Jésus, comme nous-mêmes, vivons dans un monde complexe où il y a parfois de multiples justes contraintes, mais qui sont contradictoires et qui nous placent dans une situation paradoxale, tragique, où aucune des solutions qui se présentent à nous n’est parfaite. Par exemple, quand une personne demande à Jésus de l’aider le jour du shabbat, la compassion l’invite à aider la personne immédiatement, alors que le respect du shabbat et donc le respect de Dieu lui imposent de ne pas travailler ce jour-là. Jésus choisit d’accomplir l’acte de compassion tout en expliquant publiquement pourquoi il le fait, que ce n’est pas un mépris de Dieu, bien au contraire. Cela n’empêche pas qu’il se trouve dans une situation délicate. Le reproche que lui font les intégristes de l’époque n’est pas complètement faux, Jésus agit à ce moment-là contre la lettre de la Bible, contre ses commandements, même si c’est pour en accomplir l’esprit qui est de le faire vivre. Cela peut donc sembler nécessaire pour Jésus et pour toute personne qui a une conscience de se placer sous le signe de la bienveillance de Dieu, qui comprend absolument nos difficultés de naviguer entre de multiples justes contraintes.

Pourquoi Jésus ne baptisait pas lui-même

Mais alors que dire du fait que Jésus ne baptise pas ?

Nous avons donc ce verset de l’Évangile selon Jean 4:2 qui dit que Jésus ne baptisait pas mais c’était son entourage. Ce verset est tout à fait étonnant quand on considère l’époque de rédaction de l’Évangile selon Jean. On lit souvent que cet évangile aurait été rédigé vers les années 70 ou 80. À cette époque on était en pleine constitution des églises, dans la mise en forme de la théologie, de la liturgie et des rites qui permettraient de rendre compte de la foi de Jésus-Christ d’une façon pédagogique dans un monde qui change. À cette époque, effectivement, le baptême était devenu une pratique courante chez les chrétiens comme signe de l’alliance scellée entre Dieu et la personne, la circoncision juive disparaissant progressivement dans l’Église chrétienne comme signe d’alliance avec l’arrivée massive de non juifs dans l’église chrétienne. Dans ce contexte, comment cet Évangile selon Jean se permettrait de discréditer un petit peu le geste du baptême en disant que Jésus ne baptisait pas lui-même ? Cela discrédite en effet passablement le baptême comme geste essentiel. La cause de ce fait surprenant est vraisemblablement un fait incontournable, connu de tous à l’époque de Jean, sinon il n’aurait pas pu écrire une chose comme cela !

C’est peut-être l’intention de Jean dans son texte : par fidélité à la façon d’être peu religieuse de Jésus, Jean relativiserait le baptême tout en poursuivant la création d’une religion chrétienne, afin de montrer que ces dogmes, cultes et rites qui sont en train d’être développés ne sont que des outils, des signes, ils ne sont pas l’essentiel.

Personnellement, je pense plutôt que ce verset de Jean 4:2 est beaucoup plus ancien que ce que l’on dit parfois, qu’il est un des tout premiers témoignages sur Jésus, quelques années à peine après sa disparition. Même si les derniers éléments de la rédaction de l’Évangile selon Jean datent des années 70 ou 80, ça ne veut pas dire que tout soit aussi tardif. Il peut y avoir eu une certaine partie des éléments qui ont été rédigés bien plus tôt.

Pourquoi est-ce que Jésus ne baptisait pas ?

Je ne suis pas dans sa tête, mais je veux bien poser des hypothèses, en fonction de ce que nous connaissons de lui.

Une raison théologique

Il peut y avoir une raison théologique : le baptême de Jean-Baptiste est un baptême de conversion pour le pardon des péchés. Avec ce geste, on pourrait penser que la personne qui n’est pas baptisée ne serait pas pardonnée par Dieu. Ce n’est peut-être pas ce que veut dire Jean-Baptiste avec son baptême, mais en tout cas cela peut le laisser penser. Or, pour Jésus, l’amour de Dieu est sans conditions : il va même jusqu’à aimer son ennemi. C’est ainsi que Jésus prie pour les soldats romains qui sont en train de le crucifier et qui ne sont pas du tout dans l’idée d’une repentance ou d’une conversion, et pourtant il leur manifeste plus que du pardon. Donc Jésus ne plonge pas les personnes dans de l’eau, mais il plonge les personnes dans l’annonce de l’amour inconditionnel de Dieu.

Jésus relativise les rites religieux

Ensuite, Jésus n’a pas créé une religion, en réalité. Sa mission était de renouveler notre foi en Dieu et notre façon d’être avec notre prochain. Son but n’était pas de créer une secte. Jésus était et est resté un pratiquant juif libéral, il était plutôt du genre à relativiser les rites et les obligations religieuses, plutôt que d’en créer de nouveaux. Il me semble donc assez logique que Jésus ne pratique pas le rite du baptême comme son cousin.

Et je trouve particulièrement sympa que Jésus laisse faire ses disciples à leur façon. Il me semble que cela montre qu’il appartient à ses disciples de génération en génération de se donner les outils permettant de travailler leur réflexion, d’exercer leur piété… et de poursuivre la mission du Christ.

