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Ethique

J’aurais bien aimé savoir ce que vous entendez, vous, par confiance en Dieu ?

Par : pasteur Marc Pernot

Une plume posée sur une Bible ouverte sur le Psaume 91 - Photo by Debby Hudson on Unsplash

Magnifique Psaume 91. Comme si ce Psaume de confiance en Dieu venait d’être écrit pour nous.

Question posée :

Cher Marc,
En prenant ma plume ce matin (c’est tellement plus poétique qu’un clavier d’ordinateur), je réalise à quel point c’est une chance d’avoir quelqu’un de confiance à qui soumettre ses interrogations en toute sincérité, espérer recevoir quelques éléments pour avancer dans la foi et dans la vie, et j’en suis vraiment reconnaissante.
J’ai été amenée récemment à réfléchir sur la confiance en Dieu, ce que cela signifie et quelles sont les implications concrètes dans ma vie, et je me suis rendu compte que la réponse n’est pas si évidente pour moi. Lorsque je demande à Dieu plus de confiance, qu’est ce que je demande en réalité ?
Certains voient la confiance en Dieu comme l’assurance d’une protection, d’autres comme la certitude que tout est entre les mains de Dieu, d’autres encore pensent que quoi qu’il arrive Dieu nous donne la force de supporter, … Ces différentes conceptions ne correspondent pas trop à ce que je comprends de Dieu. De même, je ne suis pas sûre que la confiance en Dieu est liée au doute quant à son existence.
Si la confiance en Dieu c’est avoir confiance en son pardon radical et sans condition, croire que rien ne nous séparera de son amour, alors, sans aucune prétention, cela ne me parait pas bien compliqué.
Mais, dans ma situation par exemple, où je suis malade (maladie au long cours, sans guérison à l’horizon), je sais que ce qui est devant moi sera difficile. Si la confiance en Dieu est de ne pas avoir peur, alors j’ai bien besoin de progresser.
Il est des situations extrêmes (douleurs physiques ou psychiques insupportables, certaines maltraitances dont il est impossible de sortir, dangers de mort, …) où je ne vois aucun sens concret à donner à la confiance en Dieu.
Peut-être que la confiance est simplement une assurance des qualités de Dieu et que le concret réside alors dans ce que cela implique dans ma façon de vivre.
Tout cela est un peu confus pour moi (je ne sais même pas si ce que je viens d’écrire est entièrement cohérent) et j’aurais bien aimé savoir ce que vous entendez, vous, par confiance en Dieu.
Pour avancer, c’est certainement mieux de savoir clairement vers quoi on veut avancer.
Amicalement,

Réponse d’un pasteur :

Bonsoir

Quelle magnifique et profonde interrogation. C’est vrai que « la confiance en Dieu » est une expression qui peut vite devenir une sorte de petite musique, une expression répétée sans que l’on y prête plus d’attention, de profondeur. Or, cela n’a précisément pas de sens quand c’est ainsi.
C’est pourquoi votre interrogation est tout à fait fondamentale. Elle ouvre, je pense sur un travail (si je puis dire). Cette « confiance » se travaille comme un muscle, se travaille comme l’esprit d’équipe entre collègues, comme on approfondit des relations entre amis, ou dans le couple.
de qualité de notre relation avec Dieu, c’est hyper plus important que de tout savoir sur la plus savante des théologies, en tout cas, Jésus insiste bien plus sur cette confiance en Dieu que sur tout le reste.

Comme vous le soulignez très justement, notre difficulté de saisir Dieu, si je puis dire, ne facilite pas. Cette difficulté de saisir, de définir, de préciser qui est Dieu est tout à fait normale, et d’ailleurs salutaire.

Car le mot « Dieu » recouvre plusieurs « choses » différentes, et cela donne des « confiances en Dieu » différentes, que l’on peut éventuellement combiner selon sa propre sensibilité.

1) Quand on entend par Dieu : le créateur de l’univers. Lui faire confiance veut dire que nous comptons sur sa puissance pour arranger plus ou moins directement nos affaires, ou celles de l’univers.