Le baptême dans la mission des disciples

Pourtant, comme vous le soulignez, les derniers versets de l’Évangile selon Matthieu sont : “Allez, faites de toutes les nations des disciples, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, et enseignez-leur à observer tout ce que je vous ai prescrit. Et voici, je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin du monde.”   (Matthieu 28:19-20)

Que penser alors de ce dernier message de Jésus dans l’Évangile selon Matthieu ?

Il y a quelque chose de bizarre à propos de ces mots « Allez, faites de toutes les nations des disciples, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit » (Matthieu 28:19) : on voit dans le livre des Actes des apôtres que les disciples baptisaient « au nom de Jésus-Christ » (Actes 2:38), ou « au nom du Seigneur » (Actes 10:48), ou encore « au nom du Seigneur Jésus » (Actes 19:5). Si vraiment Jésus avait donné l’ordre à ses apôtres juste avant de partir de baptiser « au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit« , ce serait vraiment incompréhensible qu’ils n’utilisent ensuite pas cette formule pour baptiser. Par conséquent, il est probable que ces dernières phrases de l’Évangile selon Matthieu ont été ajoutées à la fin de l’Évangile selon Matthieu à une époque où l’Église cherchait à promouvoir ce geste. Très tôt quand même car aucun des manuscrits que nous avons n’omet ces versets.

Le baptême d’eau et le baptême de l’Esprit

Vous avez raison, ce baptême dans l’eau, c’est plus un baptême de conversion signifiant que nous sommes lavés de nos péchés, de notre vie ancienne, gouvernée par nos programmations animales, pour être comme préparées à recevoir les dons du Christ. C’est-à-dire le baptême d’Esprit. Le baptême de Jean-Baptiste, dans l’eau, n’est donc qu’une préparation, il n’est pas le baptême de Jésus-Christ qui est le don de l’Esprit Saint.

C’est ce que dit Jean Baptiste en parlant de Jésus : « Moi‭‭, je vous‭ baptise‭‭ d‭’eau‭, pour vous amener‭ à la repentance‭ ; mais‭ celui qui vient‭‭ après‭ moi‭ est‭‭ plus puissant‭ que moi‭, et je ne suis‭‭ pas‭ digne‭ de porter‭‭ ses‭ souliers‭. Lui, il vous‭ baptisera‭‭ du‭ Saint‭-Esprit‭ et‭ de feu‭. » (Matthieu 3:11, Luc 3:16)

Recevoir l’Esprit aujourd’hui

Quand et comment reçoit-on l’Esprit ?

Une question se pose : l’Esprit de Dieu ne serait-il pas une part constitutive de la personne humaine, lors de sa création ? C’est ce que nous dit la Genèse par exemple. « L’Éternel Dieu forma l’humain de la poussière de la terre, il souffla dans ses narines un souffle de vie et l’homme devint un être vivant. »   (Genèse 2:7) Par conséquent, le don de l’Esprit en Christ, c’est une dimension supplémentaire de l’Esprit qui fait que la personne est comme encore augmentée.

La théologie chrétienne dit que ce que nous apporte le Christ : c’est que nous sommes faits prêtre ou prêtresse, prophète ou prophétesse, roi ou reine. Que nous prenions ainsi pleinement conscience de cette mission que nous avons d’être en ligne directe, cœur à cœur, avec Dieu, que cela nous donne un point de vue élevé sur la réalité du monde, que ça nous donne de parler de nous, de nous engager de façon créative pour faire avancer le monde autour de nous. C’est ce que l’on envoie finalement en Jean 20 : « Jésus leur dit : La paix soit avec vous ! Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie. Après ces paroles, il souffla sur eux, et leur dit : « Recevez le Saint-Esprit. Ceux à qui vous pardonnerez les péchés, ils leur seront pardonnés ; et ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus. »   (Jean 20:21-23) Le don de l’Esprit est une paix, c’est-à-dire le développement de notre être harmonieux, et c’est un envoi en mission pour libérer les gens de leur culpabilité, pour qu’ils se sentent dignes d’être eux-mêmes, pour qu’ils se sentent en confiance avec Dieu.

Conclusion : vivre chaque jour le baptême de l’Esprit

À mon avis, c’est cela le baptême de l’Esprit Saint, c’est quelque chose à vraiment ressentir personnellement par la foi, dans la prière ou par surprise, une dynamique qui mobilise le meilleur de nous-mêmes et qui nous permet d’évoluer.

Le baptême d’Esprit, cela n’est pas, ne peut pas être un rite d’église.

Le rite du baptême donné par l’Église a été développé plus tard pour essayer de rendre compte de cette théologie, de cette foi du Christ : pour nous dire que Dieu aime cette personne en particulier, sans condition, même si elle devenait ennemie de Dieu. C’est la fin de tout chantage. Notre baptême vient dire cette réalité essentielle, en espérant que ce sera libérant pour la personne et que cela lui donnera envie de se tourner vers Dieu, comme le dit l’apôtre Jean dans sa lettre : « Pour nous, nous l’aimons (Dieu) parce qu’il nous a aimés le premier. »  (1 Jean 4:19)

Le baptême d’Esprit, c’est se sentir saisi par cette mission d’aimer en vérité. C’est à vivre dans l’instant et à approfondir. C’est donc chaque jour, à mon avis, que nous demandons à Dieu son Esprit, avec confiance.

Dieu vous bénit et vous accompagne.

 

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