Ce n’est pas sans poser quelques difficultés :

  • car si l’hypothèse de l’existence de cette source d’évolution me semble l’hypothèse la plus plausible, la plus raisonnable, elle n’est pas une certitude totale à 100%.
  • Un tel créateur serait infiniment puissant, vu la taille et l’extraordinaire merveille de bien des réalités présentes. Mais le fait que ce monde soit en évolution, et qu’il reste tant de souffrances, il semble que ce créateur n’est pas tout puissant (voir éventuellement ces articles du petit dictionnaire sur l’existence du mal, et sur la puissance de Dieu).

Du coup, que signifie « faire confiance à Dieu, à ce Dieu là, créateur de l’univers » ? Personnellement, je la vois commencer dans une « contemplation » devant les merveilles de l’univers et en particulier de son évolution. Cela demande de la bienveillance car tout n’est pas parfait dans cet univers, il y a bien des violences, des dysfonctionnements, de l’injustice cause de souffrances. Mais quand même, c »est un émerveillement, une gratitude. Celle d’exister et de voir tant d’autres merveilles. Celle de pouvoir parfois participer à cette joie du monde, et même de faire parfois un petit geste personnel qui participe à cet élan de création, par un peu de beauté, d’évolution. Cela me semble inspirant. la confiance en Dieu est alors celle qu’un beau geste n’est pas inutile, qu’il participe à quelque chose d’immense qui me dépasse mais où ce geste entre dans un ensemble. Et est gardé.

La confiance en ce Dieu ne signifie pas le prendre pour un magicien, mais cette confiance est que Dieu fera au mieux, effectivement, pour arranger le plus possible, à sa façon. Que même s’il ne peut pas me guérir d’une maladie, il lutte avec nous, il encourage la recherche, il mobilise le meilleur de mon corps, de mon moral, et des ressources de mon entourage…

2) Il y a autre chose, car l’idée de Dieu n’est pas seulement celle d’un créateur qui serait comme une personne extérieure à l’univers et qui participerait à la création du monde. Quand nous doutons de l’existence d’un tel créateur, nous pouvons aussi le définir comme la source de ce qui me rend plus vivant, plus réellement vivant dans tous les sens du terme, et en particulier dans ce qui me semble me rendre meilleur, plus épanoui, plus rayonnant de belles choses, de relever la tête, source d’approfondissement. C’est à nous-même de chercher qu’est-ce qui compose notre source. La confiance en Dieu est alors se concentrer sur ce que compose notre source. Même si pour l’un c’est l’amour, pour l’autre ses engagements politiques, pour un troisième sa famille, ou l’émotion musicale… C’est déjà immense de chercher, au fond du fond, ce qui est source de vie en nous. Et de le prendre en compte, de lui faire confiance. Pour bien des personnes depuis que l’humain n’est plus seulement une sorte de signe, ce que l’on désigne en français par le mort Dieu a sa place dan cette source, il est même en amont de nos autres sources.

3) Si la 2e confiance en Dieu nous aidait à nous tourner vers la source, je pense qu’il y a une troisième confiance en Dieu comme une visée. par définition, Dieu est un être qui a ou qui aurait toutes les qualités. Quand nous nous forgeons une certaine idée de Dieu, même si nous ne sommes pas certain qu’il existe, notre théologie définit des valeurs, ce que nous entendons par la bonté, la grandeur, ce qui est juste, ce qui est bien. Faire confiance à Dieu c’est se recentrer sur ces valeurs comme fondamentales, que chercher à les vivre est un beau chemin. Faire confiance à Dieu, en ce sens, c’est se placer devant cet idéal que nous nous sommes forgé (c’est ce que l’on appelle la prière), pour se réjouir des traces de cela dans notre journée, et espérer les vivre un petit peu plus le lendemain. Cette forme de confiance en Dieu nous crée, jour après jour, un petit peu plus à l’image de notre idée de Dieu. Il est donc utile à la fois d’affiner notre conception de Dieu et de pratique ce face à face de confiance, plaçant notre être et notre vie, notre monde tel qu’il est devant lui.

4) Il y aurait, un peu dans ce registre, faire confiance dans le Dieu dont parle la Bible, dont parle mon église, dont parle telle personen que j’apprécie. C’est possible et cela me semble en partie excellent. En partie seulement. Car l’humain est béni en tant que personne aussi, ce qui veut dire que son point de vue personnel est attendu, qu’en avoir un fait partie de sa vocation. Cela demande effectivement de recevoir des générations passées et de nos rencontres, de la Bible, de l’église, de la culture, de l’observation, de l’éducation, mais aussi de Dieu, en faisant notre propre synthèse, en la révisant.

Donc la confiance dans les idées de Dieu qui nous sont proposées de toute part est une confiance toujours avec réserve, tournées dans notre propre prière et dans notre propre observation et réflexion.

5) J’aime beaucoup aussi votre confiance en Dieu qui est une « confiance en son pardon radical et sans condition, croire que rien ne nous séparera de son amour ». C’est le sentiment de notre propre dignité en tant qu’humain. Cela me semble essentiel.

6) Il me semble normal, et sain d’avoir peur devant les aléas de l’existence, l’accident, la trahison, la maladie, la mort de nous même ou d’un être cher, le dénuement, l’angoisse. Cela serait inconscient de ne pas avoir peur de cela car nous sommes un être de chair et qu’il serait bien que chaque personne puisse être le plus en forme possible. Donc, je ne dirais pas que la confiance en Dieu devrait annuler cette peur. Cela dit, je pense que les diverses façons de faire confiance en Dieu nous permet de bien vivre, d’une assez belle et bonne façon, chaque jour que nous avons, d’en savourer quelques aspects d’une extraordinaire saveur. Parfois de poser un petit geste qui embellira la journée d’une autre personne, peut-être seulement en entendant vraiment sa peur, et de lui dire qu’elle n’est pas seule.

Dieu nous garde. Vraiment.

par : Marc Pernot, pasteur à Genève

Réponse du visiteur :

De tout cœur, merci d’avoir pris le temps de me répondre d’une façon si détaillée. La (ou plutôt les) confiance en Dieu que vous décrivez me conviennent bien car cela permet réellement d’être travaillé et m’enlève une certaine culpabilité que je ressentais confusément en voyant ma peur comme un manque de confiance. J’ai bien aimé aussi lorsque vous reliez la confiance en Dieu à la confiance dans le témoignage des autres, avec discernement bien entendu. Mais c’est vrai que cela est encourageant dans des moments de doute de s’appuyer sur la foi d’autres, en particulier ceux qui nous paraissent dignes de confiance.
Lire votre mail ce dimanche matin m’a fait beaucoup de bien et m’a conduite à la prière. J’ai tant envie « d’habiter chaque jour dans la maison de l’Éternel », comme vous le décrivez si bien dans votre commentaire sur ce verset. Et sur ce chemin, vous m’êtes d’une grande aide, je ne le répéterais jamais assez.

Réponse d’un pasteur :

C’est moi qui vous remercie.
Et je le fais dans l’admiration, dans la communion.

par : Marc Pernot, pasteur à Genève

 

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3 Commentaires

  1. Michel dit :

    La toute-puissance de Dieu n’est-elle pas tout simplement sa puissance d’amour ?
    Voir les choses comme cela résout bien des problèmes de compréhension des textes.

    1. Marc Pernot dit :

      Certainement.
      En même temps, quand on aime quelqu’un, ce n’est pas seulement être à ses côtés en lui disant je t’aime, je t’aime. C’est aussi agir pour la personne. Aimer, c’est aimer en actes. Cela me semble essentiel en Christ. C’est cette incarnation de l’amour de Dieu en paroles et en actes. Et Jésus insiste sur cette mise en actes, en fruits.
      Dieu aime, et il agit. Pas comme un magicien (ce que nous espérons souvent, il faut le reconnaître), mais Dieu agit en profondeur, en amont de solutions nouvelles offertes.

  2. Anne Marie dit :

    Ne cherchez pas, vivez, nous sommes là pour cela et vivons pour apporter de la joie et de l’amour, c’est ce que nous emporterons avec nous et c’est pour cela que nous sommes ici. Très bonne question, je me la suis posée moi aussi 🙂

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